Rhumatologie
Arthrose : le Big Data annonce des stratégies de médecine de précision
L’intelligence artificielle, en analysant des très grandes quantités de données, permet de déterminer des groupes de malades homogènes, avec l’identification de 3 groupes d’arthrose qui pourraient faire l’objet d’un traitement spécifique et différencié.
- Nobi_Prizue/istock
Avec les progrès de l’intelligence artificielle, il est désormais possible d’analyser des très grandes quantités de données et de déterminer des groupes de malades plus homogènes. C’est ce processus qui a abouti à l’identification de 3 groupes d’arthrose qui pourraient faire l’objet d’un traitement spécifique et différencié.
Dans une étude publiée dans ARD, des méthodes informatiques basées sur l'apprentissage automatique non supervisé ont été utilisées en Big Data pour stratifier les cohortes d'arthrose en sous-ensembles correspondant à des endotypes moléculaires distincts.
En appliquant ces méthodes à la cohorte d’arthrose IMI-APPROACH, une équipe de chercheurs de Newcastle a identifié trois groupes d’arthrose dominants et les a caractérisés comme étant des phénotypes inflammatoires, des phénotypes à faible niveau de réparation et des phénotypes liés à l'os sous-chondral ou au cartilage articulaire. Les patients de ces clusters découverts ont des différences statistiquement significatives dans leurs caractéristiques cliniques.
Une maladie hétérogène
L'arthrose est la forme d'arthrite la plus courante chez les personnes âgées. Les facteurs de risque pour le développement de l'arthrose sont l'âge, le sexe, l'obésité, les lésions articulaires antérieures, les contraintes répétées sur l'articulation, le mauvais alignement des membres, la génétique (formes familiales), la forme des os (y compris les déformations) et certaines maladies métaboliques.
Cependant, bien qu'il s'agisse d'un syndrome multiforme et hétérogène, il serait possible de cibler différents traitements pour différents groupes de patients en fonction des drivers de leur maladie. Ces groupes seraient caractérisés par leurs endotypes moléculaires (description d'un sous-ensemble de patients avec des caractéristiques moléculaires communes) et leurs phénotypes cliniques (caractéristique ou trait observable de différentes formes de la maladie). L'arthrose pourrait ainsi répondre à des traitements sur mesure qui cibleraient des phénotypes spécifiques, notamment les phénotypes inflammatoires, les phénotypes à faible niveau réparation, les phénotypes liés à l'os sous-chondral, les phénotypes métaboliques ou les phénotypes liés à une maladie du cartilage articulaire.
3 groupes distincts de malades
Ces travaux d’analyse IA sur des grandes séries de malades et de paramètres biologiques et cliniques confirment l'existence d’au moins 3 phénotypes différenciés dans l'arthrose. Trois endotypes dominants seraient associés à trois phénotypes distincts : C1) faible renouvellement des tissus (faible réparation et faible renouvellement du cartilage articulaire/de l'os sous-chondral), C2) dommages structurels (formation/résorption osseuse élevée, dégradation du cartilage) et C3) inflammation systémique (dégradation des tissus articulaires, inflammation, dégradation du cartilage).
La méthode d’analyse IA a reproduit des résultats cohérents dans une autre cohorte, la cohorte FNIH/OAI. Par ailleurs, C1 avait la plus forte proportion de non-progressifs. C2 serait principalement lié à la progression structurelle longitudinale, et C3 serait lié à une douleur soutenue ou progressive.
Une analyse qui pose les bases d’un traitement de précision
L’étude a été réalisée dans une population essentiellement caucasienne et les biomarqueurs, qui ont été mesurés dans des laboratoires certifiés, ont été sélectionnés en fonction des connaissances actuelles sur le renouvellement des tissus articulaires et l'arthrose. Il s’agit des marqueurs biologiques suivants : S_RE_C1M, S_C2M, S_C3M, S_C10C, S_CRPM, S_PRO_C2, U_CTXII, S_CTXI, U_CTXI_ALPHA, S_NMID, S_HA, S_COMP et S_hsCRP, S_COLL2_1 et S_COLL2_1NO2et S_ARGS). Tous ces marqueurs reflètent soit l’inflammation, soit la résorption, soit la formation de cartilage.
Ces travaux Big Data confirment l'existence de phénotypes identifiables et différenciés dans l'arthrose. L'approche fondée sur les biomarqueurs pourrait potentiellement conduire à une stratification pour les futurs essais cliniques sur l'arthrose et contribuer à choisir des stratégies de médecine de précision contre la progression de la maladie arthrosique.