Arrêts maladie
Rémunérations : les médecins menacent l'Assurance maladie d'une grève du zèle
EXCLUSIF - Face à la colère des médecins, l'Assurance maladie devrait renoncer à rémunérer les praticiens en fonction de la pertinence de leurs arrêts maladie. La menace d'une grève du zèle plane.
A la lecture de ces lignes, le sang des médecins n'a fait qu'un tour. Dans un document présenté ce matin lors d'une séance conventionnelle, l'Assurance maladie a proposé de changer les règles de la ROSP, rémunération sur objectifs de santé publique (prescriptions de génériques, équipement du cabinet médical, dépistages de certains cancers, etc.). Un chèque versé aux médecins libéraux qui s'est élevé l'an dernier en moyenne à 4 514 euros.
Une mesure en particulier n'est pas passée du côté des syndicats médicaux, l'introduction dans la ROSP d'indicateurs relatifs à la pertinence des prescriptions d'arrêt de travail (indemnités journalières) au regard des préconisations existantes. Ainsi, les médecins sont invités par la Haute Autorité de Santé (HAS) à prescrire 5 jours d'arrêt de travail pour une grippe saisonnière, 3 pour une angine ou 21 jours pour une entorse grave lorsque le patient effectue « un travail physique lourd ».
Quatre syndicats prêts à quitter la négociation
« Lorsqu'un arrêt de travail est prescrit en ligne (AAT), sa durée est plus souvent conforme aux référentiels existants, probablement du fait de la possibilité de choisir parmi les durées standard proposées par l'outil », écrit la CNAM dans le document. « Des indicateurs ROSP pourraient valoriser le respect des référentiels qui y figurent », ajoute-t-elle. Une fin de non recevoir pour la CSFM (1), la FMF (2), le SML (3), et LE BLOC. Ces quatre syndicats ont même menacé de quitter la table des négociations si la mesure figurait dans la prochaine convention médicale.
L'idée des malus abandonnée
Autre mesure qui ne passait pas, la création de « malus concernant la rémunération des indicateurs d'efficience ». Alors que la ROSP récompensait jusqu'ici les pratiques vertueuses, l'Assurance maladie prendrait désormais en compte les objectifs de santé publique non atteints par les praticiens concernés (généralistes, cardiologues, gastro-entérologues). Avec pour conséquence directe une diminution des montants versés aux médecins. Mais là idem, les syndicats médicaux ne voulaient pas en entendre parler.
Et ces derniers ont été entendus. Contacté par Pourquoidocteur, le Dr Jean-Paul Ortiz, président de la CSMF, a indiqué que la réunion d'aujourd'hui au siège de l'Assurance maladie s'est déroulée dans un climat « très tendu ». Mais celui-ci n'a pas duré très longtemps puisque Nicolas Revel, directeur général de la CNAM, s'est engagé en fin de séance à abandonner les malus. L'incitation pour faire réduire les arrêts de travail serait elle aussi en passe d'être retirée. Sur ce point, l'Assurance maladie a en effet promis qu'elle allait « écouter les revendications des médecins », conclut le Dr Jean-Paul Ortiz. Réponse lors de la prochaine séance conventionnelle programmée mercredi prochain.
Dans l'attente, le Dr Jean-Paul Hamon, président de la FMF, promet une « grève du zèle » en cas de maintien de la mesure. « Si l'Assurance maladie ne fait par marche arrière, on appliquera les référentiels strictes de la HAS. Je garantis que les indemnités journalières vont augmenter », menace-t-il. Pour la CNAM, la facture pourrait bien être salée...
(1) Confédération des Syndicats Médicaux Français
(2) Fédération des Médecins de France
(3) Syndicat des Médecins Libéraux