"Oscars de la Science"
Prise en charge de la sclérose en plaques : deux chercheurs primés pour avoir changé la donne
Les docteurs Stephen Hauser et Alberto Ascherio sont les lauréats des "Oscars de la science" pour leurs découvertes sur la sclérose en plaques qui ouvrent la voie à de nouveaux traitements.

- Par Stanislas Deve
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- Pornpak Khunatorn / istock
Leurs noms ne vous disent peut-être rien, mais leurs travaux ont changé la vie de millions de patients. Les docteurs Stephen Hauser, neurologue américain, et Alberto Ascherio, épidémiologiste italien, sont les lauréats 2025 du Breakthrough Prize, considéré comme les "Oscars de la science". Une récompense pour plusieurs décennies de recherche sur la sclérose en plaques (SEP), une maladie auto-immune neurodégénérative qui touche près de trois millions de personnes dans le monde, et qui est toujours considérée comme une énigme.
Un traitement qui réduit de 90 % l'inflammation cérébrale
Tout commence pour Stephen Hauser dans les années 1970, lorsqu’il rencontre Andrea, une jeune femme brillante, réduite en quelques semaines au silence et à la paralysie par la sclérose en plaques. "Je me souviens de l'avoir vue, incapable de parler, paralysée du côté droit, incapable d'avaler, et bientôt incapable de respirer sans aide, et d'avoir pensé que c'était la chose la plus injuste que j'aie jamais vue en médecine", raconte-t-il à l’AFP. Un déclic pour le médecin alors âgé de 27 ans, qui décide d’y consacrer sa vie.
À l'époque, aucun traitement n'existe et les espoirs de guérison sont maigres. On sait alors que cette maladie, qui affecte le système nerveux central et provoque des troubles moteurs et cognitifs lourds, est provoquée par un emballement du système immunitaire. Les recherches se concentrent donc sur les lymphocytes T, soupçonnés d'être les principaux responsables de l'inflammation. Mais Stephen Hauser va changer la donne.
Des traitements qui ralentissent la progression de la maladie
En travaillant sur les ouistitis, son équipe montre que les lymphocytes B, un autre type de globules blancs, sont en fait des acteurs clés. Jugée "biologiquement invraisemblable" par les autorités médicales de l'époque, cette hypothèse mène pourtant en 2006 à la mise au point d’un traitement capable de réduire de plus de 90 % l'inflammation cérébrale. Une révolution qui a ouvert la voie à la commercialisation de traitements ralentissant la progression de la maladie chez de nombreux patients.
Un lien clair entre la SEP et le virus d’Epstein-Barr
De son côté, l’épidémiologiste Alberto Ascherio tente de percer un autre mystère : pourquoi la maladie est-elle surtout présente dans l’hémisphère Nord ? En suivant pendant plus de 20 ans des millions de jeunes militaires américains, son équipe confirme en 2022 un lien fort entre la SEP et le virus très commun d’Epstein-Barr. Si "la plupart des personnes infectées par le virus l'Epstein-Barr ne développeront jamais de SEP [...] la maladie survient uniquement chez des individus ayant été infectés en premier lieu par le virus", précise le professeur de 72 ans. L’infection est donc nécessaire, mais pas suffisante à elle seule pour expliquer le déclenchement de la maladie.
Alors qu’à ce jour, la sclérose en plaques ne peut pas être guérie et les traitements ralentissant sa progression ne sont pas efficaces sur tous les patients, cette découverte ravive l’espoir d’un vaccin préventif ou de traitements ciblés. Elle ouvre aussi de nouvelles pistes pour d’autres pathologies : "Nous essayons maintenant d'étudier le rôle de l'infection virale dans d'autres maladies neurodégénératives, comme Alzheimer ou la maladie de Charcot", ajoute Ascherio.
The 2025 Breakthrough Prize in Life Sciences goes to Alberto Ascherio, who showed the key risk factor for multiple sclerosis is infection with the Epstein-Barr virus; and to Stephen Hauser, who discovered central mechanisms of the disease and developed life-changing treatments… pic.twitter.com/sOuGjjKOWH
— Breakthrough (@brkthroughprize) April 5, 2025