Cardiologie

Artérite des membres inférieurs : l’angioplastie avec ballon et stent non enduits suffit

Chez les patients atteints d’ischémie chronique menaçante des membres inférieurs, BASIL-3, un essai randomisé institutionnel, montre que lors de la revascularisation fémoro-poplitée, les ballons et les stents enduits n’apportent pas de bénéfice majeur sur la survie sans amputation, comparés aux ballons ou stents standards.

  • Rasi Bhadramani/istock
  • 02 Mar 2025
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    L’ischémie critique chronique (ICM) est la forme la plus sévère de l’artériopathie des membres inférieurs et expose à un risque accru d’amputation majeure ou de décès, notamment en l’absence de revascularisation rapide. Les stratégies endovasculaires ont acquis une place essentielle, aux côtés du pontage chirurgical, pour rétablir la perfusion tissulaire et réduire la morbi-mortalité. Jusqu’ici, plusieurs essais randomisés financés par des organismes publics (BASIL, BEST-CLI, BASIL-2) ont comparé différentes approches. Toutefois, leur champ d’investigation laissait persister une incertitude quant à la supériorité éventuelle des ballons ou stents enduits, ou à élution médicamenteuse, (DCBA±BMS ou DES) par rapport à l’angioplastie simple avec ou sans stent métallique nu (PBA±BMS), surtout pour la revascularisation fémoro-poplitée.

    BASIL-3, un essai contrôlé randomisé multicentrique, a donc recruté 481 participants dans 35 centres britanniques. Son objectif était d’évaluer l’amputation free survival (AFS), c’est-à-dire la probabilité de rester en vie sans amputation majeure. Les patients étaient répartis en trois groupes, recevant en première intention PBA±BMS, DCBA±BMS ou DES. Les résultats, publiés dans The BMJ, recueillis entre janvier 2016 et août 2021, montrent un taux d’événement principal (amputation majeure ou décès) de 66% dans le groupe PBA±BMS, 60% dans le groupe DCBA±BMS et 58% avec DES, sans différence statistique significative (HR respectifs de 0,84 et 0,83, avec des intervalles de confiance larges qui incluent l’hypothèse nulle). En d’autres termes, l’emploi de technologies médicamenteuses sur les ballons ou les stents n’a pas permis de démontrer un avantage substantiel sur ce critère clinique essentiel.

    Absence de bénéfice même dans les sous-groupes

    Les analyses secondaires confirment l’absence de bénéfice marquant pour les approches actives. Les taux d’événements défavorables liés au membre (major adverse limb events) et d’événements cardiovasculaires majeurs (major adverse cardiac events) sont restés comparables dans les trois groupes. De même, aucun surcroît de complications sévères à 30 jours n’a été observé pour l’une ou l’autre des stratégies.

    Les sous-groupes anatomiques, y compris ceux avec une atteinte infrapoplitée, n’ont pas mis en évidence de différence notable, et la tolérance globale est apparue similaire, quels que soient la technique initiale ou le recours à des dispositifs médicamenteux. L’utilisation restreinte de nouvelles technologies disponibles au cours de l’essai, telles que des ballons recouverts de sirolimus ou des stents biomimétiques, n’a pas modifié la tendance globale, même si les effectifs engagés restent trop faibles pour en tirer des conclusions spécifiques.

    Les épisodes de non-adhérence, en particulier dans les groupes DCBA±BMS et DES, n’ont pas conduit à une différence majeure de résultat. Enfin, la pause de recrutement liée aux débats sur la sécurité de la paclitaxel, puis la période de pandémie de la Covid-19, n’ont pas semblé altérer la robustesse des conclusions de BASIL-3.

    Un essai randomisé indépendant

    BASIL-3 se caractérise par une méthodologie rigoureuse et pragmatique, soutenue par un financement public (NIHR HTA), gage de transparence et de pertinence clinique. Les 35 centres du NHS britannique participants reflètent la variété de pratiques rencontrées chez des patients CLTI, souvent polymorbides et difficiles à inclure dans des essais plus spécialisés. Le critère principal, fondé sur l’amputation free survival, est hautement pertinent pour juger de l’intérêt d’une revascularisation, et le nombre d’événements recueillis dépasse les prévisions initiales, renforçant la puissance statistique. En outre, le suivi plus long qu’anticipé et l’exhaustivité des causes de décès soutiennent la fiabilité des données.

    Selon les auteurs, les résultats de BASIL-3 invitent la communauté médicale à une réévaluation de l’intérêt de la DCBA ou des DES dans ce contexte. Les ballons et stents standards (PBA±BMS) semblent offrir des résultats comparables en termes de survie sans amputation, sans différences notables en matière de tolérance. En pratique, une sélection individualisée des dispositifs apparaît préférable, en tenant compte du profil anatomique, des ressources disponibles et de la balance bénéfice-risque à long terme. Dans l’attente de l’analyse médico-économique, qui sera présentée ultérieurement, ces conclusions placent l’angioplastie simple au cœur de l’arsenal thérapeutique.

    Des études dédiées à la durabilité anatomique (restenose, réinterventions) et aux sous-groupes vasculaires, associées à des modèles de décision médico-économique, viendront compléter ce travail. En définitive, BASIL-3 apporte une preuve robuste en faveur du non-bénéfice majeur des stratégies actives, ce qui pourrait infléchir les pratiques actuelles et guider l’actualisation des recommandations internationales sur l’ischémie chronique menaçant le membre.

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    JDF

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