Pneumologie
La biopsie bronchique pour prédire la réponse aux biothérapies dans l’asthme sévère : efficace mais invasive
La biopsie bronchique représente un outil pertinent pour prédire la réponse aux biothérapies dans l'asthme sévère, grâce aux marqueurs cytologiques mais elle reste toutefois un examen invasif, qui n’est pas forcément sans danger pour les asthmatiques sévères. Elle a réserver à des cas particuliers. D’après un entretien avec Camille TAILLE.

Une étude, dont les résultats sont parus en janvier 2025 dans CHEST, a cherché à évaluer l’intérêt de la biopsie bronchique dans la prédiction de la réponse aux biothérapies chez les patients asthmatiques sévères. Il s’agit d’une étude prospective multicentrique. Au total, 92 patients ont été inclus et 78 d’entre eux ont terminé l’étude. Ils étaient tous candidats aux biothérapies par anti-IL5/5R (mepolizumab, reslizumab et benralizumab et dupilumab). Ils ont bénéfice d’une bronchoscopie avec biopsie bronchique avant la mise en route de la biothérapie et ont eu une évaluation clinque 6 mois plus tard. La biopsie bronchique a été évaluée en fonction, d’un score pathologique validé au préalable et comparée aux marqueurs sanguins et à la FeNO. Les patients répondeurs aux biothérapies ont ensuite été classés comme super-répondeurs, bons répondeurs et répondeurs partiels ou nuls en fonction d’un score composite comprenant le nombre d’exacerbations, la consommation de corticoïdes, le test de contrôle de l’asthme et l’amélioration du VEMS.
Une meilleure sensibilité des marqueurs cytologiques
Le professeur Camille TAILLE, pneumologue, spécialiste de l’asthme sévère, à l’Hôpital Bichat-Claude Bernard, à Paris, rappelle qu’il existe plusieurs marqueurs pour classer les patients asthmatiques ayant une inflammation de type 2 : les marqueurs sanguins avec, notamment, l’éosinophilie, les marqueurs aériens avec la mesure de la FeNO et les marqueurs cytologiques, obtenus par expectorations induites ou biopsie bronchique. Ce travail a permis de calculer un score pathologique après endoscopie et biopsie bronchique, en mesurant le nombre d’éosinophiles présents dans la muqueuse bronchique et en évaluant les paramètres de remodelage comme l’hyperplasie glandulaire, les anomalies épithéliales ou encore l’épaississement de la membrane basale. La réponse à distance de la mise en place de biothérapies, de type ant-IL5/5R a ensuite été observée. Camille TAILLE souligne que le score pathologique était plus élevé chez les patients super-répondeurs aux anti IL5/5R et que c’est le seul élément corrélé à la bonne réponse. Elle précise que l’éosinophilie sanguine et la mesure de la FeNO ne prédisent pas la réponse aux biothérapies. De plus , en comparant tous les items des marqueurs cytologiques, les auteurs ont observé que les patients super-répondeurs étaient ceux qui avaient l’éosinophilie dans la muqueuse bronchique la plus élevée. La biopsie bronchique est donc plus sensible que les marqueurs sanguins de l’inflammation de type 2 pour prédire la réponse aux biothérapies, dans l’asthme sévère.
Un geste trop invasif pour simplement prédire la réponse au traitement
Malgré l’intérêt de ce résultat, Camille TAILLE émet la réserve du caractère invasif de la fibroscopie bronchique, qui n’est pas réalisée de manière systématique chez les asthmatiques sévères. Ce geste lui semble trop invasif dans le seul but de prédire la réponse aux biothérapies et il doit être réservé aux sujets qui n’ont pas d’éosinophile sanguine, pour ne pas les classer non T2 à tort. Elle ajoute que la fibroscopie bronchique n’est pas un examen sans danger pour les asthmatiques sévères. De plus, au cours de cette étude, les lames de cytologie ont été lues par, pas moins, de onze anatomo-pathologistes, tant le résultat est « lecteur-dépendant ». En effet, les anatomo-pathologistes ont peu l’habitude de compter les éosinophiles dans les prélèvements de muqueuse bronchique. Ainsi, lorsqu’un patient asthmatique sévère nécessite une fibroscopie, il faut en profiter pour faire des biopsies et sensibiliser les anatomo-pathologistes à l’évaluation des marqueurs cytologiques.
En conclusion, la biopsie bronchique n’est pas encore un examen de routine pour prédire la réponse aux biothérapies des asthmatiques sévères car elle n’est pas sans danger et elle nécessite de sensibiliser les anatomo-pathologistes à la lecture des marqueurs cytologiques. Il faut simplement en profiter lorsque la fibroscopie doit être réalisée dans un autre but.