Pneumologie
Prendre en compte le déclin cognitif dans les maladies respiratoires
Le profil PRISm à la spirométrie est associé au risque de développer une démence, notamment parce qu’une proportion important des patients ayant ce profil va évoluer vers un trouble ventilatoire obstructif, lui-même facteur de risque important de développement de troubles cognitifs. D’après un entretien avec Alain BERNADY.
Une étude dont les résultats sont parus en octobre 2024, dans l’American Journal of Respiratory Critical Care Medicine, a cherché à préciser l’association qui existe entre une spirométrie anormale et le risque de démence. Il s’agit d’une étude chinoise, réalisée par des neurologues. Les auteurs sont partis du postulat que la BPCO augmente le risque de démence et ont déterminé un profil PRISm de patients, qui seraient potentiellement à risque de développer une démence. Ce profil correspond à un VEMS inférieur à 80% et un rapport VEMS/CF supérieur à 70%, à la spirométrie. Cette étude de cohorte a sélectionné plus de 500 000 patients, issue de l UK Bio Bank qui ont été suivis pendant 5 ans, entre 2006 et 2010 . Tous les sujets inclus ont bénéficié d’une spirométrie et le critère principal était l’évaluation de la prévalence des démences vasculaires ou d’Alzheimer, dont les diagnostics reposaient sur la définition internationale. Au total, plus de 350 000 sujets ont été analysés, dont 53% de femmes, avec un âge moyen de 56 ans. Les patients ayant le profil PRISm ou un TVO ont été suivis pendant 12 ans en moyenne.
Le profil PRISm est à risque de TVO et donc de démence
Le docteur Alain BERNADY, pneumologue au Centre Médical Toki Eder, à Cambo les Bains, rappelle que la démence est l’une des causes principales de la perte d’autonomie chez les sujets âgés et qu’il est important de la dépister au plus tôt. Il relève que les résultats de cette étude ont montré que 11% des sujets inclus avaient le profil PRISm et plus de 55 000 sujets étaient atteints d’un trouble ventilatoire obstructif. Au total, 4300 patients ont développé une démence : 1,5% des patients ayant le profil PRISm ont présenté des troubles cognitifs, versus 2% des patients ayant un trouble ventilatoire obstructif et 1% des patients ayant une spirométrie normale. Le risque de développer une démence apparait donc significativement plus important en cas de trouble ventilatoire obstructif ou de spirométrie anormale. Ces résultats ont été confortés par la réalisation d’une IRM pour évaluer le volume de la substance grise. Alain BERNADY souligne que 50% des patients étiquetés PRISm vont développer un trouble ventilatoire obstructif dans les 5 ans qui suivent et constituent donc une population à risque de démence ,qu’il faut surveiller de près.
De l’importance de définir le rôle des autres facteurs de risque de démence
Alain BERNADY précise que ce travail de qualité présente cependant quelques limites, notamment sur l’exclusivité du phénotype caucasien des patients inclus dans l’étude. Les critères internationaux de démence ne sont pas forcément adaptés à ces patients. D’autre part, il relève que les auteurs ont réalisé une spirométrie initiale seulement, sans spirométrie de contrôle qui pourrai déterminer la trajectoire respiratoire des patients. Alain BENADY regrette également l’absence de précision sur les autres facteurs de risque de la population étudiée comme le tabagisme, les expositions professionnelles, la présence d’asthme, les comorbidités, cardiovasculaires notamment, les syndromes dépressifs, les syndromes d’apnée du sommeil ou encore la dénutrition qui est in facteur de risque majeur de déclin cognitif.
En conclusion, ce travail doit amener les médecins à s’intéresser au déclin cognitif, qui est source de difficultés à atteindre les objectifs thérapeutiques. ll faut être capable d’intégrer le déclin cognitif dans les maladies chroniques et notamment respiratoires, pour mettre en place des thérapeutiques adaptées.