Pneumologie

Point de vue sur la corticothérapie systémique en cure courte dans les pathologies bronchiques chroniques.

Dans l’asthme ou la BPCO, le recours aux corticoïdes systémiques peut être nécessaire, mais il doit toujours être réfléchi car jamais anodin. Une attention particulière doit être portée aux doses cumulées qui, à partir d’un certain seuil, entraînent des effets secondaires potentiellement graves.  D’après un entretien avec Lucile REGARD.

  • 12 Déc 2024
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    Une revue narrative de la littérature, publiée en octobre 2024 dans la Revue des Maladies Respiratoires, a fait le point sur la place de la corticothérapie orale en cures courtes dans le traitement des exacerbations des bronchopathies chroniques telles que l’asthme et la BPCO. Cet article rappelle les recommandations françaises et internationales tout en soulignant leurs limites : des données majoritairement issues d’études hospitalières, plus difficilement transposables à la médecine de ville, et une approche standardisée ignorant l’hétérogénéité phénotypique des patients. En France, une corticothérapie orale (0,5 à 1 mg/kg/j, maximum 60 mg/j pendant 5 à 7 jours) est recommandée en première intention dans les exacerbations d’asthme, mais constitue un traitement de deuxième ligne dans celles de la BPCO (30 à 40 mg/j pendant 5 jours). La répétition de ces cures peut engendrer des effets secondaires précoces ou aggraver les comorbidités, d’où l’importance d’évaluer la dose seuil et d’intégrer des biomarqueurs prédictifs de réponses aux corticoïdes, notamment dans la BPCO.

     

    Corticostéroïdes oraux dans l'asthme : entre efficacité et toxicité, des pratiques à repenser

    Le docteur Lucile REGARD, pneumologue à l’Hôpital Cochin à Paris et auteure de ce travail, explique que l’utilisation des corticostéroïdes oraux, bien qu’essentielle pour traiter les exacerbations sévères de l’asthme, suscite des préoccupations croissantes en raison de leur toxicité. En effet, une dose cumulée annuelle de 500 mg représente déjà un seuil critique associé à des effets secondaires significatifs, notamment des troubles métaboliques, cardiovasculaires et infectieux, même chez les jeunes adultes. De plus, malgré l’existence de recommandations claires, la surprescription, le mésusage et l’automédication restent fréquents. Le phénotypage inflammatoire, en distinguant les mécanismes T2 des autres voies inflammatoires, pourrait guider des approches plus ciblées, tout comme l’utilisation de l’indice de toxicité des glucocorticoïdes (GTI, un outil permettant d’évaluer de manière standardisée la toxicité individuelle de ces traitements), qui pourrait devenir un outil précieux pour identifier les patients à haut risque de complications. Réduire la posologie des cures courtes, optimiser les traitements inhalés et renforcer l’éducation thérapeutique sont également des axes d’amélioration à suivre pour optimiser la prise en charge de ces patients.

     

    Corticoïdes oraux dans la BPCO : prédire le bénéfice pour minimiser les risques ?

    Lucile Regard rappelle que les corticoïdes oraux sont fréquemment prescrits pour dans les exacerbations aiguës de BPCO, alors que leur bénéfice semble se limiter à la réduction des hospitalisations et à une amélioration temporaire de la fonction respiratoire, sans effet démontré sur la mortalité ou la prévention des récidives. De plus, les données sur leur efficacité en médecine ambulatoire, où ces traitements sont largement utilisés, restent encore plus limitées alors même qu’ils s’accompagnent d’effets indésirables tels que l’hyperglycémie et la myopathie, qui sont particulièrement préoccupants chez des patients fragiles. L’éosinophilie sanguine, biomarqueur associé à l’inflammation T2, pourrait guider la prescription des corticoïdes, certaines études suggérant qu’un seuil > 2 % ou 300/mm³ permettrait de limiter leur utilisation tout en maintenant leur efficacité. Cette approche, bien qu’encourageante, nécessite cependant d’être validée scientifiquement pour s’imposer dans la pratique clinique. D’autres biomarqueurs comme le NO exhalé, font également l’objet de recherches pour mieux cibler les traitements et réduire l’exposition aux corticoïdes dans une population où les risques sont particulièrement élevés.

     

    En conclusion, si les corticoïdes oraux restent le plus souvent essentiels pour le traitement des exacerbations d’asthme, leur utilisation doit s’inscrire dans une approche personnalisée, en particulier dans la BPCO. Celle-ci devrait être guidée par des biomarqueurs, le phénotype des exacerbations et une évaluation rigoureuse de l’exposition cumulée, afin d’en optimiser les bénéfices tout en minimisant les risques d’effets indésirables.

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