Dès 20 mois

Les bébés savent quand ils ne savent pas

Contrairement à ce qui était communément admis, les bébés peuvent exprimer deux niveaux de pensée, d’après des chercheurs français.

  • Par Jonathan Herchkovitch
  • Philippe Put / Flickr
  • 08 Mar 2016
  • A A

    Tous les parents ont un jour vu leur bébé se retourner vers eux avec cette expression un peu perturbante qui semble signifier : « Mais qu’est-ce que vous me voulez ? ». D’après des recherches du CNRS et de l’ENS, la signification de cette attitude serait plus profonde. Elle pourrait être l’expression de l’incertitude. 

    Jusqu’à présent, les scientifiques pensaient qu’avant six ou sept ans, les enfants n’étaient pas capables de métacognition, c’est-à-dire d’avoir conscience de leurs propres pensées. Les résultats de l’équipe française, publiés dans PNAS, semblent prouver le contraire. Ils seraient non seulement capables d’être conscients de leur propre incertitude, mais aussi de l’exprimer d’une manière ou d’une autre, et cela même s’ils ne peuvent pas parler.

    « La métacognition est importante dans les processus d’apprentissage, explique à Pourquoidocteur Louise Goupil, post-doctorante au laboratoire de sciences cognitives et de psycholinguisique (CNRS et ENS), responsable de l’étude. C’est l’un des gros indicateurs de la réussite scolaire ».

    Ecoutez...
    Louise Goupil, du laboratoire de sciences cognitives et de psycholinguisique.

    Demander pour éviter les erreurs

    Pour vérifier leur hypothèse, les chercheurs ont mis en place une expérience simple. Quatre-vingt bébés de 20 mois participaient à un jeu, au cours duquel un jouet était dissimulé sous l’une des deux boîtes devant lui. Pendant quelques secondes, ces boîtes étaient cachées derrière un rideau. Enfin, l’expérimentateur levait le rideau et demandait à l’enfant de pointer l’endroit où il pensait que le jouet était caché.

    Lorsqu’il avait un doute, il arrivait qu’il se retourne vers un parent, présent pendant l’expérience. « Ils demandent de l’aide pour éviter de faire des erreurs et contourner les choix difficiles, expliquent les auteurs de l’étude. La littérature scientifique existante qui traite du sujet chez d’autres espèces animales tend à montrer que ces évitements adaptatifs sont une marque de métacognition. »

    Des philosophes dans l'âme

    « Notre étude révèle que les enfants ont la capacité d’évaluer leur propre incertitude, et qu’ils peuvent la partager avec leur parent, continuent les scientifiques. Ces résultats ne prouvent pas seulement qu’il peuvent former ces représentations métacognitives, mais qu’ils peuvent aussi y accéder de manière consciente. »

    En d’autres termes, même à 20 mois, ils savent qu’ils ne savent pas, et savent faire savoir qu’ils savent qu’ils ne savent pas. C’est tout de suite plus clair.

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