"Confirmatory data procedure"

Pesticides : le médiateur européen dénonce des autorisations illégales

Le médiateur européen a épinglé la Commission européenne sur une procédure utilisée pour autoriser des pesticides sans information sur leur toxicité.

  • Par Marion Guérin
  • Tim Scrivener / Rex Fea/REX/SIPA
  • 22 Fév 2016
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    L’autorisation de mise sur le marché de pesticides par la Direction de la Santé (DG Santé) de la Commission européenne se déroule selon des procédures illégales. Tel est le constat sans appel du médiateur de l’Union Européenne, qui publie ce lundi des conclusions détonantes.

    Dossiers incomplets

    Le médiateur européen avait été saisi en 2012 par le réseau d’ONG PAN Europe, qui s’alarmait du recours à la « procédure de données de confirmation » dans l’autorisation de pesticides à Bruxelles.

    Cette procédure permet à des pesticides d’être approuvés, même en l’absence de données relatives à leur sécurité au moment de l’instruction du dossier par les Etats membres.

    Avec cette procédure, « des pesticides pouvaient être approuvés avec de graves lacunes au niveau des données et des risques élevés, en permettant à l’industrie de ne soumettre des informations supplémentaires que plus tard, dans l’avenir », précise dans un communiqué Générations Futures, branche française de PAN Europe.

    Un recours systématique

    Après avoir enquêté sur cette pratique, le médiateur européen rend une décision lapidaire. Alors que le recours à la CDP (confirmatory data procedure) devrait être exceptionnel, la Commission s’est prononcée à plusieurs reprises sur l’approbation de pesticides, « alors qu’elle manquait d’informations pour être en mesure de prendre des décisions éclairées sur la non-toxicité de la substance approuvée », peut-on lire.

    Pire : dans plusieurs dossiers d’homologation, l’EFSA (l’Autorité de sécurité alimentaire) – peu réputée pour être un ayatollah du principe de précaution – a calculé la présence d’un risqué élevé, identifié dans la littérature scientifique. Malgré cela, la DG Santé aurait approuvé les pesticides par le biais de cette procédure. Il est « difficile de comprendre comment la Commission pouvait légitimement décider que ces substances n’ont aucun effet nocif », s’interroge le médiateur.

    Une telle pratique suggère un recours systématique à cette procédure, ce qui enfreindrait directement la législation européenne. Pour le médiateur, il s’agit au mieux d’un cas de « mauvaise administration », au pire d’un stratagème d’une douteuse honnêteté.

    Un risque sanitaire « inquiétant »

    En pratique, les risques sont les mêmes pour les populations exposées à ces pesticides dont on ne connaît finalement pas grand-chose. Le médiateur s’alarme des conséquences possibles de ces autorisations sur « la santé des humains, des animaux et sur l’environnement », qui pourrait s’avérer « particulièrement inquiétantes ».

    Le rapport pointe d’autres lacunes dans le respect des conditions de mise sur le marché des pesticides, comme une absence d’exigences de protection de l’environnement et d’évaluation des mesures de protection déployées.

    Le médiateur conclut que la Commission peut se révéler parfois « trop légère dans ses pratiques » et qu’elle « pourrait ne pas suffisamment prendre en compte le principe de précaution ». Une formule élégante qui ne dissimule pas le ton préoccupé de ses conclusions. Le médiateur réclame ainsi la fin de cette pratique et la remise d’un rapport de la Commission d’ici deux ans, pour prouver l’effectivité des changements mis en œuvre.

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