Rhumatologie
Pseudo-polyarthrite rhizomélique : les anti-interleukine-6 changent la donne
Chez les patients souffrant d'une rechute de pseudo-polyarthrite rhizomélique (PPR) au cours de la baisse de leur corticothérapie, un anticorps anti-IL6R et une stratégie de réduction apporte une rémission persistante plus fréquente et une réduction de la dose cumulative de corticoïdes.
- Shidlovski/istock
Les patients souffrant de pseudo-polyarthrite rhizomélique (PPR) et ayant une rechute lors de la réduction progressive habituelle de la corticothérapie ou ayant des effets indésirables liés aux corticoïdes ont des options thérapeutiques limitées.
Dans l'étude SAPHYR (Sarilumab in Patients with Polymyalgia Rheumatica), publiée dans le New England Journal of Medicine, un anticorps anti-IL6R, le sarilumab, et une nouvelle stratégie démontrent une efficacité significative sur les taux de rémission persistante et la réduction de la dose cumulative de corticoïdes. À la semaine 52, une rémission prolongée est observée chez 28% des patients dans le groupe sarilumab et chez 10% dans le groupe placebo (différence, 18 points de pourcentage (IC à 95%, 4 à 32 ; p=0,02). La dose cumulative médiane de corticoïdes est significativement plus faible dans le groupe sarilumab que dans le groupe placebo (777 mg vs 2044 mg ; p<0,001).
Les effets indésirables les plus fréquents avec le sarilumab par rapport au placebo ont été une neutropénie (15 % vs. 0 %), des arthralgies (15 % vs. 5 %) et une diarrhée (12 % vs. 2 %). Les arrêts de traitement ont été plus nombreux dans le groupe sarilumab que dans le groupe placebo (12 % contre 7 %).
Un sevrage difficile en corticoïdes
La pseudo-polyarthrite rhizomélique est une maladie inflammatoire de cause inconnue qui touche les personnes âgées de plus de 50 ans et se caractérise par des douleurs et une raideur matinales touchant principalement les ceintures (épaules et hanches), avec un impact significatif sur la qualité de vie et un risque d’évolution vers une maladie de Horton.
Bien que des doses modérées de corticoïdes (15 à 20 mg de prednisone) permettent de rapidement contrôler la maladie, plus de la moitié des patients ne parvient pas à réduire progressivement sa dose de corticoïdes. La corticothérapie prolongée qui en résulte est associé à des effets iatrogènes importants. Les traitements susceptibles de réduire le besoin en corticoïdes et les risques liés à leur utilisation prolongée ont peu de données probantes. L’European Alliance of Associations for Rheumatology et l'American College of Rheumatology recommandent de manière conditionnelle l'utilisation du méthotrexate chez certains patients souffrant de PPR sans que son bénéfice ait été clairement démontré.
L’avancée confirmée des anti-IL6
Depuis la publication de ces recommandations, une avancée majeure des connaissances physiopathologiques a ouvert de nouveaux horizons thérapeutiques dans la PPR, dont le blocage de la voie de l'interleukine-6. L'efficacité de ce mode d'action a été démontrée pour le tocilizumab dans des essais randomisés et contrôlés portant sur des patients souffrant de pseudo-polyarthrite rhumatismale débutante (PMR-SPARE) et dans un essai plus large portant sur des patients sous corticoïdes (SEMAPHORE).
L'interleukine-6 est impliquée dans la pathophysiologie de la pseudo-polyarthrite rhizomélique car des taux circulants élevés de l'interleukine-6 et une expression tissulaire accrue ont été identifiés chez les patients atteints de cette maladie. Plusieurs études ont suggéré que le blocage de l'interleukine-6 pourrait être cliniquement pertinent dans le traitement de la pseudo-polyarthrite rhizomélique.
Un essai pragmatique de stratégie
Selon un éditorial associé, les auteurs de cette étude renforcent les preuves de l'efficacité des anti-IL6 dans la PPR et ouvrent de nouvelles perspectives sur une stratégie de prise en charge avec une corticothérapie raccourcie. En effet, plutôt que d'effectuer une simple comparaison entre le médicament actif et le placebo, ils ont comparé un régime standard de réduction progressive des corticoïdes sur une période de 52 semaines dans le groupe placebo avec une réduction progressive des corticoïdes raccourcie à 14 semaines dans le groupe sarilumab.
Dans cet essai, un traitement de rattrapage par les corticoïdes était possible dans les deux groupes : les patients qui ont commencé un traitement de rattrapage à n'importe quel moment après les 12 semaines initiales ont été considérés comme n'ayant pas eu de réponse. Cette conception pragmatique de l’essai permet aux chercheurs d'évaluer le standard de traitement actuel par rapport à un anti-IL6R administré en même temps qu'une diminution plus rapide de la corticothérapie.
Quand introduire les anti-IL6 ?
Avec les résultats des essais précédents, ces résultats représentent un affermissement de l'approche stratégique de la prise en charge de la pseudo-polyarthrite rhizomélique selon le principe « treat to target » (traiter à l'objectif), au-delà même de la définition de la rémission.
Cependant, la prise en charge future de la pseudo-polyarthrite rhizomélique continue de soulever quelques questions stratégiques. Par exemple, on ne sait toujours s’il faut choisir une approche en « Step-down » (c'est-à-dire l'instauration du sarilumab ou du tocilizumab d’emblée avec une réduction rapide des corticoïdes et une réduction ultérieure de l'inhibiteur du récepteur de l'interleukine-6) ou une approche « en Step-up » (c'est-à-dire l'ajout de l'inhibiteur du récepteur de l'interleukine-6 seulement après que le traitement par les corticoïdes s'est révélé insuffisant comme dans cette étude).
La meilleure stratégie dépendra de la persistance de la rémission prolongée, des effets secondaires liés aux corticoïdes et du coût des traitements.