Rhumatologie
Polyarthrite rhumatoïde : une bactérie intestinale pourrait être impliquée
Des auto-anticorps IgA et IgG clonaux chez des personnes à risque de polyarthrite rhumatoïde identifient une souche arthritogène de Subdoligranulum, une bactérie qui pourrait participer au déclenchement de la maladie sur un terrain favorisant.
- ArtemisDiana/istocks
L'hypothèse des origines muqueuses de la polyarthrite rhumatoïde (PR) propose un rôle central pour les réponses immunitaires muqueuses dans l'initiation ou la perpétuation de l'auto-immunité systémique qui survient avec la maladie. Cependant, le lien entre la muqueuse et l'auto-immunité systémique dans la PR reste flou.
Des auto-anticorps peuvent être détectés chez les personnes à risque de développer une polyarthrite rhumatoïde (PR), avant même le développement de la maladie clinique. Cependant, la source de ces auto-anticorps n'est toujours pas claire.
Une équipe de chercheurs de l'université du Colorado a examiné ces anticorps et si l'un d'entre eux appartient à une classe d'anticorps normalement en circulation, l'autre est un anticorps qui est habituellement associé à une réaction muqueuse, qu'il s'agisse de la muqueuse buccale, de la muqueuse intestinale ou de la muqueuse respiratoire. Les chercheurs ont pris ces anticorps et les ont mélangés aux matières fécales des personnes à risque de PR pour trouver éventuellement les bactéries correspondant à ces anticorps.
Des auto-anticorps associés à une souche bactérienne du genre Subdoligranulum
Dans un article publié dans la revue Science Translational Medicine, les chercheurs ont constaté que les auto-anticorps IgG et IgA des personnes à risque de PR réagissent de manière croisée contre des bactéries intestinales des familles Lachnospiraceae et Ruminococcaceae. Une analyse plus poussée a permis d'identifier une souche bactérienne du genre Subdoligranulum qui était associée au développement d'auto-anticorps.
Pour vérifier leur hypothèse, les chercheurs ont utilisé des modèles animaux pour accueillir les bactéries nouvellement découvertes. Les souris colonisées par cet isolat de Subdoligranulum ont développé une arthrite dont la pathologie est similaire à celle de la PR chez l’homme. Ces expériences montrent que, non seulement la bactérie a provoqué dans les modèles animaux le développement des marqueurs sanguins que l'on retrouve chez les personnes à risque pour la PR, mais que certains animaux ont également développé une véritable polyarthrite rhumatoïde.
Subdoligranulum, un contributeur majeur des auto-anticorps de la PR
Ces résultats suggèrent que cette souche Subdoligranulum pourrait être un contributeur majeur au développement d'auto-anticorps d’origine muqueuse de la PR. Si cette espèce unique de bactérie est effectivement impliquée dans l'origine de la réponse immunitaire qui conduit à la PR chez les personnes à risque, il pourrait être possible de cibler la bactérie avec des médicaments pour empêcher cette réponse de se produire.
L’équipe de chercheurs veut désormais identifier, dans des populations plus importantes de personnes à risque de PR, si ces bactéries sont en corrélation avec d'autres réponses immunitaires génétiques, environnementales et muqueuses, et finalement avec le développement de la PR. Si tel est le cas, il sera possible de dire que cette bactérie est un marqueur utile pour aider à prédire qui développera une PR et appliquer des stratégies de prévention. Cela permettrait aussi de comprendre comment cette bactérie déclenche ces réponses immunitaires et permettre éventuellement de bloquer la capacité de la bactérie à le faire.
Beaucoup de nouvelles technologies émergent et pourraient cibler sélectivement une bactérie dans le microbiome intestinal, par exemple, pour l'empêcher d'avoir des effets immunogènes sur l'hôte. Pendant longtemps, des études ont essayé les antibiotiques contre la PR, mais plutôt qu’un effet dévastateur d'un antibiotique sur l’ensemble du microbiote il serait désormais possible de cibler sélectivement Subdoligranulum ou ses effets.