Rhumatologie
Lupus : cibler le récepteur BDCA2 des cellules dendritiques plasmacytoïdes
Un anticorps anti-BDCA2 spécifique donne de bons résultats dans une phase 2 sur le lupus, via le blocage précoce de l’interféron de type 1, sans complications majeures. Il reste à confirmer en phase 3 mais cela ressemble à une nouvelle cible thérapeutique.
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Dans le lupus érythémateux disséminé (LED), l'anticorps monoclonal anti-BDCA2, litifilimab, entraîne des améliorations plus importantes des manifestations articulaires et cutanées que le placebo, dans un essai multicentrique randomisé de phase 2. Le bénéfice est obtenu via la fixation de l’anticorps humanisé sur le récepteur BDCA2 des cellules dendritiques plasmacytoïdes et le blocage de la production d’interféron de type I.
Par rapport au placebo, le litifilimab 450 mg est associé à une réduction d'environ trois articulations par rapport au nombre moyen d'articulations gonflées et douloureuses (qui était de plus de 19), sur 24 semaines. L’étude LILAC est publiée dans le New England Journal of Medicine pour sa partie articulaire et l’a été précédemment pour sa partie cutanée.
Cette étude de phase 2 qui, nécessite d’être confirmée en phase 3, car nombre de résultats positis en phase 2 ont été négatifs en phase 3 dans le lupus, confirme l’intérêt de cibler l'interféron de type 1 et le système immunitaire inné dans le LED.
Réduction des arthrites et des lésions cutanées
L'analyse articulaire de l'étude LILAC sur le LED actif, a porté sur 102 patients atteints de LED, d'arthrite avec une maladie cutanée active. Les patients ont reçu 450 mg de litifilimab ou un placebo, administré par voie sous-cutanée, aux semaines 0, 2, 4, 8, 12, 16 et 20. Les patients devaient avoir au moins quatre articulations douloureuses et au moins quatre articulations gonflées d'arthrite lupique.
Le nombre moyen d'articulations actives au départ était de 19 ± 8,4 dans le groupe litifilimab et de 21,6 ± 8,5 dans le groupe placebo. Entre le début de l'étude et la semaine 24, la variation moyenne des moindres carrés du nombre total d'articulations actives est de -15,0 ± 1,2 dans le groupe litifilimab et de -11,6 ± 1,3 dans le groupe placebo (différence moyenne de -3,4 ; IC à 95%, -6,7 à -0,2 ; p = 0,04).
Dans l’analyse de LILAC sur les scores cutanés, parue précédemment, le traitement par litifilimab est supérieur au placebo en ce qui concerne une mesure de l'activité de la maladie cutanée à travers différents scores et sur une période de 16 semaines.
Amélioration de l’indice SRI-4
L’analyse de la plupart des critères d'évaluation secondaires n'a pas confirmé les résultats de l'analyse primaire. Cependant, une amélioration a été observée dans le SLE Responder Index (SRI-4), un indice global à trois composantes, utilisé dans l'essai de phase 3 du belimumab, qui capte l'amélioration de l'activité de la maladie, sans une aggravation de la maladie globale ou nouvelle activité significative de la maladie dans d'autres domaines.
Au total, 56% des patients du groupe litifilimab ont eu des réponses sur l'indice SRI-4 à la semaine 24, contre 29% dans le groupe placebo (différence moyenne des moindres carrés, 26,4% ; IC à 95%, 9,5 - 43,2). Des infections herpétiques ont été rapportées chez les patients ayant reçu du litifilimab, mais les taux n'ont pas augmenté par rapport au placebo.
Cible l’interféron de type I
Les interférons de type I (et en particulier l’interféron 1 alpha) jouent un rôle important dans la pathogenèse du LED. Bien que les cellules dendritiques plasmacytoïdes, productrices d'interférons de type I (ainsi que d'autres cytokines et de chimiokines), constituent une petite proportion des leucocytes du sang périphérique, elles s'accumulent dans les lésions cutanées et les organes des patients atteints de LED. Le récepteur de surface antigène 2 des cellules dendritiques sanguines (BDCA2), un régulateur négatif de la production d'interférons de type I, est par ailleurs retrouvé uniquement sur les cellules dendritiques plasmacytoïdes.
Le litiflimab cible l'antigène 2 des cellules dendritiques sanguines (BDCA2) spécifiquement et bloque la production d'interféron de type 1 par les cellules dendritiques plasmacytoïdes, sans interférer avec les cellules B et T. Cette étude de phase 2 est donc en faveur de l’intérêt du blocage BDCA2 et de l’interféron de type 1 dans le lupus érythémateux disséminé. Sous réserve que ces résultats soient confirmés dans une étude de phase 3 sur un plus grand nombre de malades et une plus longue durée, cela constitue une nouvelle cible bienvenue dans le traitement d’une maladie qui est très hétérogène et nécessite probablement des approches thérapeutiques différentes en fonction des malades.
Compte tenu de la fréquence des infections de type zona, la vaccination doit être envisagée chez tous les malades susceptible de bénéficier de ce traitement ou de l’anifrolumab, un antirécepteur de l’interféron de type 1 validé dans le lupus érythémateux disséminé avec atteinte viscérale.