Pédiatrie
Rotavirus : la vaccination de nouveau recommandée en France
Introduite dans le calendrier vaccinal en 2013 et suspendue 2 ans après, la vaccination contre les infections à rotavirus chez le nourrisson est de nouveau recommandée par la Haute Autorité de Santé.
- NataliaDeriabina/istock
Les rotavirus sont les principaux responsables des gastro-entérites virales hivernales chez les moins de 5 ans. Ils sont responsables chaque hiver de 57 000 consultations en médecine générale, 28 000 passages aux urgences et de 20 000 hospitalisations en lien le plus souvent avec une déshydratation sévère, principale complication de l'infection. Les nourrissons de moins d’un an sont les plus vulnérables.
Déjà introduite dans le calendrier vaccinal en 2013, la vaccination contre les rotavirus avait été suspendue deux ans plus tard en raison de la survenue d'effets indésirables graves (invaginations intestinales aiguës). Après une réévaluation des deux vaccins disponibles et la prise en compte des dernières données d'efficacité et de tolérance, la HAS recommande de nouveau la vaccination des nourrissons.
La France rejoint ainsi les 127 pays au monde qui la pratique déjà et se met en accord avec des recommandations internationales, notamment de l'Organisation Mondiale de la Santé et de l'Académie européenne de pédiatrie. Qu'en est-il des risques ? et quel schéma vaccin pour quelle population cible ?
Pour contrer le surrisque d'invagination intestinale aiguë, la HAS mise sur la sensibilisation des parents
Deux vaccins, les mêmes qu'en 2013, ont l'autorisation de mise sur le marché (AMM) : Rotarix et RotaTeq. Pour aboutir à cette nouvelle recommandation vaccinale, la HAS a analysé les données disponibles de leur efficacité en vie réelle, et « confirme la très bonne efficacité de ces deux vaccins […] pour prévenir ces infections, mais aussi les formes graves de gastro-entérites ». Ainsi les hospitalisations dues aux gastro-entérites liées au rotavirus sont fortement réduites, les études montrant que dans les pays pour lesquels la couverture vaccinale est supérieure à 80%, la réduction du nombre d'hospitalisations se situe entre 65 à 84%.
Concernant le point sensible de la sécurité, la HAS revient sur le surrisque d'invagination intestinale aiguë (IIA) et la présence de matériel génétique de circovirus porcin dans le vaccin qui avait conduit à la suspension de la vaccination généralisée en avril 2015. A cette date, 47 cas d'IIA chez des nourrissons récemment vaccinés avaient été signalés depuis l'obtention de l'AMM des vaccins (2006-2007). Deux des nourrissons concernés étaient décédés, « en grande partie liée à une prise en charge tardive » souligne la HAS dans son nouvel argumentaire.
Le surrisque d'IIA reste une réalité précise toutefois la HAS. Il est estimé à 6 pour 100 000 enfants vaccinés dans les 7 jours suivants la vaccination. C'est pourquoi l'autorité sanitaire recommande une information systématique aux parents sur ce risque notamment sur la sensibilisation aux signes cliniques évocateurs : pleurs inhabituels, refus de s'alimenter ou boire, vomissements, pâleur, hypotonie, présence de sang dans les selles. Concernant la présence de matériel génétique porcin, le risque lui n'est plus avéré puisque l'absence de conséquence sur la santé humaine a été démontré.
Une vaccination recommandée chez tous les nourrissons âgés de 6 semaines à 6 mois
La vaccination est recommandée chez tous les nourrissons âgés de 6 semaines à 6 mois. Le schéma dépend du vaccin utilisé : deux doses à 2 et 3 mois avec Rotarix et trois doses à 2, 3 et 4 mois avec RotaTeq. Le schéma complet doit être réalisé avec le même vaccin. Les vaccins administrés par voie orale peuvent être administrés avec les autres vaccins du calendrier vaccinal du nourrisson.
La HAS insiste sur l'importance de « respecter de manière stricte le calendrier vaccinal afin de pouvoir compléter le schéma vaccinal avant l'âge limite du nourrisson (6 mois pour Rotarix, 8 mois pour Rotateq) ». La vaccination n'est pas obligatoire, la HAS estimant qu'il est « prématuré » de l'envisager. Elle en réévaluera la pertinence en fonction des premières données de couverture vaccinale.
Les généralistes pourraient être plutôt réticents à cette vaccination
Les résultats d'une enquête datant de 2018 via le réseau Infovac avait montré qu'une grande majorité des pédiatres (77%) étaient favorables à la levée de la suspension de la recommandation de vaccination contre les infections à rotavirus, ce qui n'était pas le cas des médecins généralistes dont plus des deux tiers étaient réticents.
Partant de ce constat, la HAS recommande la mise en place d'actions spécifiques de sensibilisation auprès des médecins généralistes. Aucune étude n’a documenté l’acceptabilité de cette vaccination par les parents en France. Il est fort à parier que le chemin sera long avant d'obtenir une large couverture vaccinale.