Médecine générale
Réfugiés ukrainiens : quelles priorités sanitaires à leur accueil en France ?
Parmi toute la logistique d'accueil des réfugiés ukrainiens, la prise en charge sanitaire est un enjeu majeur. Rattrapage des vaccinations, dépistage des troubles psychiques et des pathologies infectieuses, font partie des priorités données par le Haut Conseil de Santé Publique dans un avis dédié.
- Sviatlana Lazarenka/istock
Alors que le gouvernement se fixe l'objectif de pouvoir accueillir 100 000 réfugiés ukrainiens, 30 000 seraient déjà arrivés en France. La question de leur prise en charge sanitaire est un enjeu majeur en termes de santé individuelle et publique. Pour guider les professionnels, le HCSP (Haut Conseil de Santé Publique) publie une actualisation de son avis de 2015 relatif à la visite médicale des étrangers primo arrivants, adapté à la situation sanitaire des Ukrainiens.
La promiscuité dans un contexte de déplacement massif de population, la forte prévalence en Ukraine de certaines maladies contagieuses (hépatite C, VIH et tuberculose multirésistante) et la trop faible couverture vaccinale pour de nombreuses maladies infectieuses telles que le Covid-19, la rougeole ou la poliomyélite, ont guidé le HCSP pour prioriser des actions pour la prévention du risque infectieux.
On sait par exemple que l'Ukraine a déclaré le deuxième plus grand nombre de cas de tuberculose en Europe en 2019 dont quasi un tiers des nouveaux cas sont multi-résistants. Au-delà des pathologies infectieuses, la priorité est aussi donnée au repérage et la prise en charge des conséquences psychologiques du conflit.
LA priorité : assurer les soins urgents dès le premier accueil
Dès le premier accueil des réfugiés, pratiquer les soins d'urgence est évidemment une des priorités données par le HCSP. Cela comprend l'évaluation de signes d'une maladie infectieuse transmissible (toux, fièvre et/ou diarrhée en particulier), évaluer les besoins immédiats notamment pour de potentiels troubles psychiques (état de stress post-traumatique, risque suicidaire...), prévenir les risques de rupture médicamenteuse tels que les antidiabétiques ou anticoagulants.
L'instauration rapide d'un suivi pour les femmes enceintes et l'accès aux couches et au lait infantile pour les nourrissons, constituent également des priorités. Les nourrissons devront recevoir une prise en charge immédiate en PMI avec un focus particulier sur la tuberculose notamment en termes de prévention vaccinale.
Ensuite : vaccination, radiographie pulmonaire et rendez-vous santé des 4 mois
Dans un second temps, le rattrapage vaccinal notamment DTP, ROR et Covid-19 à réaliser le plus tôt possible et dans un délai optimal de 4 mois sera un enjeu majeur. Pour accompagner les professionnels de santé, le HCSP recommande de fournir aux professionnels de santé une traduction des calendriers vaccinaux et carnets de vaccination ukrainiens. Pour le dépistage de la tuberculose, une radiographie pulmonaire systématique pour tous est recommandée. Le HCSP porte une vigilance également sur les signes précoces de décompensation de troubles psychiques dus au contexte ou à l'arrêt d'un traitement médicamenteux.
Enfin un « rendez-vous santé » doit être organisé dans les 4 mois après l'entrée sur le territoire comme c'est le cas pour tout primo-arrivant sur le sol français. Au cours de ce rendez-vous, des informations spécifiques sont délivrées sur le système de santé français tels que l'accès aux soins universel, les modalités de prise en charge des soins, les dépistages des cancers ou encore des éléments concernant la santé et la protection des enfants en France. Enfants qui doivent d'ailleurs avoir une priorité d'accès aux soins pour leur entrée à l'école, même si le précise le HCSP « les dépistages et rendez-vous santé ne constituent pas un préalable à l'entrée à l'école » qui doit être effective dès leur arrivée sur le territoire.
Un nouveau défi pour le système de santé français
La prise en charge sanitaire d'un nombre si élevé de réfugiés aux multiples risques, constitue un véritable défi pour le système de santé français. Il faudra déjà passer la barrière de la langue, puis la réussite sera guidée par une bonne coordination des différents accompagnements médico-sociaux.
La traçabilité du suivi sera primordiale pour le rendre optimal et la numérisation des données pourra permettre de l'assurer.