Infectiologie
Variant indien : la vaccination casse le lien entre diffusion du virus et hospitalisations
L’efficacité de la vaccination à 2 doses est confirmée dans une nouvelle étude française sur le variant indien et casserait le lien entre la diffusion du variant Delta et les hospitalisations. Cette étude est cohérente avec les données d’hospitalisations en Grande-Bretagne et en Israël.
- Oleksii Liskonih/istock
Le variant SARS-CoV-2 B.1.617, ou « variant Delta » (ou « variant indien »), a été identifiée à l’automne 2020 en Inde et est depuis devenue largement prédominante dans ce pays et au Royaume-Uni. Le variant Delta s'est depuis propagé dans de nombreux pays, et bien sûr en France, où il va devenir le variant prédominant ce week-end, d’après un interview du Ministre de la Santé sur France Inter.
Ce variant serait environ 60% plus contagieux que le variant Alpha, lui-même plus contagieux que le variant original, et à l’origine de la vague épidémique en Grande-Bretagne à l’automne et dans le reste de l'Europe au début de l'année 2021. Le variant indien serait ainsi deux fois plus contagieux que le coronavirus original.
Une nouvelle étude française, publiée dans Nature, confirme que le variant Delta serait moins sensible aux anticorps développés après une infection ou une vaccination à une dose. Cette étude confirme ainsi des études antérieures suggérant que le variant Delta pouvait en partie échapper au système immunitaire, bien que dans une moindre mesure que le variant Beta, apparu pour la première fois en Afrique du Sud.
Une analyse fonction des zones ciblées sur la protéine Spike
La lignée du variant indien comprend trois sous-types principaux (B1.617.1, B.1.617.2 et B.1.617.3), abritant diverses mutations de la protéine Spike dans le domaine N-terminal (NTD) et le domaine du récepteur d’attachement (RBD). Ce sont ces mutations qui pourraient augmenter le potentiel d'évasion immunitaire des variants.
Les chercheurs français ont testé la capacité des anticorps produits par une infection naturelle et à la suite d’une ou 2 doses des différents vaccins à neutraliser les variants Alpha, Beta et Delta, par rapport à un variant de référence similaire à la version originale du virus.
Moindre sensibilité aux anticorps naturels et vaccinaux
Les chercheurs ont d’abord examiné des échantillons de sang provenant de 103 personnes qui avaient été auparavant infectées par les autres variants du coronavirus. Dans cette analyse, le variant Delta (indien) est beaucoup moins sensible que le variant Alpha (anglais) aux échantillons de sang provenant de ces personnes convalescentes et non vaccinées. Une dose de vaccin a considérablement augmenté la sensibilité du variant, ce qui suggère que les personnes qui se sont remises de la Covid-19 doivent effectivement être vaccinées avec une dose pour se défendre contre certains variants.
L'équipe a ensuite analysé les échantillons de 59 personnes après qu'elles aient reçu une première dose ou 2 doses des vaccins AstraZeneca ou Pfizer-BioNTech. Après une seule dose, seulement 10% des échantillons de sang ont pu neutraliser les variants Delta (indien) et Beta (sud-africain) en éprouvette. Mais la deuxième dose a fait passer ce chiffre à 95%.
Il n'y avait pas de différence majeure dans les niveaux d'anticorps obtenus par les deux vaccins mais avec des titres 3 à 5 fois moins efficients contre le variant Delta (indien) que contre le variant Alpha (anglais). Ainsi, la propagation du variant Delta (indien) est bien associée à un échappement, au moins partiel, aux anticorps ciblant les épitopes non RBD et RBD Spike.
Moindre sensibilité aux anticorps monoclonaux
Les chercheurs ont également isolé une souche Delta infectieuse chez un voyageur revenant d'Inde et ont examiné sa sensibilité aux anticorps monoclonaux qui sont utilisés en traitement lors de la Covid-19. Ils ont également testé ce variant par rapport aux anticorps présents dans les sérums de convalescents Covid-19, et par comparaison avec d'autres souches.
Le variant Delta serait ainsi plus résistant à la neutralisation par certains anticorps monoclonaux anti-NTD et anti-RBD, dont le Bamlanivimab, ceux-ci se liant difficilement à sa protéine Spike. Les sérums de patients convalescents prélevés jusqu'à 12 mois après les symptômes étaient 4 fois moins puissants contre le variant Delta (indien), par rapport au variant Alpha (anglais).
Cohérence avec les données de vraie vie
Les données de vraie vie provenant d'Israël et de Grande-Bretagne, les pays les plus avancés sur la vaccination, corroborent largement ces résultats. De façon rassurante, elles suggèrent qu'une seule dose de vaccin serait néanmoins suffisante pour prévenir les hospitalisations ou les décès dus au SARS-CoV-2.
L’augmentation du nombre de contamination, observée en Israël chez les personnes vaccinées, serait majoritairement le fait de personnes asymptomatiques, simplement porteuses du virus. La majorité de ces personnes seraient sur-diagnostiquées du fait de la politique très active de test et de traçage autour des malades dans ce pays.
En effet, les hospitalisations ne remontent pas en Israël et elles réaugmentent très lentement en Grande-Bretagne, essentiellement chez les personnes non-vaccinées. La vaccination casserait donc le lien entre diffusion du variant indien et hospitalisations, éventuellement dès la première dose et, a fortiori, après 2 doses, selon le gouvernement britannique.
Discussions sur la 3ème dose
Beaucoup de discussions actuelles portent sur la nécessité d’une 3ème dose chez les personnes les plus vulnérables, dont 30% environ ne développeraient pas une réponse immunitaire suffisante.
Cette 3ème dose ne serait cependant pas nécessaire chez les personnes vaccinées et en bonne santé selon la FDA et les CDC américains, même si, dans le même temps, Pfizer et BioNTech ont demandé une AMM en ce sens.
La priorité en France reste donc l’accélération de la vaccination de ceux qui ne sont pas vaccinés, surtout s’ils ont plus de 50 ans… et y compris à la plage s’il le faut.