Rhumatologie
Maladie de Dupuytren modérée : l’injection de collagénase presque équivalente à la chirurgie
Une étude randomisée révèle que l'injection de collagénase ne serait pas non inférieure à la fasciectomie chirurgicale limitée dans le traitement des formes modérées de la maladie de Dupuytren. Ces résultats ont des implications importantes pour la séquence thérapeutique de cette maladie chronique, la maladie de Dupuytren récidivant fréquemment.
- Zarina Lukash/istock
La maladie de Dupuytren est une affection fibroproliférative de la main caractérisée par la formation de cordons fibreux qui se rétractent et entraînent une flexion progressive des doigts. Cette maladie fibrosante altérant la fonction des mains, peut impacter la qualité de vie des patients.
Les traitements couramment utilisés incluent la fasciectomie chirurgicale limitée, qui vise à retirer les tissus affectés. Le problème est que la récidive est fréquente et qu’une chirurgie itérative devient de plus en plus compliquée. L'injection de collagénase de Clostridium histolyticum, qui est une enzyme altérant le cordon fibreux, peut permettre son étirement et peut constituer une alternative ou une première étape dans une séquence thérapeutique prolongée. En France, il existe également les fasciectomie à l’aiguille dans ces formes modérées.
Une étude multicentrique randomisée et contrôlée, dont les résultats sont publiés dans le New England Journal of Medicine, a comparé ces deux approches chez des patients atteints d’une forme modérée (au moins 30 degrés de flexion) de la maladie de Dupuytren. Les résultats montrent que l'injection de collagénase n’est pas statistiquement non inférieure à la fasciectomie limitée en termes d'amélioration de la santé de la main rapportée par les patients un an après le traitement, même si la chirurgie offre de meilleurs résultats fonctionnels à long terme.
Une large étude sur les formes modérées de la maladie de Dupuytren
Dans cette étude, 672 patients ont été répartis en deux groupes égaux : l'un recevant l'injection de collagénase et l'autre ayant une fasciectomie chirurgicale limitée.
Un an après le traitement, le score moyen sur l'échelle Patient Evaluation Measure–Hand Health Profile (PEM) est de 17,8 dans le groupe collagénase (284 patients avec des données disponibles) et de 11,9 dans le groupe fasciectomie chirurgicale (250 patients avec des données disponibles), avec une différence estimée de 5,9 points (IC à 95 % : 3,1 à 8,8). À deux ans, la différence estimée est de 7,2 points (IC à 95 % : 4,2 à 10,9), en faveur d’une amélioration plus durable avec la chirurgie.
Les complications modérées ou sévères sont moins fréquentes dans le groupe collagénase (1,8 %) que dans le groupe fasciectomie (5,1 %). Cependant, la récidive de la rétraction tendineuse nécessitant une réintervention est significativement plus élevée dans le groupe collagénase (14,6 %) comparé au groupe chirurgie (3,4 %).
Une large étude randomisée multicentrique
Les données proviennent d'un essai contrôlé randomisé multicentrique non aveugle, avec une assez bonne robustesse méthodologique à l'étude. L'absence d'aveugle pourrait toutefois avoir influencé les réponses des patients aux questionnaires d'auto-évaluation. De plus, des facteurs externes tels que la pandémie de Covid-19 ont perturbé le suivi de certains patients, avec environ 31 % ne pouvant pas compléter les deux ans de suivi prévus.
La population étudiée étant majoritairement composée de patients caucasiens, la généralisation des résultats à d'autres groupes ethniques pourrait être limitée. Ces résultats suggèrent que, bien que l'injection de collagénase présente l'avantage d'une récupération initiale plus rapide avec moins de complications, qui sont d’autre part modérées ou sévères, la fasciectomie chirurgicale limitée offre de meilleurs résultats fonctionnels à 2 ans avec moins de récidives.
Des recherches supplémentaires sont nécessaires pour évaluer le rapport coût-efficacité des deux traitements et pour explorer les préférences des patients en fonction de leurs priorités, telles que la rapidité de récupération ou le risque de complications. Il sera intéressant de voir si les injections de collagénase pourraient constituer une étape intermédiaire permettant de retarder une fasciectomie chirurgicale, dans la stratégie de traitement sur le long terme de cette maladie récidivante.