Neurologie

Sclérose en plaques : importance du PIRA comme marqueur pronostique

Une aggravation chronique du handicap, en dehors des suites d’une poussée de sclérose en plaque, peut correspondre à une PIRA ou « Progression Independent of Relapse Activity ». La valeur pronostique de ce concept impose de développer de nouveaux outils pour le diagnostiquer en pratique clinique.

  • Pornpak Khunatorn/istock
  • 26 Jun 2023
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    Ces derniers mois, le concept de « Smoldering multiple sclerosis » a émergé et semble occuper une place de plus en plus grande dans la communauté scientifique spécialisée1. Si cette expression ne possède pas de véritable traduction consensuelle en Français, elle réfère à l’existence d’un processus inflammatoire insidieux et silencieux, restreint au système nerveux central, qui favoriserait à long terme la survenue d’un processus neurodégénératif à l’origine du passage en forme progressive de la maladie.

    Il reste cependant difficile d’identifier et de quantifier l’existence d’un tel processus dans la pratique quotidienne. En imagerie, le corolaire de cette activité chronique pourrait être décelée à l’aide de techniques IRM avancées non effectuées en routine (détection de lésions grandissantes, de lésions avec anneaux paramagnétiques). Sur le plan clinique, une des pistes pour identifier cette maladie chronique serait de détecter des fluctuations minimes du score EDSS, à distance d’une poussée, chez un patient considéré en forme rémittente et ne déclarant pas d’aggravation de son état neurologique.

    Ce concept a été dénommé PIRA (Progression Independent of Relapse Activity) en opposition au RAW (Relapse Associated Worsening) qui matérialise une aggravation du handicap dans les suites immédiates d’une poussée. Il reste cependant à confirmer dans la pratique l’utilité du PIRA pour prédire le pronostic, et d’émettre une définition précise et consensuelle de ce concept.

    La survenue précoce d’un PIRA, facteur de mauvais pronostic ?

    Un travail récent de l’équipe Barcelonnaise2 s’est intéressée à la valeur pronostique du PIRA sur une cohorte de patients atteints de sclérose en plaques, au stade du premier évènement démyélinisant. 1128 patients ont été inclus, avec une durée moyenne de suivi de 10 ans.

    24.5% des patients de la cohorte avaient présenté un PIRA durant le suivi. Le PIRA était ici défini par une augmentation du score EDSS score de 1.5, 1.0, ou 0.5 point si le score de base était respectivement à 0, entre 1.0 et 5.0, ou supérieur à 5.0. Cette aggravation devait survenir à distance d’une poussée et était confirmé sur deux évaluations cliniques successives. Les patients ayant présenté un PIRA étaient en moyenne plus âgés, avec une charge lésionnelle radiologiques plus élevés.

    Vers de nouveaux outils de définition du PIRA

    Sur le plan pronostique, l’analyse multivariée a confirmé que la présence d’un PIRA était associée avec une augmentation significative du risque de présenter un handicap sévère au cours du suivi (Hazard ratio 4.11, p=0.001 pour l’estimation du risque d’atteindre le score EDSS 6). De plus, les patients chez qui le PIRA survenait durant les 5 premières années de maladie avaient un pronostic plus sévère comparativement à ceux qui développaient un PIRA plus tardif. Sur le plan radiologique, en revanche, les données d’IRM conventionnelle semblaient peu contributives. Ainsi, la présence ou non d’une activité inflammatoire focale (nouvelles lésions T2, lésions rehaussées par le gadolinium) en association au PIRA n’avait pas d’impact pronostique additionnel.

    Cette étude est donc un argument supplémentaire pour penser que nos marqueurs conventionnels et la définition phénotypique de la sclérose en plaques pourraient être révisés à la lumière de nos connaissances actuelles. Reste à définir de manière consensuelle les outils les plus pertinents pour suivre les patients de la manière la plus précise possible à l’échelle individuelle.

     

    Références

    1. Giovannoni G, Popescu V, Wuerfel J, et al. Smouldering multiple sclerosis: the ‘real MS.’ Ther Adv Neurol Diso 2022; 15: 17562864211066752.
    2. Tur C, Carbonell-Mirabent P, Cobo-Calvo Á, et al. Association of Early Progression Independent of Relapse Activity With Long-term Disability After a First Demyelinating Event in Multiple Sclerosis. Jama Neurol; 80. Epub ahead of print 2023. DOI: 10.1001/jamaneurol.2022.4655.

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