Chirurgie esthétique
Chirurgie intime : "On ne parle pas de confort, mais de vie quotidienne, de dignité"
Lors d’une conférence organisée par la Société Française des Chirurgiens Esthétiques Plasticiens, le Dr Flore Delaunay, chirurgien esthétique à Rennes, a levé le voile sur un pan encore méconnu de la médecine féminine : la chirurgie intime à visée thérapeutique.

- Par Youssra Khoummam
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- Lidiiamoor/istock
Le Dr Delaunay est catégorique : ses interventions ne relèvent pas de l’esthétique, mais du soin. "Une vulve jolie ? Je ne sais pas ce que c’est. Ce que je vois, ce sont des femmes empêchées dans leur quotidien". La nymphoplastie, par exemple, permet de réduire des petites lèvres trop proéminentes qui causent douleurs et gênes à vélo, en sport ou dans les vêtements. Parfois, des grandes lèvres atrophiées ne remplissent plus leur rôle protecteur : une greffe de graisse ou une injection d’acide hyaluronique peut restaurer la morphologie naturelle.
Les cas ne sont pas rares, bien au contraire. Puberté perturbée, hormones, environnement, grossesse : les causes sont multiples, mal identifiées, et leurs conséquences sous-estimées. "Ces femmes sont soulagées après l’intervention. Et souvent, on ne les revoit plus : leur problème est réglé".
Traumatismes, sécheresse, incontinence : des souffrances trop longtemps normalisées
Autre cheval de bataille du Dr Delaunay : les douleurs post-accouchement. Épisiotomies, déchirures périnéales, cicatrices douloureuses ou rapports impossibles… autant de blessures que l’on banalise. Pourtant, des solutions existent : acide hyaluronique, graisse ou encore la photobiomodulation. "Les femmes vivent avec la douleur, pensant que c’est normal. Ça ne l’est pas. Des solutions existent, les femmes doivent le savoir".
La sécheresse vaginale aussi est souvent réduite à la ménopause. Or, elle touche également des jeunes femmes après chimiothérapie, hormonothérapie ou même sans cause apparente. Radiofréquence, laser doux, graisse ou acide hyaluronique offrent des traitements efficaces, souvent non invasifs.
Même constat pour l’incontinence urinaire d’effort : « On leur dit d’attendre que ce soit plus grave pour être opérées. Mais entre-temps, elles vivent l’humiliation, changent de sous-vêtements en cachette. Il existe pourtant des traitements légers : rééducation, fauteuils d’électrostimulation, ultrasons. »
Et si on parlait (vraiment) de chirurgie intime ?
Grâce aux avancées en chirurgie régénérative et en médecine esthétique, de nombreuses pathologies autrefois sans solution peuvent désormais être prises en charge : nymphoplastie pour réduire les petites lèvres proéminentes, injections de graisse ou d’acide hyaluronique pour restaurer le volume des grandes lèvres, traitement des cicatrices d’épisiotomie, des déchirures périnéales ou des fissures anales.
D'autres techniques innovantes, comme le PRP, le nanofat ou la photobiomodulation, permettent d’améliorer le confort dans les cas de lichen scléroatrophique, de sécheresse vaginale ou d’infections chroniques. La radiofréquence, combinée à la rééducation périnéale, offre également de bons résultats dans les cas de relâchement, d’incontinence ou de prolapsus.
Enfin, la toxine botulique représente une avancée majeure dans le traitement du vaginisme. Ces solutions, souvent peu connues, restent encore peu accessibles en raison du tabou persistant autour de l’intime.
Tabous, silence et solitude : « Le vrai problème, c’est la communication »
La plus grande difficulté n’est pas médicale, selon le Dr Delaunay : c’est de faire passer l’information. "On ne peut pas montrer de photos. On ne peut pas faire de vidéos. Il ne reste que la parole, et souvent les patientes n’osent pas". Résultat : des femmes souffrent en silence, persuadées qu’il n’y a pas de solution à leur douleur, leur gêne ou leur gêne intime.
Même dans des cas aussi complexes que le vaginisme – ces contractions involontaires qui rendent les rapports impossibles – un protocole innovant existe : injection de toxine botulique, accompagnement ciblé, et des résultats souvent spectaculaires. "C’est un changement de vie pour ces femmes. Mais elles ne savent pas que ça existe".
La médecine réparatrice intime n’est ni une mode, ni un luxe. C’est une réponse concrète à des douleurs physiques et psychiques. "On ne parle pas de confort mais de vie quotidienne, de sexualité, de dignité", conclut le Dr Delaunay. Et surtout d’un droit fondamental : ne plus souffrir en silence.