Etat des lieux de la politique vaccinale
Rapport Hurel : l'obligation de la vaccination en question
L’ancienne députée Sandrine Hurel remet ce mardi à la ministre de la Santé son rapport sur la politique vaccinale française, dans un contexte polémique.
L’heure du bilan a sonné pour la politique vaccinale. Avec six mois de retard, l’ancienne députée Sandrine Hurel remet ce 12 janvier son rapport sur la vaccination en France. Ce texte très attendu devrait se positionner sur la levée de l’obligation vaccinale dans le pays, et sur les manières d’améliorer l’adhésion de la population face à ce geste.
La remise du rapport Hurel survient dans un contexte crispé autour de la vaccination. Ce 7 janvier, le tribunal correctionnel d’Auxerre (Yonne) a condamné les époux Larère à deux mois de prison avec sursis, actant leur « refus de se soumettre à l’obligation vaccinale », en l’occurrence le DT-Polio. Ils avaient auparavant saisi le Conseil Constitutionnel. Celui-ci a conclu qu’en « imposant ces obligations de vaccination, le législateur a entendu lutter contre trois maladies très graves et contagieuses ou insusceptibles d’être éradiquées ».
Un dispositif « complexe » et « illisible »
Les Sages ont donc donné raison au Code de la Santé publique. Mais ce dossier résume bien les tensions autour de la vaccination, auxquelles Sandrine Hurel doit répondre. Car les époux Larères – comme d’autres parents poursuivis pour refus de vaccination avec le DT-Polio – s’estiment dans leur bon droit : le vaccin à trois valences (diphtérie, polio, tétanos) n’est plus disponible en pharmacie. Les seuls produits actuellement accessibles contiennent, en plus du DT-Polio, d'autres souches recommandées comme la coqueluche, l'hépatite B... Les parents estiment donc qu'ils ne sont pas obligatoires.
C’est justement ce flou encadrant la politique vaccinale qui pose problème en France, comme l’a souligné en septembre 2014 le Haut Conseil de la Santé Publique (HCSP). Entre vaccins obligatoires et recommandés, les patients se perdent souvent. La moitié d’entre eux croient ainsi que les seconds sont moins importants. « Le dispositif public de vaccination actuel est complexe, illisible et inégalitaire », conclut cet avis.
Un débat public
Dans ce rapport, le HCSP suggère deux évolutions. Soit l’obligation est maintenue, et la liste des maladies à vaccination obligatoire doit être révisée – probablement en y ajoutant le ROR (Rougeole, Oreillons, Rubéole). Soit elle est levée car la distinction obligatoire/recommandé est actée comme un facteur de confusion. C’est notamment le souhait des ligues anti-vaccinales. Dans les deux cas, les vaccins devraient être rendus gratuits, via une prise en charge intégrale par l’Assurance maladie.
Mais cet avis n’est pas forcément celui du grand public. C’est pourquoi, après que Sandrine Hurel lui aura remis son rapport, la ministre de la Santé Marisol Touraine compte lancer un débat public. Cette décision s’inscrit dans le cadre du « programme d’amélioration de la politique vaccinale », engagé dès 2012 et qui court jusqu’en 2017. La remise de ce rapport – et ses retombées – devrait en être l'apogée.
Une couverture vaccinale en baisse
Sandrine Hurel est chargée d’une mission censée réconcilier les Français avec la vaccination. Le divorce est consommé dans certains cas, comme le confirment les données de l’Institut de Veille Sanitaire (InVS) – notamment tirées de l’échantillon généraliste des bénéficiaires de l’Assurance maladie.
Plusieurs vaccins s’approchent des objectifs de la loi de santé publique – qui vise 95 % de couverture vaccinale afin d’obtenir une immunité collective. C’est le cas du DT-Polio, le seul obligatoire, dont 91 % des enfants de 24 mois ont reçu toutes les doses. Même bilan positif sur la vaccination contre la coqueluche (91 %), l’Haemophilus influenzae de type B (89 %) et les infections invasives à pneumocoques (89 %).
La couverture est bien moins satisfaisante concernant les vaccins plus polémiques. Les enfants sont relativement bien protégés contre l’hépatite B (78 %) mais les plus âgés conservent des statistiques insuffisantes. Le gouvernement peine aussi à convaincre des bienfaits de la vaccination contre la grippe saisonnière. Alors qu’il fixe l’objectif de 75 % de personnes fragiles immunisées, seules 46 % en ont fait la démarche lors de la saison 2014-2015.
Quant au vaccin contre les papillomavirus humains (HPV)– recommandés en prévention des lésions génitales précancéreuses du col de l’utérus, de la vulve et du vagin – le bilan est encore plus sombre : 23 % des jeunes filles ont reçu les trois doses. D’après les données les plus récentes, mais incomplètes, seules 18 % d’entre elles ont reçu une dose.