Grossesse

Comment des chercheurs espèrent traiter l'infertilité avec de faux embryons

Des chercheurs ont mis au point des blastoïdes, c’est-à-dire des modèles d’embryons créés en laboratoire. Grâce à ceux-ci ils pourront, à terme, mieux comprendre le phénomène d’implantation et donc les raisons de l’infertilité. Explications.

  • Par Diane Cacciarella
  • Vladimir Zotov/istock
  • 06 Déc 2021
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    En France, environ 10% des couples restent infertiles après deux ans de tentative, selon l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm). De plus, 25% des cas d’infertilité sont inexpliqués. Une équipe de recherche de l’Institut de biologie moléculaire de l’Académie des sciences de Vienne mène justement des travaux pour lutter contre ces problèmes. Nous avons créé des alternatives éthiques et techniques à l’embryon humain qui permettent de comprendre les premières étapes de l’embryogenèse en laboratoire, et de développer des médicaments pour traiter les problèmes d’infertilité”, explique Nicolas Rivron, auteur principal de l’étude qui vient d’être publiée dans la revue NatureL'embryogenèse est la période qui démarre juste après la fécondation et va jusqu'à la naissance.

    Des blastoïdes pour mieux comprendre l'implantation embryonnaire

    Lors de leurs travaux, l’équipe a travaillé sur des modèles d’embryons en laboratoire - qu’ils ont appelés blastoïdes - crées à partir de cellules souches chez la souris. Ils les ont ensuite implanté dans des utérus de souris pour étudier le procédé d’implantation embryonnaire. Comme cette expérience s'est avérée concluante, ils ont mis au point un modèle de blastoïde humain. Chez l’Homme, les embryons humains naturellement formés sont les blastocytes, à différencier de ceux modélisés en laboratoire, les blastoïdes.

    "75% de ces embryons qui ne réussissent pas à s’implanter dans l’endomètre"

    Le but de leur démarche était de pouvoir étudier le phénomène d’implantation de l’embryon qui est un moment crucial. “Nous savons que 50% des fertilisations ne donnent pas de bébé, c’est-à-dire qu’elles se transforment en fausses couches, estime le chercheur. Et parmi ces 50%, il y a 75% de ces embryons qui ne réussissent pas à s’implanter dans l’endomètre” Hors, en France les chercheurs ne peuvent pas directement travailler sur les embryons et leurs nidation dans l’utérus.

    Les blastoïdes agissent comme les blastocytes

    Grâce aux blastoïdes, les chercheurs vont pouvoir travailler sur l’implantation et peut-être, à terme, mieux comprendre d’où vient l’infertilité. D’après eux, leur modèle de blastoïdes agit comme un blastocyte : ils sont capables de s’attacher aux cellules de l’endomètre sur un côté et de créer des cellules qui leur permettent d’interagir avec celles de l’endomètre. “Pour être prédictifs, ces modèles d’embryons doivent être bien faits, développe Nicolas Rivron. Nous avons beaucoup œuvré pour nous assurer que les cellules formées ressemblent véritablement aux cellules du blastocyte humain. Une fois qu’on sait qu’on a formé les bonnes cellules pour notre blastoïde, on peut modéliser l’implantation en laboratoire, en combinant des blastoïdes humains avec des cellules d’endomètre humain.” L’endomètre est la muqueuse de l'utérus qui accueille l’embryon lors de la nidation et où il restera ensuite pendant toute la fécondation. Néanmoins, pour qu’il n’y ait pas de dérive, un cadre éthique de la recherche sur les blastoïdes a été crée, en partenariat avec la Société internationale pour la recherche sur les cellules souches. Il stipule  l’interdiction de transférer ces blastoïdes humains dans un utérus humain ou animal.

    À terme, l’objectif des chercheurs est donc de mieux comprendre l’infertilité mais aussi d’envisager de mettre au point de nouveaux modes de contraception. “Si l’implantation de l’embryon est empêchée, il ne peut y avoir de grossesse”, conclut Nicolas Rivron, qui tempêre tout de même l’espoir suscité par ses travaux : “Il faut encore compter une dizaine d’années de travail pour développer ce type de médicaments”.

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