Neurologie

Les émotions dites "mixtes" sont-elles réelles ?

Pour la première fois, une étude montre que les émotions mixtes suscitent une activité neuronale unique dans l'amygdale et le noyau accumbens du cerveau.

  • Par Chloé Savellon
  • Feodora Chiosea/iStock
  • 17 Jun 2024
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    On parle d’émotions dites "mixtes" lorsque l’on a simultanément des sentiments positifs et négatifs. Cette expérience est courante. Pourtant, elle a été peu étudiée scientifiquement pour plusieurs raisons. On pense souvent que les émotions n'existent que sur un spectre allant du négatif au positif et qu'il est plus facile d'étudier un sentiment à la fois. "Il est difficile d'évoquer ces émotions complexes de manière réaliste en laboratoire", a déclaré Jonas Kaplan, professeur agrégé de psychologie à l’université du Sud de la Californie (États-Unis).

    27 personnes ont regardé un court-métrage pendant un scanner cérébral

    Dans une récente étude, le chercheur américain et son équipe ont ainsi voulu savoir si les émotions mixtes résultent d'une activité unique du cerveau ou si, dans ce cas, on bascule simplement entre des sentiments positifs et négatifs. Pour en avoir le cœur net, ils ont eu recours à des approches analytiques axées sur les états déclarés par 27 adultes. Pendant que les participants regardaient un court-métrage d'animation, les neuroscientifiques ont surveillé leur activité cérébrale à l'aide d'un appareil d'imagerie par résonance magnétique (IRM). Ils ont choisi un modèle en particulier pour sa capacité à évoquer simultanément des sentiments heureux et tristes. Après le premier visionnage, les volontaires ont revu la vidéo sans IRM et ont indiqué quand ils avaient ressenti des émotions positives, négatives ou mixtes. Les chercheurs ont ensuite comparé ces rapports avec les résultats de l'imagerie IRM.

    "Une émotion mélangée" qui résulte d’une activité neuronale unique

    "Nous avons constaté que diverses régions du cerveau pouvaient prédire l'apparition de nouveaux états émotionnels, tels qu'ils sont déterminés par l'auto-évaluation", peut-on lire dans les travaux. Les résultats, publiés dans la revue Cerebral Cortex, ont révélé que les cerveaux présentaient une activité neuronale distincte dans l'amygdale et le noyau accumbens lorsque les personnes éprouvaient des émotions, telles que la douceur-amère. "Il ne s'agit pas d'un ping-pong entre le négatif et le positif. Il s'agit d'une émotion unique, mélangée sur une longue période", a expliqué Anthony Vaccaro, auteur principal de l'étude. Cette activité neuronale, qui "restait stable dans le temps", était différente de celle observée lorsqu'un volontaire faisait état d'une émotion uniquement positive ou négative.

    Les auteurs ont également pu prédire quand une personne allait changer d'émotion. Certaines régions du cerveau, comme le cortex insulaire, présentaient des changements significatifs lorsque les participants faisaient état d'une transition émotionnelle. Dans de prochaines recherches, les chercheurs examineront comment les réactions émotionnelles fluctuent en groupe, par exemple en regardant un film ensemble dans une salle de cinéma.

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