Santé mentale
La maltraitance durant l’enfance génère des difficultés émotionnelles à l’âge adulte
Une étude américaine a observé un lien entre la maltraitance infantile et l'alexithymie, un trouble de la régulation émotionnelle.
"Pas de mots pour les sentiments". Il s’agit de la signification de l’alexithymie, un trouble de la régulation émotionnelle, qui se caractérise par des difficultés à identifier et à décrire ses émotions. Ce phénomène peut impacter les relations sociales et intimes, car une personne atteinte d’alexithymie est susceptible de manquer les signaux sociaux, et donc ne pas comprendre les sentiments des autres.
Trois types de maltraitance impliqués dans le développement de l’alexithymie
Dans une récente étude publiée dans le Psychosocial Bulletin, une équipe de l’université de Stanford (États-Unis) a observé un lien entre la maltraitance infantile et le développement de l’alexithymie à l’âge adulte.
Pour parvenir à cette conclusion, les scientifiques ont analysé 78 sources publiées évoquant des faits de maltraitance infligés à des enfants et mesurant les niveaux d’alexithymie à l’âge adulte. Près de 36.141 participants ont été inclus dans l’étude américaine.
Au cours de leurs travaux, les chercheurs ont constaté que la négligence émotionnelle, la violence psychologique et la négligence physique étaient des facteurs de risque particulièrement forts de l’alexithymie. Deux autres types de maltraitance, l’abus sexuel et l'abus physique, étaient liés à l'alexithymie, mais elles avaient une valeur prédictive moins forte.
Alexithymie : une forte association avec des troubles psychologiques
D’après les auteurs de l’étude, des niveaux élevés d'alexithymie sont associés à des troubles psychologiques tels que la dépression et la schizophrénie. "Il est de plus en plus clair que l'alexithymie et la maltraitance des enfants sont des facteurs de risque transdiagnostiques, ce qui signifie que leur présence accroît le risque de développer un large éventail de troubles mentaux. Cependant, ce qui n'est pas encore clair, c'est la manière dont ces deux facteurs de risque sont liés l'un à l'autre et la raison pour laquelle ils coexistent souvent", a expliqué le Professeur James Gross, psychologue et directeur du Laboratoire de psychophysiologie de l’université de Stanford.
Dans leurs travaux, les chercheurs ont alerté sur la nécessité d’améliorer les interventions thérapeutiques destinées aux adultes touchés par l’alexithymie. Le traitement consiste souvent à les aider à développer leur capacité à être en contact avec leurs émotions, à les comprendre et à les expliquer de manière incarnée. "Avant de pouvoir réguler ses émotions, il faut d'abord les comprendre et les reconnaître", a cependant souligné Anat Talmon, coauteur principal de l’étude et chercheur postdoctoral à l'université de Stanford.