Soins, liens familiaux, activités...
Prison : les femmes victimes de discrimination
Les femmes, minoritaires parmi la population carcérale, subissent de nombreuses discriminations par rapport aux hommes, selon un rapport.
Être femme en prison, c’est expérimenter la discrimination quotidienne - et ce, dans l’indifférence générale, puisque le sort des détenus suscite rarement un élan national de compassion. Et pourtant, c’est un rapport accablant qu’a rendu ce jeudi la Contrôleure des lieux de privation de liberté (CGLPL), Adeline Hazan, après sa visite dans les prisons françaises.
3 % des détenus en France
Dans ces lieux, les femmes sont largement minoritaires - elles ne représentent que 3,2 % du total des détenus dans l'Hexagone, 5 à 6 % de la population des centres de détention, 6 % des mineurs des centres éducatifs fermés et 38,21 % des patients admis en établissement de santé mentale, précise le rapport.
Minoritaires, donc, à l’image de leurs droits. « Il serait loisible de penser que ce faible nombre de femmes privées de liberté faciliterait la prise en charge et permettrait un strict respect des droits fondamentaux. Force est de constater que dans la réalité il n’en est rien et que les femmes ne bénéficient pas des mêmes droits que les hommes privés de liberté », condamne Adeline Hazan, qui décrit un système pénitentiaire inadapté à cette population.
Rupture des liens familiaux
Premier constat : les femmes se trouvent bien plus souvent éloignées de leurs proches, du fait d’une inégale répartition géographique des centres de détention. Sur les 188 établissements pénitentiaires que compte la France, seuls 56 accueillent des femmes, majoritairement implantés dans le nord de la France. Deux prisons sont exclusivement féminines (Rennes et Fleury-Mérogis).
Ce maillage territorial déséquilibré empêche un maintien du lien familial, un droit pourtant fondamental du prisonnier – et l’une des conditions favorisant sa réhabilitation. « Cette situation alimente aussi la surpopulation des quartiers des femmes », dénonce encore Adeline Hazan. Enfin, faute de places, mineures et majeures se retrouvent souvent mélangées, alors que la loi impose de les loger dans des unités à part.
Accès aux soins entravé
La Contrôleure s’alarme également des inégalités sanitaires observées en milieu pénitentiaire. Ainsi, alors que les infrastructures sont essentiellement conçues pour les hommes, l’accès à des soins spécifiquement féminins – notamment gynécologiques - pose problème.
Cet accès « est extrêmement variable d’un établissement à l’autre », pointe le rapport. Alors que « dans un établissement du sud de la France pouvant héberger une quarantaine de femmes, un gynécologue est présent chaque jour, dans un établissement de l’ouest de la France hébergeant le même nombre de femmes, le gynécologue n’est présent qu’une fois par mois ».
Les détenues ne se voient pas toujours proposer des produits d’hygiène spécifiques. Enfin, en raison de la proximité avec les hommes, l'accès aux zones d'hygiène leur est souvent restreint.
Les hommes d’abord
Par ailleurs, les détenues se trouvent régulièrement privées des activités proposées en prison, du fait de l’interdiction de mélanger hommes et femmes. Ces derniers ne doivent se croiser sous aucun prétexte, « même brièvement, à l’occasion d’un mouvement pour se rendre d’un lieu à un autre », précise le rapport.
Or, les hommes étant majoritaires, « cette interdiction contraint singulièrement l’accès des femmes aux équipements communs : unité sanitaire, zone socioculturelle, terrain de sport, bibliothèque, etc. Leurs mouvements doivent en effet s’intercaler entre ceux, plus fréquents, des hommes détenus ».
Autoriser la mixité des mouvements
La Contrôleure appelle ainsi à autoriser la mixité des mouvements en établissements pénitentiaires. « Cette modification permettrait de favoriser un égal accès des personnes détenues aux zones communes de la détention, qu’il s’agisse de s’y instruire, d’y travailler ou d’y être soignées ». Une modification de la réglementation induirait la mise en place d’une « surveillance encadrée », afin de garantir « l’intégrité physique des personnes détenues (hommes et femmes détenus) lors de ces mouvements ».