Pneumologie

Troubles respiratoires du sommeil : une prévalence plus importante chez les déficients intellectuels

Les troubles respiratoires du sommeil en cas de déficience intellectuelle sont plus fréquents mais moins diagnostiqués.  Cette population vulnérable est souvent négligée alors que le bénéfice à tirer de leur diagnostic et de leur prise en charge est plus grand qu’en population générale, avec des différences d’observance significatives. D’après un entretien avec Raphaël BRIAND.

  • 03 Oct 2024
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    Une étude dont les résultats sont parus en août 2024, dans Thorax, a fait le point sur le diagnostic et la prise en charge des troubles du sommeil dans les populations déficientes intellectuelles. Il s’agit d’une revue narrative de la littérature, réalisée par des auteurs qui ont déjà beaucoup publié sur les troubles du sommeil. Ils ont eu l’idée originale de s’intéresser à une population pour laquelle la prévalence des troubles du sommeil est plus importante car souvent liés à des pathologies spécifiques, comme des malformations faciales par exemple. Les auteurs ont donc réalisé un état des lieux des troubles du  sommeil dans cette population en réalisant une revue quasi systématique des articles en langue anglaise, sur le sujet, ce qui peut constituer un « bémol », puisque certains papiers intéressants, publiés dans d’autres langues, n’ont pas été inclus.

     

     

    Une approche ciblée sur le syndrome de Down

     

    Le docteur Raphaël BRIAND, pneumologue à l’Institut Cœur Poumon du Centre Hospitalier Universitaire de Lille, souligne que ce travail réalise une approche très ciblée sur le syndrome de Down, qui représente l’un des déficits intellectuels les plus fréquents. Il relève des pistes de recommandations intéressantes fournies par ces résultats notamment sur les tests diagnostiques adaptés utilisés chez les jeunes trisomiques 21, en raison de la difficulté de tolérance de la polysomnographie chez ces sujets, qui  présentent des troubles du contact et se montrent fréquemment opposants aux examens. Toutefois, les études sur les méthodes alternatives de diagnostic des troubles du sommeil ont une méthodologie moins solide qu’un essai randomisé contrôlé, ce qui ne les rend pas totalement fiables. De plus, ces sujets présentent souvent des comorbidités et pour déterminer comment traiter les troubles du sommeil, la polysomnographie est nécessaire. Raphaël BRIAND explique qu’il faudrait s’intéresser à d’autres types de déficits intellectuels que ceux liés au syndrome de Down, et qu’il est difficile de généraliser les résultats. En effet, la trisomie 21 provoque une macroglossie qui interfère dans les troubles du sommeil et qui peut parfois faire l’objet d’un traitement chirurgical, ce qui n’est pas le cas chez tous les déficients intellectuels. Enfin les résultats de l’étude ont montré que les sujets atteints du syndrome de Down étaient plus observants avec la PPC  que la population générale, après avoir été appariés avec l’âge et le sexe, à 6 mois et à un an. L’observance est moins grande chez les déficients intellectuels sans syndrome de Down, ce qui constitue un biais de sélection. Pour Raphaël BRIAND, il manque des études de épidémiologiques de grande envergure avec de plus grands échantillons et des cohortes moins spécifiques.

     

     

    Un bénéfice à tirer plus grand qu’en population générale

     

    Raphaël BRIAND  explique que la population qui a fait l’objet de ce travail est intéressante  car ces sujets ont malheureusement une espérance de vie réduite de 18 ans par rapport à la population générale. Le bénéfice à tirer du diagnostic et du traitement des troubles du sommeil dans cette population plus fragile est donc plus grand. Il s’agit, pour lui, d’une question de santé publique et de recherche clinique ayant pour objectif une amélioration des soins chez cette population vulnérable et souvent négligée ou perdue de vue , ce qui entraine une perte de chances. Les conséquences attendues d’une meilleure prise en charge de leurs troubles du sommeil, en sus de la meilleure reconnaissance des difficultés de ces patients, pourraient être significatives. Même si l’hétérogénéité des déficiences intellectuelles a été peu prise en compte, ce qui rend difficile l’application des recommandations de façon uniforme, Raphaël BRIAND estime que cet article est extrêmement intéressant car il pourrait forcer à insister sur les consultations de transition, de la pédiatrie à l’âge adulte. Il précise toutefois qu’il est bon de s’intéresser à cette population et au SADS mais que les objectifs thérapeutiques  ne sont pas définis , en s’approchant seulement au SADS. Ces objectifs peuvent être la diminution de la somnolence, l’amélioration de la qualité de vie, la diminution du risque cardio-vasculaire pour augmenter la survie. Des essais randomisés avec d’importants effectifs de patients et un long suivi longitudinal seraient nécessaires pour apporter plus de force à ces résultats.

     

     

    En conclusion, ce travail pose la question de l’accès aux soins des patients ayant un déficit intellectuel, toutes causes confondues et constitue une porte ouverte  pour proposer à chaque population le traitement optimal et le plus adapté, ce qui dans le cas des troubles du sommeil n’est sûrement pas la PPC pour tous… Il faut aller chercher plus loin…

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