Pneumologie

Thérapie myofonctionnelle orofaciale dans le SAOS de l’adulte : entre espoirs et limites

La thérapie myofonctionnelle orofaciale montre une efficacité limitée pour traiter les apnées obstructives du sommeil de l’adulte lorsqu’elle est utilisée seule mais peut représenter une alternative aux traitements standards du SAOS (PPC, OAM, chirurgie) ou être proposée comme adjuvant pour permettre d’augmenter sa compliance, en améliorant le suivi des patients. D’après un entretien avec Sameh MSAAD.

  • 17 Avr 2025
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    Un article, dont les résultats sont parus en mars 2025 dans l’International Archives of Otorhinolaryngology, a cherché à évaluer l’efficacité de la thérapie myofonctionnelle orofaciale dans le traitement des SAOS de l’adulte. Il s’agit d’une méta-analyse Brésilienne, qui a inclus 5 essais cliniques randomisés, avec un total de 94 patients, majoritairement masculins. L’efficacité de la thérapie myofonctionnelle orofaciale a été évaluée grâce à l’indice d’apnée-hypopnée, au score de somnolence d’Epworth et au nadir de saturation en oxygène nocturne. La thérapie myofonctionnelle orofaciale a été évaluée seule ou combinée avec la PPC.

     

    Des résultats plutôt limités

    Le docteur Sameh MSAAD, pneumologie dans le service de Pneumologie du Centre Hospitalier Universitaire Hedi Chaker de Sfax, en Tunisie, souligne que cette méta-analyse, qui est la plus récente d’un ensemble de 10 méta-analyses sur le sujet, a le mérite de soulever une question d’actualité, qui est l’apport de la thérapie myofonctionnelle orofaciale dans le traitement du SAOS de l’adulte.  Elle explique qu’il s’agit d’un entrainement des muscles de la langue, des lèvres et des joues qui cible la cause la maladie, en apparaissant comme une thérapie « étiologique » qui permettrait de diminuer la compliance pharyngée. Elle expose les résultats qui ont montré que la combinaison de la thérapie myofonctionnelle orofaciale et de la PPC modifiait l’indice d’apnée hypopnée de 38 points versus 9 points pour la thérapie myofonctionnelle orofaciale seule. La PPC seule et la PPC combinée à la thérapie myofonctionnelle orofaciale ont montré des effets comparables. Sameh MSAAD explique que la thérapie myofonctionnelle orofaciale est incapable de potentialiser l’effet de la PPC et n’a pas d’impact supérieur sur la somnolence diurne, comparativement aux soins minimalistes (hygiène de vie, dilatateurs nasaux), ni sur une amélioration significative du nadir. Pour elle, ces résultats sont décevants, malgré un enthousiasme initial, d’autant plus que la taille de l’échantillon est faible, compte-tenu du nombre de patients atteints de SAOS, et ne comporte que des patients hyper-sélectionnés. On note aussi une forte hétérogénéité statistique ce qui indique que les résultats des études incluses divergent substantiellement entre eux. En conséquence,  il est difficile d’en tirer des conclusions. Enfin, les auteurs n’abordent pas le sujet du suivi à long terme et de la durabilité des résultats de cette thérapie.

     

    Une indication en alternative ou combinée à la PPC

    Sameh MSAAD précise que, selon les dernières recommandations de l’ERS (European respiratory society) publiées en 2021, la thérapie myofonctionnelle orofaciale ne peut pas être recommandée comme traitement standard du SAOS de l’adulte mais en alternative pour les patients qui ne peuvent pas bénéficier de la PPC, de l’orthèse d’avancée mandibulaire, ou de traitements chirurgicaux (recommandation conditionnelle, faible niveau d’épreuve). Elle note également que certaines études suggèrent que l’association de la thérapie myofonctionnelle orofaciale à la PPC est capable d’augmenter la compliance à la PPC en améliorant le suivi des patients, grâce au programme proposé, puisque près de 50% des patients abandonnent leur traitement par PPC à 3 ans. C’est seulement ainsi que cette thérapie peut trouver une certaine place. La thérapie myofonctionnelle orofaciale est donc une pratique très limitée et peu utilisée. Les techniques sont, de plus, mal standardisées et les protocoles très hétérogènes. Elle manque également de kinésithérapeutes et orthophonistes formés et qualifiés.

     

    En conclusion, les seules indications de la thérapie myofonctionnelle orofaciale sont l’alternative au traitement standard en cas d’impossibilité de l’utiliser ou en adjuvant à la PPC pour en améliorer la compliance. Le niveau de preuve d’efficacité est faible et d’autres travaux à plus grande échelle sont nécessaires pour définir la place de ce traitement dans l’arsenal thérapeutique du SAOS.

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    JDF

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