Syndrome des jambes sans repos : un diagnostic trop souvent tardif

Publié le 02.09.2022
Mise à jour 02.09.2022
Mots-clés :
Syndrome des jambes sans repos : un diagnostic trop souvent tardif
Milkos/iStock

Le syndrome des jambes sans repos correspond à une « impatience » dans les jambes, doublée d’un besoin impératif de bouger le soir et la nuit, ce qui perturbe le sommeil. Le délai diagnostic serait en moyenne de 10 ans alors qu'un traitement est efficace.

Syndrome des jambes sans repos (impatiences) : COMPRENDRE

Des mots pour les maux

Le syndrome des jambes sans repos est également appelé « impatiences nocturnes » (ou simplement « impatiences »).
Cette affection est aussi nommée « maladie de Willis et Ekbom » ou syndrome « d’impatiences musculaires de l’éveil ».

Qu'est-ce qu’un syndrome des jambes sans repos ?

Le syndrome des jambes sans repos est un trouble du système nerveux qui se traduit par des sensations pénibles dans les jambes et un besoin irrépressible de mouvement des jambes, en particulier la nuit, et pouvant affecter la qualité du sommeil.
Ce syndrome touche plus souvent les adultes de plus de 50 ans et en particulier les femmes, mais peut apparaître chez l’enfant, en particulier en association au trouble de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH). Il existe des formes sans cause connue, des formes secondaires et des formes familiales.
Les sensations désagréables se manifestent essentiellement au repos, le soir ou la nuit et sont soulagées par le mouvement des jambes, ce qui peut conduire le malade à se lever et à marcher dans sa chambre pour calmer cette gêne. Le retentissement n’est pas négligeable, tant sur le sommeil que sur la vie sociale et professionnelle.
Le syndrome des jambes sans repos s’expliquerait par un déficit en dopamine, substance chimique qui permet la transmission de l’information entre les cellules nerveuses (« neurones »), dans la moelle épinière.

Quels sont les signes du syndrome des jambes sans repos ?

Le syndrome des jambes sans repos se caractérise essentiellement par des sensations inconfortables dans les jambes et conduisant à un besoin impérieux de bouger les jambes. Ce qui est caractéristique, c’est que le déclenchement, ou l’accentuation, des signes désagréables se produit durant les périodes de repos, le soir ou la nuit, mais aussi la journée, et que ces sensations désagréables régressent totalement ou partiellement lors du mouvement des jambes.
Les sensations désagréables sont généralement des picotements, des fourmillements, des démangeaisons, des brûlures, des contractures ou une sensation de décharge électrique, mais elles sont parfois mal définies par la personne qui en souffre. Elles peuvent parfois être douloureuses.
Ces signes peuvent être plus marqués dans une jambe que dans l’autre. Ils peuvent toucher les bras dans les formes sévères. La gêne peut parfois être majeure, transformant le malade en promeneur nocturne (le « nightwalker » des anglo-saxons).
Ces sensations désagréables s’accompagnent le plus souvent de mouvements involontaires pendant le sommeil ou « mouvements périodiques du sommeil » qui gênent surtout le conjoint.

Quelles sont les causes du syndrome des jambes sans repos ?

Il existe traditionnellement 3 formes de syndrome des jambes sans repos : génétique, secondaire à une maladie ou à une prise de médicaments et sans cause connue (« idiopathique »).
• Les formes « idiopathiques » sont un diagnostic à retenir uniquement après élimination des causes classiques.
• Le plus souvent, le cerveau et les nerfs sont indemnes et une histoire familiale existe dans près de 90 % des cas. Quatre gènes prédisposent au syndrome des jambes sans repos.
• Dans les formes secondaires, on retrouve parfois une carence en fer (avec ou sans anémie), une maladie des nerfs des jambes (sciatique, polynévrite), d’autres maladies (diabète, polyarthrite rhumatoïde, insuffisance rénale chronique, sclérose en plaque).
Divers médicaments peuvent s’accompagner d’un syndrome des jambes sans repos (neuroleptiques, antidépresseurs, antihistaminiques).
La prise excessive d’alcool, de café, de tabac et le stress peuvent s’accompagner de ce syndrome.
Au cours de la grossesse, 20 à 30 % des femmes se plaignent de signes de syndrome des jambes sans repos et ces troubles disparaissent après l’accouchement.

Comment évolue le syndrome des jambes sans repos ?

Le syndrome des jambes sans repos évolue de façon progressive, avec cependant des variations. Il est en effet décrit des accentuations temporaires des signes à certaines périodes (stress, fatigue) et, à l’inverse, les signes désagréables peuvent aussi régresser temporairement.

Quelles sont les complications du syndrome des jambes sans repos ?

Cette affection peut avoir deux conséquences principales : une perturbation du sommeil et de la vie sociale.
• La personne souffrant d’un syndrome des jambes sans repos a du mal à s’endormir et se réveille plusieurs fois dans la nuit pour bouger les jambes, voire pour se lever. Cela peut déclencher une insomnie pour la personne atteinte du trouble et une gêne pour la personne qui partage le lit.
À la longue, une fatigue peut apparaître dans la journée avec une somnolence, des difficultés de concentration, voire des troubles de l’humeur (irritabilité et dépression.
• Le syndrome des jambes sans repos peut devenir gênant dans les situations sociales où l’on doit rester immobilisé un certain temps (réunions, spectacles, longs trajets en voiture ou en avion...) et les personnes touchées évitent alors ce type d’événements.

Syndrome des jambes sans repos (impatiences) : DIAGNOSTIC

Quand faut-il évoquer un syndrome des jambes sans repos ?

• Il est possible de ressentir des signes du syndrome des jambes sans repos plusieurs fois par an sans pour autant souffrir d’un véritable syndrome.
• Il faut évoquer un syndrome des jambes sans repos devant la répétition des sensations désagréables dans les jambes qui se déclenchent ou s’accentuent durant les périodes de repos, le soir ou la nuit, et en particulier si ces sensations désagréables régressent totalement ou partiellement lors du mouvement des jambes.

Comment diagnostiquer le syndrome des jambes sans repos ?

Une consultation médicale suffit souvent à diagnostiquer le syndrome des jambes sans repos, mais une prise de sang est le plus souvent demandée. Parfois d’autres examens complémentaires sont nécessaires, mais essentiellement pour éliminer d’autres maladies
Dans son interrogatoire, le médecin va s’intéresser au type des sensations désagréables, à leur sévérité, leurs circonstances de déclenchement et à leur périodicité. Quatre critères sont indispensables pour affirmer le diagnostic :
• Besoin irrépressible de bouger les jambes, associé à ou provoqué par des sensations « désagréables » au niveau des membres inférieurs.
• Impatiences ou sensations désagréables uniquement présentes ou aggravées lors du repos, particulièrement dans la position allongée ou assise.
• Sensations désagréables améliorés, partiellement ou complètement, par le mouvement (au moins temporairement).
• Apparition ou aggravation des sensations désagréables le soir ou la nuit.
La présence de mouvements involontaires pendant le sommeil ou « mouvements périodiques du sommeil », pourra aider au diagnostic.
Le médecin interrogera également la personne souffrante sur l’existence de cas similaires dans la famille, sur les antécédents médicaux (diabète, insuffisance rénale chronique…) et sur d’éventuels médicaments pris, en particulier les antihistaminiques qui sont souvent utilisés en automédication.
Un examen neurologique détaillé complètera la consultation.
Une prise de sang (dosage de la ferritine sérique) sera généralement demandée pour vérifier qu’il n’existe pas un manque de fer.
Dans les cas sévères, un enregistrement du sommeil permettra d’évaluer le retentissement du trouble sur le sommeil et un avis pourra être demandé chez un neurologue ou un spécialiste du sommeil.
En as de doute, un électromyogramme pourra être demandé à la recherche d’une atteinte débutante des nerfs périphériques (polynévrite) ;

Avec quoi peut-on confondre un syndrome des jambes sans repos ?

Les crampes nocturnes peuvent être confondues avec un syndrome des jambes sans repos, mais dans ce cas, il existe une contracture apparente d’un muscle ou d’un groupe musculaire.
Certaines maladies neurologiques peuvent ressembler à un syndrome des jambes sans repos : c’est le cas lors des souffrances des racines innervant les jambes au cours, ou au décours, d’une sciatique. Cela peut aussi être le cas au cours d’une polynévrite débutante où il existe des « paresthésies » dans les territoires innervés par les nerfs atteints.
Un insuffisance veineuse peut se traduire par des sensations désagréables des jambes qui vont prédominer en fin de journée, mais ces sensations s’accompagnent généralement d’un gonflement des jambes, voire de varices, et elles sont plutôt soulagées en position couchée avec les jambes surélevées.
Une atteinte artérielle des membres inférieurs peut aussi donner des sensations désagréables la nuit, mais il existe généralement des crampes douloureuses à l’effort dans la journée et une nette réduction des pouls aux membres inférieurs.

Syndrome des jambes sans repos (impatiences) : TRAITEMENT

Que peut-on faire en cas de syndrome des jambes sans repos ?

Dans les formes légères, des gestes simples et l’adoption d’une bonne hygiène de vie suffisent en général à atténuer les signes.
La première étape est d’identifier les éléments qui peuvent provoquer ou aggraver le syndrome des jambes sans repos, et en particulier les médicaments (neuroleptiques, antidépresseurs, antihistaminiques). Si tel est le cas, il faudra essayer de modifier les traitements en changeant par exemple de molécule.
Pour une bonne hygiène du sommeil, il est recommandé de se coucher et de se lever à des heures régulières, de restreindre les activités dans la chambre à coucher et d’éviter les activités perturbantes.
Il est possible aussi de bouger les jambes, d’essayer de prendre des bains chauds avant de se coucher, de se faire des massages des jambes et d’étirer les membres inférieurs.
Des exercices physiques modérés peuvent aussi faire partie du traitement préventif le soir.
La réduction d’une surcharge pondérale a également été associée à une amélioration du syndrome.
Il est également conseillé de réduire la consommation d’alcool, de tabac, de café ou de thé.

Quel est le traitement du syndrome des jambes sans repos ?

Le traitement repose d’abord sur des gestes simples et une bonne hygiène de vie. Dans les formes les plus sévères,des médicaments seront cependant nécessaires, soit pour améliorer le syndrome des jambes sans repos, soit pour en traiter la cause.
Un traitement à base de fer est nécessaire en cas de déficit en fer avéré, même en l’absence d’anémie. Un déficit en fer est retrouvé dans 25 % des cas de syndrome des jambes sans repos et il existe une relation inverse entre la gravité des signes et le taux de fer dans le sang.
Dans les formes où il existe un retentissement sur le sommeil et sur la vie sociale ou professionnelle, des médicaments qui facilitent la transmission de l'influx nerveux utilisant la dopamine peuvent soulager les sensations désagréables et le trouble du sommeil. Le médecin pourra prescrire un médicament de la famille des agonistes dopaminergiques non dérivés de l’ergotamine (pramipexole, ropinirole, rotigotine en patch cutané). Ces produits pallient le manque relatif de dopamine dans le système nerveux. La lévodopa n’est plus utilisée dans cette indication.
Les dopaminergiques sont souvent très efficaces mais les doses prescrites dépendent de l’intensité des signes.
En cas de troubles intermittents, les agonistes dopaminergiques se prennent durant les épisodes de syndrome des jambes sans repos. Ils peuvent aussi être prescrits en préventif dans les situations qui déclenchent systématiquement des signes. Si les symptômes sont réguliers et fréquents, les prises médicamenteuses se font en continu.
Dans tous les cas, pour éviter les effets secondaires, les dopaminergiques sont prescrits à doses modérées, augmentées progressivement.
Les anticonvulsivants (gabapentine essentiellement) sont une solution de rechange aux agonistes dopaminergiques quand ceux-ci ne sont pas bien tolérés, mais ils sont surtout efficaces en cas de douleurs de type neuropathiques.
Les antalgiques opioïdes ont été utilisés avec succès mais font courir un risque d’accoutumance et de dépendance.
Les benzodiazépines (clonazépam) ont aussi été utilisées. Leur intérêt est patent sur l’endormissement, mais il n’est pas démontré qu’elles sont efficaces sur le trouble neurologique lui-même, et en particulier sur les mouvements involontaires des jambes la nuit.

Grossesse et traitement du syndrome des jambes sans repos ?

Jusqu'à 30 % des femmes enceintes se plaindraient d’un syndrome des jambes sans repos, particulièrement au cours du troisième trimestre et la grossesse peut aussi aggraver un syndrome préexistant.
Dans la quasi totalité des cas, les manifestations du syndrome restent modérées et disparaissent après l'accouchement. Cependant, plus de la moitié de femmes atteintes durant une première grossesse le seront, à nouveau, au cours des grossesses ultérieures. De plus, les femmes qui ont souffert du syndrome des jambes sans repos durant une grossesse auront quatre fois plus de risques de développer une forme chronique ultérieurement.
La carence en fer, habituelle lors de la grossesse, serait en partie responsable, mais d’autres facteurs pourraient prédisposer au déclenchement de la maladie chez la femme enceinte.
Dans la grande majorité des cas, il n’est pas utile de traiter en dehors d’une supplémentation en fer et des éléments d’hygiène de vie. Les signes s’estompent en général rapidement après l’accouchement.
Le magnésium a été proposé dans cette situation, même si son efficacité n’a pas été démontrée de manière scientifique.
Les autres traitements habituellement utilisés dans le syndrome des jambes sans repos sont contre-indiqués pendant la grossesse.
Dans les cas les plus sévères, il est possible de recourir aux médicaments contre la douleur : antalgiques de niveau 2 (association paracétamol-codéine).

Syndrome des jambes sans repos (impatiences) : PLUS D’INFOS

Le syndrome des jambes sans repos en France

Le syn­­drome des jambes sans repos est l’une des maladies les plus fréquentes en neurologie car il touche de 2 % à 12 % de la popu­lation générale, dont environ 3 % de cas graves.

Les liens du syndrome des jambes sans repos

Le site de l’association France Ekbom

http://www.france-ekbom.fr/

Les liens Pourquoi Docteur

Troubles du sommeil : mieux comprendre pour éviter l'insomnie

Phlébite : les 3 signes à connaître pour éviter 10 000 morts par an

Arthrose : des douleurs sans lien obligé avec le vieillissement

Liens vidéos

Syndrome des jambes sans repos : paradoxalement sur- et sous-diagnostiqué ? avec le Dr Laurène Leclair-Visonneau, neurologue et spécialiste du sommeil au CHU de Nantes

 

Pour laisser un commentaire, Connectez-vous par ici.

-----