Maladie de Lyme : une infection bactérienne difficile à diagnostiquer
La maladie de Lyme est une maladie d'origine infectieuse, qui survient après morsure de la peau par une tique, mais qui peut devenir générale et grave. Son diagnostic est parfois difficile et les tests biologiques n'ont de valeur que s'ils sont interprétés en fonction du contexte et de la clinique. Des douleurs diffuses chroniques et invalidantes peuvent persister, mais leur cause n'est pas univoque.
Par le Dr Jean-Paul Marre, rhumatologue, CHU Pitié-Salpêtrière, Paris
Des mots pour les maux
La maladie de Lyme est une infection liée à une bactérie appelée borrelia et essentiellement borrelia burgdorferi : c’est une borréliose.
L’infection est transmise par la morsure d’une tique infectée et c’est ce que l’on appelle une zoonose.
La morsure de tique infectée est responsable d’une plaque rouge appelée érythème chronique migrant (ou Erythema Chronicum Migrans).
Il s’agit d’une maladie qui peut toucher de nombreux organes (multiviscérale) dans de nombreux systèmes (maladie multisystémique).
Qu’est-ce que la maladie de Lyme ?
La maladie de Lyme est une maladie infectieuse et bactérienne, transmise lors d'une morsure de tique. Toutes les tiques ne sont pas infectées (une sur 3 en France) mais une infection se manifeste au bout de 7 à 14 jours par une réaction de la peau au site de la morsure. Si elle n'est pas soignée, cette infection aiguë peut devenir chronique et diffuser de la peau à tout l’organisme. Elle donnera alors des complications graves qui peuvent toucher plusieurs organes (articulations, cerveau, cœur...). Il est facile de prévenir les complications car la maladie de Lyme se traite sans difficulté lorsqu'elle est détectée tôt.
La bactérie de la maladie de Lyme est un spirochète qui est porté par de très nombreuses espèces d’animaux sauvages, comme les sangliers, les cervidés, les petits rongeurs, mais aussi le bétail. Différentes espèces de borrélioses et de tiques sont concernées selon les pays. La maladie de Lyme est quasi exclusivement transmise à l’homme par la morsure d’une tique infectée. Cela se produit généralement du printemps à l’automne, lors d'une promenade en forêt ou dans les herbes en bordure de forêt, mais un personne infectée sur 3 en France a été piquée par une tique dans son jardin.
On ne peut donc pas avoir la maladie par contact direct avec un animal infecté, ni par contact avec une personne malade. Même si les animaux domestiques, en particulier les chiens, peuvent la contracter et peuvent introduire des tiques infectées dans les maisons, rien ne prouve qu'ils puissent transmettre l'infection directement aux humains.
La maladie de Lyme se manifeste dans les trois à trente jours après la morsure de la tique, généralement par une plaque rouge, inflammatoire, apparaissant sur la peau autour du point de morsure, point qui siège le plus souvent aux membres inférieurs (aux plis ou au cuir chevelu chez les enfants). La lésion de la peau peut s'accompagner de douleurs musculaires et articulaires, de fièvre (syndrome grippal)... La plaque va s’étendre ensuite, parallèlement à la guérison du centre de la plaque, ce qui va donner une espèce d’anneau en extension, ou de cocarde, appelée « érythème chronique migrant ». Cette plaque peut s’accompagner de fièvre, puis disparaître spontanément en quelques semaines.
En l’absence de traitement, la maladie peut causer, quelques semaines, mois ou années plus tard, des arthrites et d’autres lésions cutanées, cardiaques ou neurologiques.
Ces atteintes infectieuses de différents organes peuvent se manifester seules ou selon différentes modalités d'association, ce qui complique le diagnostic. D’autant qu’à ce stade, le diagnostic est souvent difficile car il n’y a plus de trace, ni de souvenir de la morsure de tique.
Comment risque-t-on de contracter la maladie de Lyme ?
Le risque de se faire mordre par une tique augmente lorsque la température se réchauffe dans les bois au printemps et se poursuit jusqu'à l'automne. Les tiques peuvent cependant être actives l'hiver, si celui-ci est doux et qu'il tombe peu de neige. Toutefois, le risque de contracter la maladie de Lyme est à son maximum durant les mois de printemps et d'été.
Les tiques ne sont pas naturellement infectées, elles se contaminent en se nourrissant du sang des animaux sauvages infectés. Les tiques responsables de la maladie de Lyme sont observées le plus souvent dans les forêts et les zones envahies par les herbes, entre les bois et les espaces ouverts. Les tiques sont des vecteurs de maladies et, selon le programme CiTIQUE, en France, 31% en moyenne des tiques piqueuses d’êtres humains analysées (N=1412) sont porteuses d’au moins un agent potentiellement pathogène : 15% des tiques qui piquent les êtres humains sont porteuses de Borrelia burgdorferi sensu lato, la bactérie responsable de la maladie de Lyme et 14% sont porteuses d’un autre agent pathogène potentiellement dangereux pour la santé humaine.
Les tiques ne se déplacent pas loin par elles-mêmes. Cependant, la propagation des tiques par différents vecteurs (rongeurs, oiseaux migrateurs, animaux domestiques) fait qu'il est possible de se faire mordre en dehors des bois et des espaces naturels. Elles peuvent par exemple se coller aux oiseaux migrateurs et tomber loin de leur emplacement d'origine.
Quelles sont les personnes à risque?
Les personnes les plus exposées sont les professionnels travaillant en forêt (forestiers, bûcherons, gardes forestiers…), et ceux qui y vont pour leurs loisirs : les chasseurs, les golfeurs, les pêcheurs, les ramasseurs de champignons, les randonneurs, les campeurs… et les promeneurs du dimanche.
Comment évolue une morsure de tique infectée ?
La maladie de Lyme est une infection le plus souvent chronique qui évolue sur plusieurs années ou décennies si elle n'est pas traitée, avec des phases où l’infection est complètement latente.
L’évolution est très favorable lorsque la maladie est diagnostiquée et traitée précocement. En l’absence de traitement, l’évolution vers la phase secondaire n’est pas systématique, mais aggrave le pronostic.
Après l’infection aiguë, qui est surtout cutanée, l’infection non soignée peut passer par une phase dormante puis affecter secondairement la plupart des organes (articulations, cœur, ganglions et système nerveux), de manière aiguë et/ou chronique, avec des effets différents selon les organes et les patients (rôle non négligeable de l’immunité).
Des séquelles et rechutes sont possibles, et il peut y avoir un chevauchement entre les phases. La maladie, au fil des « cycles infection-inflammation-cicatrisation », peut aboutir finalement à des cicatrices dans les organes touchés, cicatrices qui sont responsables de handicaps physiques et mentaux définitifs.
Quels sont les risques de la maladie de Lyme ?
On peut décrire les symptômes de la maladie de Lyme comme se produisant en 3 phases, et la 3e phase est celle des séquelles (cicatrices) de l’infection chronique et de la réaction immunitaire qui en résulte.
La première phase de la maladie de Lyme est celle de l’infection cutanée aiguë avec une éruption sur la peau appelée « érythème chronique migrant » (ECM) que constatent près de 50% des personnes infectées. Cette éruption cutanée peut apparaître dès le 3e jour après la morsure d'une tique, mais elle peut parfois ne pas apparaître avant un mois.
La plaque rouge de la peau commence habituellement à l'emplacement de la morsure et prend souvent l'apparence d'une cible puisqu’elle s’étend tandis que le centre reste rouge et que la zone intermédiaire guérit. Parallèlement à cette plaque qui siège plutôt sur les membres inférieurs, les malades peuvent se plaindre d’une fatigue, de maux de tête, de frissons et de fièvre, de douleurs musculaires et articulaires. Il est aussi possible d’observer des ganglions lymphatiques gonflés.
Si la maladie de Lyme n’est pas traitée à ce stade, les signes peuvent néanmoins s’estomper spontanément et, pendant une période de latence clinique, l’infection va diffuser et activer le système immunitaire.
Après cette phase de latence apparaît la deuxième phase de la maladie avec une faiblesse, une fatigue extrême, des douleurs et une raideur articulaires intenses, des maux de tête, une faiblesse musculaire, des paralysies et des engourdissements touchant surtout les jambes (« polyradiculite »), des éruptions cutanées et une irrégularité du rythme cardiaque. Non diagnostiquée et non traitée, la maladie peut néanmoins régresser avant de passer à la troisième phase.
A la troisième phase apparaissent des arthrites chroniques dites « séronégatives » (sans aucun des signes immunologiques d’une polyarthrite connue) et des signes neurologiques témoignant d’une méningo-encéphalite chronique : maux de tête, étourdissements, paralysie... Ce stade de la maladie correspond à des séquelles qui sont peu régressives et vont durer des années. Peu de décès sont néanmoins directement provoqués par la maladie de Lyme, sauf chez le fœtus pendant la grossesse.
Quelles sont les autres infections transmises par les tiques ?
Si elle est la plus connue de toute, la maladie de Lyme n’est cependant pas la seule infection que peut transmettre la tique à l’homme. Six autres maladies vectorielles ont été recensées sur le territoire national, notamment en Franche-Comté par l’Agence régionale de santé (ARS) : l’encéphalite à tique, l’anaplasmose granulocytaire humaine, la tularémie, la fièvre Q et deux rickettsioses, TIBOLA (tick-borne lymphadenopathy) et LAR (lymphangitis-associated rickettsiosis).
L’encéphalite à tiques : Principalement observée dans l’est de la France métropolitaine, et en particulier en Alsace, l’encéphalite à tiques est une maladie d’origine virale transmise à l’homme par morsure de tique ou de façon exceptionnelle par consommation de lait cru ou de fromage au lait cru de chèvre ou de brebis. Elle affecte le système nerveux central et peut, si elle n’est pas prise en charge, causer de graves lésions cérébrales.
Les premiers symptômes ressemblent à ceux de la grippe (fièvre, maux de tête, parfois nausées et vomissements). Dans 30% des cas, ils sont suivis d’une forte fièvre et de signes d’atteinte du système nerveux central. Dans sa deuxième phase, l’encéphalite peut entraîner une paralysie et, dans moins de 1% des cas, la mort.
L’anaplasmose granulocytaire humaine : Comme l’encéphalite, l’anaplasmose granulocytaire humaine est une infection virale transmise par la morsure d’une tique. La période d’incubation dure entre 7 et 21 jours et les symptômes sont similaires à ceux de la grippe : frissons, fièvre, céphalées, myalgies… L’anaplasmose peut également s’accompagner de formes de conjonctivite, de pharyngites ou de toux et d'une baisse des globules blancs.
Elle est à suspecter chez toute personne à risque présentant un syndrome grippal entre le printemps et l’automne et son diagnostic repose sur la PCR. Son traitement se base sur l’administration d’un antibiotique de type doxicycline dans les formes débutantes et rifampycine autrement.
La tularémie : Causée par la bactérie Francisella tularensis transmise à l’homme par la morsure de tique, la tularémie est une maladie rare : on recense environ 40 cas chaque année en France. L’infection peut aussi être transmise par les rongeurs (lapins, rats…), mais aussi les moustiques ou les mouches.
Après une période d’incubation de 3 à 5 jours, les premiers symptômes apparaissent : fièvre, maux de tête, douleurs musculaires et grande fatigue en sont les principaux. Il n’existe pas de vaccin contre cette maladie, qui est traitée par administration d’un antibiotique.
La fièvre Q : Causée par une bactérie appelée Coxiella burnetti, la fièvre Q est transmise par les tiques, même si son principal mode de transmission se fait par voie aérienne, par l’inhalation de particules contaminées en suspension dans l’air, ainsi que par le contact cutané ou muqueux avec les fluides (urines, selles, lait…) des animaux infectés.
La fièvre Q se manifeste le plus souvent par un état grippal, un rash au niveau de la poitrine, des aisselles et des cuisses. Dans 2% des cas, la maladie peut évoluer vers une forme chronique. L’infection est traitée par antibiotique.
Les rickettsioses LAR et TIBOLA : Comme la maladie de Lyme, les rickettsioses LAR et TIBOLA sont deux infections vectorielles transmises par les tiques. Dans le cas de TIBOLA (tick-borne lymphadenopathy), la tique provoque une escarre d'inoculation qui est entourée d'un halo rouge‚ le plus souvent au niveau du cuir chevelu. Les symptômes sont une grande fatigue et des maux de tête intenses. Infection bénigne, le LAR (lymphangitis-associated rickettsiosis) se présente par une éruption fébrile avec escarre d'inoculation. Une fièvre supérieure à 38,5 °C et une éruption maculopapuleuse généralisée sont aussi constatées. Le traitement de ces deux maladies se fait par la prise d’un antibiotique.
Quand faut-il penser à une maladie de Lyme ?
La difficulté du diagnostic de la maladie de Lyme vient du fait qu’elle atteint de nombreux organes et que, quand la plupart des signes apparaissent, la morsure de tique est habituellement guérie et oubliée. Les personnes atteintes ne font donc pas nécessairement le lien entre la maladie et une morsure de tique.
Au stade de début, il faut évoquer cette maladie devant l’apparition d’une plaque rouge siégeant principalement aux membres inférieurs et du printemps à l’automne, chez quelqu’un qui a eu une morsure de tique ou qui va souvent en forêt ou dans les zones sauvages.
A un stade plus tardif, il faut évoquer cette maladie devant des signes d’atteintes de plusieurs organes en même temps (peau, articulations, muscles, cœur et système nerveux) chez les professionnels travaillant en forêt, les campeurs, les chasseurs, les golfeurs, les pêcheurs, les ramasseurs de champignons, les randonneurs…
Quels sont les signes les plus fréquents de la maladie de Lyme ?
Ces signes varient en fonction du stade de la maladie, avec la possibilité de chevauchement des stades, et en fonction du terrain immunitaire.
Il peut y avoir une absence totale de signes chez certaines personnes. D'autres peuvent éprouver des troubles graves, mais des semaines seulement après la morsure.
Les principaux signes seront donc une association à différents degrés de : fatigue, fièvre (avec ou sans frissons), gros ganglions, éruption sur la peau, maux de tête, faiblesse musculaire, engourdissements ou picotements, douleurs ou gonflements articulaires (arthrites), troubles du système nerveux (paralysies, douleurs), trouble de la cognition (difficultés à penser) et un rythme cardiaque irrégulier.
En l'absence de traitement antibiotique, les signes peuvent durer des mois, voire des années.
Comment la maladie est-elle diagnostiquée?
Le diagnostic de la maladie de Lyme peut être difficile à obtenir, car les signes varient d'une personne à l'autre (à cause de l'immunité) et peuvent ressembler à ceux d'autres maladies (polyarthrite "séronégative", sclérose en plaques, méningite, méningoradiculite…).
Le médecin sera amené à poser de nombreuses questions et à réaliser un examen clinique complet. Il recherchera en particulier un contexte favorable à une exposition aux tiques et la notion d’une morsure de tique et d’une plaque rouge sur la peau.
Il sera enfin amené à demander des prises de sang et en particulier un sérodiagnostic de Lyme.
Au stade des complications, il sera nécessaire de réaliser des examens complémentaires articulaires, cardiologiques et neurologiques.
Quel est l'apport des tests biologiques dans la maladie de Lyme ?
Afin de préciser le diagnostic, il est possible de réaliser des examens biologiques visant à mettre en évidence dans le sang ou dans d’autres liquides du corps des « traces » témoignant d’une réponse de l’organisme à l’infection à Borellia (le plus souvent des anticorps). Mais, entre des tests homologués qui n'ont pas toujours été fiables, des tests non évalués et non homologués, et des tests abracadabrantesques, il est difficile aux malades, comme d'ailleurs aux médecins, de s’y retrouver.
La méthode officielle qui a été choisie dans tous les pays, le test réglementaire, consiste à chercher dans le sang les anticorps produits par le système immunitaire du malade en réponse à un contact avec la bactérie Borellia. Il s'agit des tests sérologiques, réalisés en deux étapes (en France) selon les recommandations : une étape de « screening » (dépistage) par une technique « ELISA » qui, en cas de positivité, doit être confirmée obligatoirement par une seconde réaction appelée immuno-empreinte ou « Western-Blot ». Ces recommandations ont été établies au cours d’une conférence de consensus il y a dix ans, et elles ont été confirmées dans toutes les recommandations internationales depuis. Ces tests sont proposés aux patients en cas de suspicion d'une maladie de Lyme et réalisés dans un laboratoire d'analyses biologiques.
Ces 2 techniques sont donc systématiquement utilisées mais, selon une enquête de 2014 du Ministère de la Santé, elles n'étaient pas standardisées entre les laboratoires et les régions, concernant les antigènes et les seuils de sensibilité utilisés (un malade pouvait être considéré séropositif à Paris mais séronégatif à Orléans ou à Strasbourg, par exemple). Ce problème a été depuis corrigé avec les mesures mises en place par le Ministère de la Santé sur l'expertise des centres de référence. Mais en France et en Europe, la maladie de Lyme n'est pas due à une seule bactérie, mais à au moins à cinq espèces du genre Borellia différentes : pour identifier les anticorps produits par l'organisme au contact de chacune de ces bactéries, il faut donc utiliser des antigènes (les protéines de la bactérie reconnues par ces anticorps) appartenant à ces 5 espèces bactériennes qui peuvent être potentiellement à l'origine de la maladie (soit des antigènes communs à ces 5 bactéries, soit une combinaison d'antigènes qui couvre ces 5 espèces de Borellia). Mais les fabricants des différents tests sérologiques autorisés en France n'indiquent pas toujours les antigènes utilisés, ce qui est un facteur de complexité.
Dans certaines situations mal connues, les Borrelia se camoufleraient pour passer presque inaperçues des défenses immunitaires de l'organisme et induisent donc moins d’anticorps qu’au cours d’une infection bactérienne, ce qui laisse les tests Elisa et Western Blot négatifs ou faiblement positifs. D’après des chercheurs, la cause serait liée au passage des Borrelia dans les glandes salivaires de la tique, celles-ci se recouvriraient d'une sorte de camouflage fait de constituants de la salive de la tique. Quand la tique mordra une personne, Borrelia pénètrera « camouflée » dans son corps et se diffusera masquée dans le corps : avec ce camouflage, la bactérie serait à l'abri du système immunitaire humain, qui va réagir tardivement et faiblement à l'infection. L’infection à Borrelia sera dite « peu immunogène », c'est-à-dire qu'elle activera peu le système immunitaire de la personne infectée (et les tests usuels sont à des taux très faibles).
Par ailleurs, le résultat des tests est souvent négatif dans la première phase de la maladie (phase de l'Erythema Chronicum Migrans où il est inutile de les demander) mais toujours positif dans les phases secondaires et tertiaires. Il faut savoir également qu'une sérologie positive (IgG) peut correspondre à une infection ancienne, mais non évolutive (c’est-à-dire que la personne a contracté l’infection mais la maladie n’évolue pas), cas le plus fréquent chez les travailleurs forestiers ou après un traitement efficace.
Un autre test a été proposé par certains médecins européens, la « goutte épaisse », que l’on utilise par exemple dans le diagnostic d'une parasitose : le paludisme. Il s’agit d’analyser une goutte de sang de la personne suspecte d'infection sur une lame de verre à l'aide d'un microscope à fond noir. En France, et surtout en Allemagne, des laboratoires d'analyses proposent cette technique alors qu'elle n'est pas validée et qu'elle est franchement inefficace. En effet, une étude scientifique a été réalisée par l’équipe de Raymond-Poincaré, à Garches, et elle a démontré l’inefficacité de ce test puisqu'il déclarait positives des personnes malades mais aussi des personnes en bonne santé (nombreux faux positifs).
Certains pays utilisent d'autres tests déclarés plus sensibles et plus chers, comme le « Test de Transformation Lymphocytaire » (ou TTL). Leur avantage n'est pas toujours patent, car leur efficacité diagnostique dépend comme toujours des antigènes bactériens choisis et testés, ainsi que de la population contrôle testée. Leur évaluation est mal faite mais montre une trop grande sensibilité (nombreux faux positifs).
Un examen par « PCR » (ou « Polymerase Chain Reaction ») est considéré à tort comme la technique de référence : elle permettrait de mettre en évidence l’ADN (patrimoine génétique) de la bactérie dans tous les liquides et les tissus biologiques du corps où la Borellia pourrait se nicher ou aurait pu passer. La PCR est indiquée dans les cas douteux de lésion de la peau et des articulations, en particulier les malades avec discordance entre la clinique et la sérologie. La PCR est une méthode « d'amplification de l'ADN », bactérien ou viral, qui est utilisée pour trouver, par exemple, le virus du sida. C’est une méthode très sensible et très spécifique (le risque de confondre une autre bactérie avec une Borrelia est faible), à condition d'être utilisée selon des normes strictes pour éviter le risque de contamination par d'autres matériels génétiques. Mais Borrelia ne circule dans le sang que de manière transitoire et n'y reste pas : c'est pourquoi la PCR ne peut pas être considérée comme fiable quand elle est utilisée sur des prélèvements de sang, comme c'est régulièrement le cas dans d'autres pays européens, comme l'Allemagne. Par contre, elle peut être très intéressante quand un organe est touché spécifiquement par la maladie, par exemple, en cas d’épanchement de liquide articulaire (« arthrite »), on peut prélever le liquide synovial contenu dans les articulations pour l'analyser en PCR. En présence de problèmes neurologiques (« méningo-radiculite » ou « méningo-encéphalite »), la PCR dans le liquide céphalo-rachidien (prélevé par ponction lombaire) n'est pas très performante. On peut également faire une PCR sur une biopsie de peau sur le site de la morsure ou une biopsie de membrane synoviale.
Une autre méthode, appelée « Elispot », et habituellement utilisée pour le diagnostic de la tuberculose, est proposée par certains laboratoires d'analyses médicales. Ce test consiste à mettre en évidence des cellules du système immunitaire du patient qui auraient été en contact avec Borrelia. Mais comme le test de la goutte épaisse, il donne un nombre très élevé de résultats faussement positifs, et il n’a jamais démontré scientifiquement son intérêt pour le diagnostic de la maladie de Lyme. Les résultats de l'Elispot sont donc à prendre avec méfiance, ce qui est rédibitoire dans la mesure où ils coûtent cher (environ 300 euros).
Enfin, des stratégies de recherche d'autres germes se dessinent, car selon le programme CiTIQUE, en France, 31% en moyenne des tiques piqueuses d’êtres humains analysées (N=1412) sont porteuses d’au moins un agent potentiellement pathogène : 15% des tiques qui piquent les êtres humains sont porteuses de Borrelia burgdorferi sensu lato, la bactérie responsable de la maladie de Lyme et 14% sont porteuses d’un autre agent pathogène potentiellement dangereux pour la santé humaine. Il apparaît donc que les tiques pourraient transmettre plusieurs types de bactéries, autres que les Borellia, au cours de la même morsure (« co-infections » à Rickettsia, à Bartonella ou à Erlichia), y compris des bactéries « intracellulaires », ce qui veut dire que ces bactéries ne seront pas forcément sensibles aux mêmes antibiotiques que Borellia et qu’une cure d’amoxicilline par exemple, peut débarrasser des Borellia les personnes mordues par une tique, mais pas des autres bactéries. Ces autres bactéries sont cependant beaucoup moins fréquentes que les Borellia et leur fréquence peut varier selon les régions. Des parasites peuvent également être transmis par les tiques en France et dans le monde (Babesia), parasites qui ne sont pas non plus sensibles aux mêmes antibiotiques.
Dans tous les cas, sans aucune exception, les résultats des tests doivent être confrontés aux constatations de l’examen clinique réalisé par un médecin spécialiste. En cas de doute ou de situation complexe, il faut aller dans un centre de référence.
Que faire en cas de morsure par une tique ?
Toutes les tiques ne sont pas porteuses de maladie (une tique sur 3 est infectée en France). Mieux vaut cependant les retirer au plus vite pour éviter tout risque d’infection. La tique a tendance à s’accrocher à la peau, et si l’on n’y prend garde, il est possible d’arracher le corps de la tique et de laisser la tête qui est infectée sur la peau. Or, l'élimination des tiques dans un délai de 24 à 36 heures prévient habituellement l'infection.
Deux méthodes sont couramment utilisées pour retirer la tique avec sa tête : la première est d’utiliser un tire-tique, une sorte d'hameçon qui permet d'attraper directement la tête de la tique, au ras de la peau. La deuxième méthode est de se servir d'une pince à épiler pour attraper la tête le plus près possible de la peau et de retirer ensuite la tique entière (il ne faut surtout pas serrer et presser l'abdomen car cela risquerait de favoriser l'excrétion de bactéries). Il faut ensuite nettoyer le site de la morsure avec de l'eau et du savon ou de l'alcool ou du désinfectant. Si la tête de la tique se sépare et reste dans la peau, il faut essayer de la retirer à l'aide des pinces.
Lorsque c'est possible, il faut mettre la tique qui a été retirée dans un sac en plastique étanche et noter dessus la date de la morsure. Si des signes qui peuvent évoquer la maladie de Lyme se développent dans les semaines qui suivent la morsure, il faut consulter un médecin en lui apportant la tique car cela pourrait l’aider à diagnostiquer la maladie. Plus le diagnostic est rapide, plus le traitement est précoce, et plus le rétablissement complet est assuré.
Quand faut-il consulter après une morsure de tique ?
Toutes les tiques ne sont pas porteuses de maladie, mais certains signes sont très évocateurs d'une infection et certains terrains exposent à plus de complications en cas de maladie de Lyme.
Il faut donc consulter :
• Si une plaque rouge se développe autour d'une piqûre ancienne et s’étend (dans les 15 jours en moyenne).
• Si la tique est restée implantée plus de 36 heures.
• En cas de piqûres multiples.
• En cas de grossesse, il faut consulter un médecin car, du fait des risques d’infection pour le fœtus, toute morsure de tique fait réaliser une surveillance (le traitement antibiotique préventif n'est plus systématique).
• Chez l’enfant de moins de 8 ans.
• En cas d’immunodépression (traitement immunosuppresseur, VIH...).
Après examen, le médecin traitant pourra prescrire, si nécessaire, un traitement antibiotique par voie orale.
Quel est le traitement de la maladie de Lyme ?
Les recommandations françaises sont cohérentes aux recommandations des pays voisins. Le traitement antibiotique proposé est désormais recommandé à des doses plus élevées et pour des durées plus prolongées qu’antérieurement (3 semaines), afin d’éviter le plus possible un échec lié à un sous-traitement.
Au stade de début, la maladie de Lyme se soigne à l'aide d'un traitement antibiotique assez banal (amoxicilline 1 g x 3 par jour, ou doxycycline 100 mg x 2 par jour, ou azithromycine 1 g le 1er jour, puis 500 mg par jour), pendant trois semaines.
Selon les signes et le moment du diagnostic par rapport à l’infection, le traitement antibiotique pourra cependant être plus fort (antibiotiques injectables type ceftriaxone) et plus prolongé (quatre semaines).
Les symptômes de la maladie de Lyme peuvent prendre des mois ou des années pour disparaître, même après un traitement antibiotique bien conduit, et ce pour plusieurs raisons : autres diagnostics d'infections que le Lyme ou co-infections avec le Lyme, réinfection avec Borrelia burgdorferi, échec du traitement antibiotique (l'amoxicilline doit être administrée en 3 prises par jour du fait de la demi-vie courte de cette molécule), réaction immunitaire post-infection et lésions séquellaires à la maladie de Lyme dans différents organes.
Une deuxième cure d’antibiotique peut être envisagée si la persistance des symptômes fait suspecter un échec au premier traitement. La maladie de Lyme chronique et le traitement prolongé ne sont pas reconnus.
Que faire si l’on continue à être malade après le traitement ?
• Certaines personnes peuvent continuer à éprouver des douleurs plus de six mois après le traitement antibiotique, mais cela n’a pas d’incidence si cela a tendance à s’améliorer.
• Dans les mois ou les années qui suivent une morsure de tique, certaines personnes se plaignent de signes cliniques très polymorphes mais très invalidants (fatigue, douleurs diffuses et chroniques avec ou sans sensations bizarres = paresthésies). Il est alors fréquent d’évoquer une "maladie de Lyme chronique", bien que dans un certain nombre de cas, il ne soit pas possible de faire la preuve de cette borréliose, ni par sérologie bactérienne, ni par culture, ni par PCR.
Quelques-unes de ces personnes semblent définitivement ou momentanément améliorées par des traitements antibiotiques mis en place de façon un peu « expérimentales », sans toutefois que le niveau de preuve ne permettre de conclure à une infection évolutive.
Les médecins préfèrent parler de "syndrome post-traitement de la maladie de Lyme (SPTML)" car il n'y a pas de réelle preuve d'une infection persistante. Par contre, une inflammation chronique de l'ensemble du cerveau a pu récemment être mise en évidence par une nouvelle technique de scanner qui visualise mieux le système immunitaire du cerveau, les cellules gliales. Ces résultats suggèrent que les médicaments conçus pour freiner la neuroinflammation (et non pas l'infection) pourraient être en mesure de soigner le SPTML, bien que des essais cliniques soient d'abord nécessaires pour déterminer l'innocuité et les avantages d'un tel traitement.
Le problème est que les tiques peuvent, en théorie, transmettre simultanément plusieurs bactéries : selon le programme CiTIQUE, en France, 31% en moyenne des tiques piqueuses d’êtres humains analysées (N=1412) sont porteuses d’au moins un agent potentiellement pathogène : 15% des tiques qui piquent les êtres humains sont porteuses de Borrelia burgdorferi sensu lato, la bactérie responsable de la maladie de Lyme et 14% sont porteuses d’un autre agent pathogène potentiellement dangereux pour la santé humaine. Des cas de probables co-infections entre Borelia burgdorferi et Bartonella ont été rapportés. Ces co-infections sont dues, soit à la morsure d’une même tique lorsque celle-ci est infectée par plusieurs bactéries, soit à des morsures multiples de plusieurs tiques lorsque chacune est infectée par des bactéries différentes.
Il n’est donc pas possible d’exclure qu’à côté de quelques cas authentiques de borréliose de Lyme ayant échappé au diagnostic biologique ou à un traitement insuffisant, puissent être mises en cause d’autres bactéries transmises par les tiques : des études récentes ont permis de confirmer, par exemple, le rôle pathogène des Bartonella chez des patients mordus par des tiques, dont de nouvelles espèces de Bartonella, pour la plupart parasites des rongeurs. Mais. il faut avoir conscience que ces cas semblent très rares.
Ces douleurs persistantes diffuses et polymorphes après morsure de tique peuvent donc s’avérer liées à la présence d’autres bactéries (bartonella, erhlichia, babesia...), elles aussi transmises par des tiques, éventuellement chez ces patients souvent multi-piqués. Ces cas sont cependant peu fréquents.
Il est donc indispensable de mettre en place les études épidémiologiques indispensables afin de colliger l’ensemble des informations cliniques que pourront communiquer ces patients. Ces données seront ensuite étudiées par des épidémiologistes dans le but de mieux caractériser cette population sur le plan clinique.
En attendant, l’instauration d’un traitement antibiotique chez ce type de malade ne doit se faire que dans le cadre d’une évaluation multidisciplinaire dans un centre de référence. Une étude de référence européenne a montré récemment qu'un traitement de 2 semaines par ceftriaxone injectable pouvait améliorer certains symptômes en cas de preuve d'une infection. Par contre, il est totalement inutile de prolonger le traitement antibiotique au-delà, car le risque n'est pas négligeable. La suite du traitement de ces douleurs post-Lyme repose sur d'autres techniques qui sont utilisées dans les syndromes douloureux post-infectieux chroniques et qui relèvent d'autres traitements que les antibiotiques.
• A côté de la maladie de Lyme, il y a beaucoup d'autres maladies qui peuvent être responsables de douleurs chroniques et diffuses. Le principal risque est de passer à côté d'une autre maladie (lymphome, leucémie, tuberculose, maladie neurologique...) avec un réel risque de perte de chance pour le malade. Plutôt que de s'obstiner à penser au Lyme, il vaut mieux remettre le dossier à plat, refaire l'examen et demander des examens et des avis spécialisés. Des examens strictements négatifs ne doivent donc pas dispenser de rechercher une autre cause à ces douleurs... et la liste est longue. L'histoire médicale est pavée de maladies qui se cachent derrière une autre. Le traitement d'une douleur neuropathique, suite à un dérèglement du système nerveux de la douleur, peut aussi être envisagé.
• A un stade très tardif, l’infection chronique a été responsable d’une activation du système immunitaire qui a pu provoquer une réaction inflammatoire et des lésions cicatricielles articulaires, cardiaques et neurologiques. Il existe donc des séquelles qui ne régresseront pas complètement avec le traitement antibiotique. Le traitement qui sera proposé par le médecin visera donc à seulement compenser ces problèmes.
Comment prévenir la maladie de Lyme ?
La meilleure façon de se protéger de la maladie de Lyme consiste à éviter les morsures de tiques.
Lors d’une promenade dans les zones boisées ou envahies par la végétation, du printemps à l’automne, il vaut mieux porter des chaussures fermées, des pantalons et des chandails à manches longues. Il peut même être conseillé de rentrer les jambes de pantalon dans les chaussettes dans les zones où la maladie de Lyme sévit tout particulièrement. Dans ces circonstances, il peut même être nécessaire d’utiliser un insectifuge à appliquer sur la peau découverte.
Il est généralement conseillé de porter des vêtements de couleur claire afin de repérer les tiques plus facilement et de les faire tomber avant qu’elles ne pénètrent sous les vêtements.
Les tiques se fixent à la peau mais leur élimination dans les 24 à 36 heures prévient habituellement l'infection. Il faut donc effectuer des inspections sur le corps des enfants et des chiens à la recherche de tiques après une promenade en forêt. La prise d’une douche ou d’un bain après la sortie est une bonne manière de le faire.
Lorsqu’une tique est fixée sur la peau, il convient de l'extraire prudemment en retirant en même temps la tête qui peut être infectée. Deux méthodes sont couramment utilisées pour retirer la tique avec sa tête : La première est de se servir d'un tire-tique. La deuxième méthode est de se servir de pinces propres pour attraper la tête le plus près possible de la peau, sans comprimer l'abdomen, et de retirer ensuite la tique entière. Il faut ensuite nettoyer le site de la morsure avec de l'eau et du savon ou de l'alcool ou du désinfectant. Si la tête de la tique se sépare et reste dans la peau, il faut essayer de la retirer à l'aide des pinces.
Comment réduire la présence des tiques près de sa maison ?
Pour empêcher les tiques de s'établir près des maisons d'habitation (si elle sont situées près d’une zone sauvage ou d’un bois), il est conseillé de tondre régulièrement la pelouse et d’entretenir la cour. Il faut aussi retirer les feuilles mortes, les broussailles et les mauvaises herbes en bordure de la pelouse et près des murs de pierre.
Il faut empêcher l'activité des rongeurs en nettoyant et en scellant les murs de pierre et les petites ouvertures autour de la maison.
Il faut empêcher les animaux domestiques, et particulièrement les chiens, d'aller dans les bois et mettre éventuellement des répulsifs à tiques sur les animaux domestiques.
Il faut disposer les balançoires et les carrés de sable des enfants à distance des terrains boisés. Il en est de même pour les réserves à bois.
Les terrasses en pierre ou en béton sont à privilégier dans les zones d’endémie.
La fréquence de la maladie de Lyme
Pour des raisons encore inconnues, la maladie de Lyme est en plein développement dans les pays de l’hémisphère nord, où elle est devenue la première maladie transmise par un vecteur (maladie vectorielle).
En France, les données disponibles estiment le nombre moyen de cas de borréliose de Lyme à 27 000 par an, soit un taux d’incidence annuel moyen estimé à 43 cas pour 100 000 habitants.
Les taux d’incidence sont cependant variables en fonction des régions, avec des taux élevés, supérieurs à 100 pour 100 000, en Alsace et dans le département de la Meuse.
Des taux intermédiaires, compris entre 50 et 100 pour 100 000, sont retrouvés pour la Champagne-Ardenne, l’Auvergne, la Franche-Comté, le Limousin et la région Rhône-Alpes.
Les taux les plus bas sont dans les régions Centre, Basse-Normandie, et Aquitaine.
Les liens de la maladie de Lyme
Le site du Ministère de la Santé
http://www.sante.gouv.fr/maladie-de-lyme.html
L’association France Lyme
http://francelyme.fr/
Les liens PourquoiDocteur
Bartonellose : dans la maladie des griffes du chat et dans le Lyme
Anaplasmose : une autre infection transmise par la morsure de tique
Bébesiose : un parasite de globules rouges transmis par les tiques
Maladie de Lyme : deux députés font la chasse aux tiques
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Maladie de Lyme et recherche collaborative
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