Pneumologie
Bronchoscopie : effet similaire de l’acide tranexamique et de l’adrénaline sur le saignement
Les résultats d'une étude randomisée en double aveugle ont montré un effet similaire de l'acide tranexamique et de l'adrénaline pour le contrôle du saignement per endoscopique bronchique. Toutefois, l’absence de groupe placebo affaiblit les résultats. D’après un entretien avec Clément FOURNIER.
Une étude, dont les résultats sont parus en octobre 2022 dans Chest, a cherché à évaluer l’efficacité de l’acide tranexamique versus celle de l’adrénaline ou cours des saignements per endoscopiques bronchiques. Pour cela, les auteurs ont analysé les données de 2033 actes d’endoscopies bronchiques (bronchoscopie souple, Ebus linéaire et Minisonde radiale) au cours desquelles 575 saignements ont eu lieu. Dans cette étude, les auteurs expliquent qu’ils ont choisi comme traitement de référence d’un saignement induit l’utilisation de sérum physiologique glacé en trois instillations et si le saignement persistait, alors le patient était randomisé pour instillation locale soit d’adrénaline soit d’acide tranexamique. Parmi les 575 saignements observés, 432 ont été contrôlés par le sérum glacé, les 142 patients restants étants alors randomisés dans les 2 groupes : 75 pour l’acide tranexamique, 67 pour l’adrénaline.
Il manque le groupe placebo
Le docteur Clément FOURNIER, chef du service d’endoscopie respiratoire à l’Institut Cœur Poumon du Centre Hospitalier Universitaire de Lille, souligne que cette étude a un design tout à fait correct et que l’idée de comparer l’efficacité de l’acide tranexamique à celle de l’adrénaline au cours des saignements per endoscopiques bronchiques est intéressante. Il précise, toutefois, que ce travail présente un défaut, que les auteurs ont eu l’honnêteté d’assumer, qui est l’absence de groupe placebo. En effet, il est difficile de savoir si l’un ou l’autre des médicaments est réellement efficace ou si c’est l’évolution naturellement favorable des saignements qui explique ces résultats car, comme le rappelle Clément FOURNIER, on sait pertinemment que ces saignements peuvent s’améliorer spontanément, lorsqu’ils sont modérés, ce qui constitue la majorité des cas.
Une efficacité comparable des deux produits
Clément FOURNIER explique que les résultats de cette étude ont montré la même efficacité de l’acide tranexamique et de l’adrénaline dans le contrôle des hémoptysies modérées. Concernant les hémoptysies sévères, le contrôle est moins satisfaisant mais identique avec les deux traitements. En effet, les auteurs ont classé les saignements par le biais d’une EVA et ont relevé que la totalité des hémoptysies légères étaient contrôlées quelle que soit leur prise en charge et que ces saignements représentent la majorité des cas d’hémoptysie. Clément FOURNIER précise qu’il s’agit de la « vraie vie » de l’épidémiologie du saignement au cours d’un geste diagnostic. Si celui-ci est minime, l’inquiétude n’a pas lieu d’être. S’il est plus important, il n’y a pas de bénéfice en terme d’efficacité de l’adrénaline sur l’acide tranexamique. Il est donc possible d’utiliser ces deux médicaments. Clément FOURNIER ajoute que le niveau de preuve pour l’efficacité de l’adrénaline n’était déjà pas très élevé et regrette l’absence de discussion autour de la terlipressine, qui a moins d’effets systémiques. En effet, l’adrénaline est utilisée pour ses propriétés de vasoconstriction locale mais il existe un passage systémique. Les profils de tolérance de l’adrénaline et de l’acide tranexamique semblent être les mêmes.
En conclusion, l’utilisation de l’acide tranexamique pour prendre en charge les hémoptysies per endoscopiques est possible mais n’apporte pas de valeur ajoutée à l’adrénaline. Probablement qu’une étude versus placébo aurait mieux validé ces résultats, toutefois intéressants…