Pneumologie
Mononévrite du nerf phrénique : une victime de la mode des séquelles post COVID ?
La mononévrite du nerf phrénique est observée chez les sujets ayant des symptômes de COVID long. Toutefois, ces anomalies sont déjà largement décrites chez les patients ayant séjourné en réanimation. Il n’est donc pas prouvé qu’elle soit une cause possible de dyspnée résiduelle post COVID. D’après un entretien avec Jésus GONZALEZ.
Une étude, dont les résultats sont parus en mai 2022, dans Thorax, a cherché à démontrer une association entre l’atteinte du nerf phrénique et le syndrome post-COVID. Pour cela, les auteurs de ce travail ont observé une série de cas avec une description des séquelles post COVID sur les radiographies thoraciques de 467 patients. Ils ont retenu ceux qui avaient une élévation de la coupole diaphragmatique, persistant au moins 7 mois après leur diagnostic d’infection par le COVID-19. Au total, 12 patients ont bénéficié d’une échographie du diaphragme et environ la moitié d’entre eux a bénéficié d’une étude neurophysiologique du nerf phrénique, d’un test de la fonction pulmonaire et d’un test de la fonction diaphragmatique. L’échographie a révélé des anomalies à types de mouvements diaphragmatiques réduits ou paradoxaux chez huit patients.
Une conclusion hâtive à une atteinte du nerf phrénique
Le professeur Jésus GONZALEZ, pneumologue à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière, à Paris, explique que les auteurs concluent à une atteinte possible du nerf phrénique en relation avec des séquelles post -COVID alors que seulement 12 patients ont eu des explorations et aucun d’entre eux n’a eu d’examen complet. Il précise que ces 12 patients avaient des tableaux très hétérogènes de syndrome post-COVID grave. Jésus GONZALEZ explique que les atteintes du nerf phrénique, observées chez les patients explorés, sont les mêmes que celles observées en cas de neuromyopathie post-réanimation. Il précise également que deux patients étaient atteints de fibrose pulmonaire, qui peut également être à l’origine d’une ascension diaphragmatique, de même que les séquelles parenchymateuses pulmonaires ou encore la fonte musculaire. De plus, certains patients étaient probablement porteurs de cette ascension diaphragmatique avant leur infection par le COVID-19. Ainsi, pour Jésus GONZALEZ il est difficile voire impossible de conclure à une mononévrite du nerf phrénique séquellaire d’une infection par le COVID-19.
De la nouveauté avec des éléments connus...
Jésus GONZALEZ explique que l’écueil de ce travail a été de réinventer des pathologies déjà décrites, en tombant dans l’effet de mode du long COVID avec ses séquelles inhabituelles. Pour lui, il s’agit d’un mélange très peu savant de descriptifs post-COVID, véhiculant un message totalement construit sur des éléments déjà connus. Il rappelle que les plus grandes séries des travaux sur les séquelles post-réanimation contiennent environ 80 patients et la masse de patients hospitalisés en réanimation pour une infection par le COVID-19 a fait ressurgir des atteintes et des séquelles qui avaient déjà été décrites. Jésus GONZALEZ regrette que les auteurs de ce travail aient chercher à faire « du neuf avec du vieux » et que le « fourre-tout » du COVID long ait encore frappé...
En conclusion, l’ascension de la coupole diaphragmatique par atteinte du nerf phrénique est fréquente en post-réanimation mais il est loin d’être prouvé qu’elle soit plus spécifiquement associée à l’infection par COVID-19...