Pneumologie
SAOS : pas d’effet de la PPC bien conduite sur l’incidence des cancers
L'adhérence au traitement par PPC est sans effet sur l'incidence globale des cancers au cours du SAOS, d’après les résultats d’une première étude à la méthodologie solide sur le sujet. Des explications à la négativité des résultats. D’après un entretien avec Fréderic GAGANDOUX.
Une étude française, dont les résultats sont parus en avril 2022, dans l’European Respiratory Journal, a cherché à évaluer l’effet protecteur de la PPC, bien conduite, sur l’incidence des cancers, chez les sujets atteints de SAOS. Pour cela les auteurs ont inclus des sujets issus de la cohorte du sommeil des Pays de la Loire. Les patients de cette cohorte ont été suivis de 2007 à 2017 et certains avaient un traitement par PPC. La question posée par les auteurs a été de savoir si les patients adhérents, c’est-à-dire qui utilisaient la PPC au moins 4 heures par nuit avaient moins de risque de cancer que les autres. Au total, 4500 patients atteints de SAOS, traités par PPC et sans antécédent de cancer ont été inclus et suivis pendant 5 ans et demi. Un appariement de cette cohorte avec les données de la CPAM a évité les perdus de vue.
Une première étude sur l’effet de l’adhésion à la PPC
Le professeur Frédéric GAGNADOUX, chef du service de pneumologie du Centre Hospitalier Universitaire d’Angers, et auteur de ce travail, rappelle qu’il existe une littérature bien fournie sur le thème de l’hypoxie du sommeil associée au cancer, tous organes confondus. Cette association a été beaucoup étudiée, avec des données physiopathologiques et cliniques. Un travail paru dans Chest, il y a environ deux ans, faisait état que les sujets hypoxiques étaient plus souvent atteints de cancer. Le lien avec l’adhérence à la PPC n’a pas encore été démontré. Il s’agit ici de la première étude en ce sens. Frédéric GAGANDOUX explique que, pendant les 5,5 années de suivi, 437 patients ont développé un cancer, soit moins de 10%, touts organes confondus. La comparaison de l’incidence des cancers entre les deux groupes de patients, adhérents et non adhérents à la PPC, a été réalisée en ajustant le mieux possible aux facteurs de confusion comme le tabagisme, la consommation d’alcool, le sexe et les comorbidités. Il s’est avéré que le taux d’incidence des cancers était légèrement plus élevé dans le groupe de patients non adhérents à la PPC (10,7 versus9,1), mais qu’après les ajustements, il n’existait pas d’effet protecteur de la PPC. Frédéric GAGNADOUX précise que, malgré la négativité de cette étude, un très faible signal de positivité existe concernant les cancers bronchiques, mais à la limite de la significativité ainsi que chez les sujets très hypoxiques.
Des résultats négatifs mais des explications
Frédéric GAGNADOUX souligne que, bien que les méthodes statistiques utilisées soient le gold standard pour les facteurs de confusion, les légers signaux positifs sont à prendre avec précaution et il fournit des explications sur la négativité des résultats. La première explication serait que les patients souffrent d’apnées du sommeil depuis très longtemps, donc le risque de développer un cancer existait avant la mise place de la PPC. La deuxième explication pourrait être liée à un effectif insuffisant, avec une durée de vie des patients également insuffisante. Enfin, la troisième explication est que le développement des cancers est multifactoriel et que l’hypoxie n’est pas un facteur suffisant pour conclure.
En conclusion, l’adhésion à la PPC ne suffit pas à réduire l’incidence des cancers chez les patients souffrant de SAOS et ne constitue pas un facteur protecteur, très probablement en raison du caractère multifactoriel du développement des cancers.