Pneumologie
Asthme préscolaire : les recommandations du GINA 2021 discutées
Le GINA 2021 a introduit la notion de traitement de crise par bronchodilatateurs de courte durée d’action associés à des corticoïdes inhalés chez l’enfant de 6 à 11 ans, l’adolescent et l’adulte au lieu des corticoïdes inhalés seuls mais élargir cette recommandation de prise en charge de l'asthme aux enfants d’âge préscolaire reste discutée. D’après un entretien avec Stéphanie LEJEUNE.
Une publication, parue en mars 2022 dans l’American Journal of Respiratory Critical Care Medicine, a fait le point sur les recommandations du GINA 2021 de prise en charge de la crise d’asthme de l’enfant de 6 à 11 ans et de l’enfant d’âge préscolaire. Les auteurs se sont interrogés sur le rationnel scientifique d’avoir de recommandations distinctes entre les enfants d’âge préscolaire et les enfants de 6 à 11 ans, adolescents et adultes quant à l’utilisation des bronchodilatateurs de courte durée d’action seuls. Alors qu’il ne semble pas raisonnable de pratiquer cette stratégie chez l’enfant en âge préscolaire, Liesbeth Dujits et al., pneumo-pédiatres, ont écrit une réponse à ce papier, également publiée dans l’American Journal of Respiratory Critical Care Medicine.
Quelles sont les justifications du GINA 2021 ?
Le docteur Stéphanie LEJEUNE, pneumo-pédiatre dans le service de pneumo-allergologie pédiatrique au Centre Hospitalier Universitaire de Lille, expose les justifications des recommandations du GINA 2021, en quatre points. Le premier point est que le traitement de l’asthme par bronchodilatateur de courte durée d’action seul est associé à un risque accru de décès ou de recours aux urgences, justification fondée sur les résultats d’une seule étude, réalisée en 20000 chez de jeunes adultes de 30 ans en moyenne. La deuxième justification est que la surconsommation des bronchodilatateurs de courte durée d’action est associée à une augmentation du risque d’exacerbations de l’asthme et de mortalité car elle est associée à un asthme non contrôlé. Le troisième argument est que l’utilisation régulière de bronchodilatateurs de courte durée d’action est associée à une régulation négative des récepteurs béta 2, à une perte de la réponse bronchodilatatrice, à une hyperréactivité accrue des voies aériennes et à une inflammation accrue des voies aériennes. Enfin, d’un point de vue comportemental, le fait de commencer un traitement par bronchodilatateurs de courte durée d’action seul entraine le patient à le considérer comme son principal traitement de l’asthme, ce qui peut augmenter les difficultés d’adhésion aux conseils ultérieurs de prendre des corticoïdes inhalés, tous les jours, même lorsqu’ils sont asymptomatiques.
L’enfant n’est pas un adulte miniature
Stéphanie LEJEUNE explique que le rationnel pour justifier d’une telle recommandation chez l’enfant de 6 à 11 ans est assez pauvre et, l’enfant n’étant pas un adulte miniature, il est difficile de pratiquer cette stratégie chez le très jeune enfant. En effet, il n’y a eu que deux études qui ont combiné les enfants de 6 à 1 ans avec des adolescents et les résultats n’apportaient aucune preuve solide. Stéphanie LEJEUNE souligne que chez l’enfant d’âge préscolaire, les données des essais cliniques sont actuellement insuffisantes pour étayer l’efficacité et la sécurité d’un corticoïde inhalé à faible dose au premier palier. Elle précise que plusieurs essais cliniques randomisés chez de très jeunes enfants ont comparé des corticoïdes inhalés à fortes doses, dès l’apparition des premiers symptômes d’exacerbation, avec des corticoïdes inhalés en traitement de fond, du montelukast ou des bronchodilatateurs de courte durée d’action en continu. La majorité des essais a conclu que ces stratégies de traitement étaient aussi équivalentes pour réduite les exacerbations que le traitement par bronchodilatateurs de courte durée d’action seul. Enfin, Stéphanie LEJEUNE, rappelle que la tolérance des bronchodilatateurs de courte durée d’action est excellente chez l’enfant alors que les effets généraux systémiques des corticoïdes inhalés sont à considérer, surtout quand leur prise n’est pas contrôlée.
En conclusion, les pneumo-pédiatres recommandent un traitement par bronchodilatateurs de courte durée d’action, au besoin, chez l’enfant d’âge préscolaire, présentant des épisodes d’exacerbation légères et peu fréquentes. La bonne pratique étant de s’attacher à évaluer, ajuster et revoir la réponse pour obtenir la meilleure prise en charge personnalisée de l’asthme.