Pneumologie
Interdiction de fumer à l’intérieur : un gros impact sur le tabagisme actif et passif
Une étude danoise et suisse très encourageante, évaluant l’impact de la loi sur l’'interdiction de fumer à l’intérieur a montré une efficacité de cette loi non seulement sur la morbidité cardio-vasculaire mais aussi sur le comportement des fumeurs, leur fonction respiratoire et sur l’amélioration du tabagisme passif. D’après un entretien avec Anne-Marie RUPPERT.
Une étude danoise et suisse, dont les résultats sont parus en mars 2022 dans Thorax, a fait le point sur l’impact de la loi interdisant de fumer à l’intérieur sur le comportement des fumeurs et leur fonction respiratoire. Il s’agit d’une étude de cohorte réalisée à partir de deux volumineuses cohortes, une suisse comprenant 30 000 sujets et une danoise comprenant 60 000 sujets. Ces deux cohortes ont été observées entre 2005 et 2010. La loi sur l’interdiction de fumer à l’intérieur est passée en 2007 au Danemark et en 2010 en Suisse, donc après cette étude. Les auteurs ont comparé l’impact de cette loi sur la prévalence du tabagisme et la fonction respiratoire des sujets fumeurs. Ils se sont également penchés sur l’effet de cette interdiction sur le tabagisme passif.
Des résultats encourageants pour tout le monde
Le docteur Anne-Marie RUPPERT, pneumologue et tabacologue à l’Hôpital Tenon à paris, souligne que ce travail est très intéressant, car jusque-là seule la réduction de la morbi-mortalité cardiovasculaire liée à l’interdiction de fumer en intérieure avait été démontrée et l’impact sur les maladies respiratoires et le comportement des fumeurs était encore al connu. Les résultats de cette étude ont montré que le tabagisme a diminué dans les deux pays, mais plus rapidement au Danemark. L’analyse de la fonction respiratoire des sujets a également montré une augmentation du VEMS plus importante chez les danois que chez les suisses. Chez les danois, elle a augmenté de 26 ml au cours de la première année, de 88 ml au cours de la deuxième année et de74 ml au cours de la troisième année, après l’interdiction de fumer à l’intérieure. De même, la capacité vitale forcée est apparue plus élevée dans la population danoise. Anne-Marie RUPPERT précise que les auteurs ont également évalué l’impact de cette loi en fonction du statut tabagique : actif, sevré ou non-fumeur. Le bénéfice est apparu plus grand chez les sujets fumeurs actifs ou sevrés, avec un gain de VMS de 143 ml au cours de la troisième année. Le bénéfice chez le non-fumeur, même s’il est plus modeste, est significatif, avec un gain de 99 ml de VEMS au bout de la troisième année.
Quid de la France ?
Anne-Marie RUPPERT insiste sur l’importance de l’impact de l’interdiction de fumer à l’intérieur, pour le sujet fumeur et el sujet non-fumeur. Elle rappelle, qu’en France, le décret Bertrand interdisant de fumer en intérieur est passé en mais 2006. L’interdiction de fumer en entreprise est passé en février 2007 et dans les bars et restaurants en janvier 2008. Anne-Marie RUPPERT souligne qu’il persiste une incohérence concernant les terrasses fermées, dans lesquelles le tabagisme est encore autorisé en France. L’efficacité de ces mesures sur la réduction du nombre de diagnostics d’accidents cardiovasculaires par passages aux urgences, après l’instauration de cette loi a déjà été prouvée par de multiples études. Ces résultats associés aux preuves apportées par ce travail sur l’impact sur la fonction respiratoire et le comportement des fumeurs devraient pousser les autorités à élargir l’interdiction de fumer dans les terrasses fermées. Anne-Marie RUPPERT explique que l’impact positif des médicaments utilisés contre la BPCO sur la fonction respiratoire est moins puissant que celui que cette interdiction a provoqué, ce qui mérite réflexion....
En conclusion, la loi interdisant de fumer en intérieur a montré une indiscutable efficacité sur la diminution de la prévalence des accidents cardiovasculaires mais aussi l’amélioration de la fonction respiratoire des sujets tabagiques actifs et passifs. Poursuivons !