Pneumologie
CBNPC: mutation KRAS, Sotorasib, efficacité et résistance
Le Sotorasib aurait une efficacité clinique durable dans les cancers bronchiques non à petites cellules avec mutation KRAS p. G12C mais une résistance acquise de mécanisme non univoque est possible. Une stratégie d’orientation des CBNPC muté KRAS vers le Sotorasib ou l’immunothérapie transparait. D’après un entretien avec Jacques CADRANEL.
Deux études, dont les résultats sont parus conjointement en octobre 2021 dans le New England Journal of Medicine, ont cherché à évaluer une stratégie d’orientation dans la prise en charge des cancers bronchiques non à petites cellules avec mutation KRAS et à comprendre les mécanismes de résistance au traitement de ces cancers. La première étude, très clinique, a cherché à démontrer le bénéfice du traitement pas Sotorasib dans les cancers bronchiques on à petites cellules avec mutation KRAS, chez 126 patients, en seconde intention. La seconde étude, plus biologique, a cherché à identifier les mécanismes de résistance par des analyses génomiques et histologiques avant et après un traitement par Adagrasib, chez 38 patients.
Quelques généralités sur KRAS
Le professeur Jacques CADRANEL, chef de service de pneumologie à l’Hôpital Tenon à Paris, rappelle ce qu’est KRAS. Il s’agit d’une petite molécule intra-cellulaire ayant une activité GTP ase, en position juxta-membranaire. Elle agit comme un interrupteur cellulaire qui transmet l’information le plus souvent à partir d’un facteur de croissance (EGFR)Quand la protéine KRAS est mutée, elle devient oncogène notamment pour le pancréas, le colon et le poumon. La plupart des mutations de la protéine KRAS se trouvent sur l’exon 2. Concernant le poumon, la mutation KRAS est présente dans 25 à 35% des cancers bronchiques non à petites cellules. Jacques CADRANEL explique que quand il existe cette mutation, l’interrupteur est sur « on » en permanence, quel que soit le signal qu’il reçoit. Pour lui, la question non résolue est de savoir si la mutation KRAS est à l’origine du cancer ou si elle agit comme un « driver ». La mutation KRAS est souvent associée aux cancers liés au tabac et ces cancers nt généralement une bonne réponse à l’immunothérapie. Jacques CADRANEL souligne que, jusqu’à présent, cibler KRAS était un échec, ce qui est préjudiciable car ces cancers sont de mauvais pronostic.
Une ébauche de stratégie de sélection des KRAS
Jacques CADRANEL précise que la Sotorasib et l’Adagrasib sont des inhibiteurs spécifiques et irréversibles d’un sous-type de mutation, la mutation G12C, qui représente 50% des mutations. Ils permettent le blocage de l’interrupteur en position « off ». Ces deux médicaments sont différents mais ont le même mode d’action, sachant que la première étude évoquée ici correspond à la phase 2 des essais avec le Sotorasib, les essais de phase 1 et2 avec l’Adagrasib, n’ayant pas encore été publiées. Jacques CADRANEL relève, que, de manière très claire, ces molécules agissent mieux sur les cancers bronchiques que sur les autres cancers et que cet effet « organe » est mal compris. Il souligne également que les malades ont été très sélectionnés, avec une majorité de femmes, qui représentent une sous-population très particulière. La mutation KRAS serait- elle plus présente chez les femmes ? Et auraient-elles un meilleur pronostic ? La réponse au Sotorasib est marquée par sa durabilité puisqu’à 9 mois 60% des patients sont toujours répondeurs et par sa bonne tolérance avec moins de 6% d’effets indésirables de grade 3. Jacques CADRANEL relève que les sujets PDL1 négatifs répondent mieux, ce qui pourrait permettre d’ébaucher une stratégie de sélection des mutations KRAS vers l’immunothérapie ou le Sotorasib.
Quid des mécanismes de résistance
Jacques CADRANEL explique qu’en cas de progression après un traitement par Adagrasib et re-biopsie, on est capable d’identifier un mécanisme de résistance dans environ 50% des cas. Plusieurs mécanismes de résistance seraient associés. La très grande majorité des malades qui résistent au traitement ont une mutation KRAS supplémentaire, c’est-à-dire pas uniquement sur l’exon 2. On observe également parfois une amplification de la mutation, en particulier le G12C. Jacque CADRANEL observe que l’on voit des réarrangements apparaitre, avec une transformation en carcinome épidermoïde. Donc soit la voie est bloquée, soit il y a un by-pass avec une autre voie (MET ou RET), soit un autre type cytologique apparait.
En conclusion, d’autres essais thérapeutiques sont nécessaires pour élaborer précisément une stratégie de prise ne charge des cancers bronchiques avec mutations KRAS et pour préciser le ou les mécanismes de résistance au traitement.