Pneumologie

Marijuana et cancer : un lien probable mais difficile à prouver

L’association entre la consommation de marijuana et le risque de cancer est difficile à prouver en raison des difficultés d’évaluation de la consommation mais un faisceau d’arguments évoquent un lien probable. D’après un entretien avec Anne-Marie Ruppert.

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  • 13 Fév 2020
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    Une méta-analyse dont les résultats sont parus en novembre 2019, dans le JAMA Network Open, a cherché à montrer le lien entre la consommation régulière de marijuana et le développement de cancers. Au total, 25 études ont été recensées et le risque de développer des cancers du poumon, de la tête et du cou, et des testicules a été évalué.  Huit études concernaient le cancer bronchique. Au total, le niveau de preuve de ce lien a été de faible intensité, sauf peut-être pour le cancer du testicule.

     

    Des difficultés dues à une consommation peu standardisable

    Le docteur Anne-Marie Ruppert, pneumologue addictologue à l’hôpital Tenon, explique que la question est intéressante mais que la réponse est frustrante. Elle rappelle que, dans le monde, 18 millions de personnes consomment du cannabis, dont 5 millions à l’année, 1,5 millions mensuellement et 900 000 quotidiennement alors que dans cette méta-analyse l’évaluation de la consommation a été faite en joint-année (un joint par jour pendant un an), ce qui ne reflète pas la consommation réelle actuelle. Elle précise que la toxicité neurologique est indiscutable, ce qui n’est pas le cas sur le plan pneumologique. Concernant le risque d’emphysème, les preuves ont été apportées chez la souris mais, chez l’homme, les données sont inexistantes. L’emphysème apparaitrait  plus tôt qu’avec le tabac. D’autre part, l’explication du lien entre la consommation de cannabis et l’augmentation du risque de cancer testiculaire est floue.

     Les effets du cannabis plus fondés sur des croyances que sur des niveaux de preuve

    Pour Anne-Marie Ruppert, le niveau de preuve est insuffisant en raison d’une consommation peu standardisable mais elle ne peut pas s’imaginer que la fumée de cannabis ne soit pas carcinogène. En effet, les bouffées et l’inhalation de la fumée sont plus importantes avec un joint qu’avec une cigarette et, de plus, le THC est bronchodilatateur. Anne-Marie Ruppert précise que de nombreux biais limitent la validité de cette étude. En effet, le seul pays où il n’y a pas de consommation conjointe de tabac et de cannabis est la Nouvelle-Zélande. Cette co-consommation rend l’interprétation difficile. Elle explique que les fumeurs de cannabis pensent qu’ils fument « bio » alors que la composition de la fumée de cannabis est aussi carcinogène que la fumée de tabac. Ces fumeurs sont donc difficiles à convaincre de la toxicité de leurs habitudes.

     

    En conclusion, même si le lien entre la consommation régulière de marijuana et le risque de cancer n’est pas formellement démontré, il est difficilement imaginable qu’il soit inexistant. Reste à convaincre ces fumeurs « bio »…

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