Pneumologie
Pneumopathies interstitielles non spécifiques : intérêt de l’association du rituximab-mycophenolate
L'association rituximab et mycophenolate mofetil aurait un effet bénéfique sur la capacité vitale forcée et la fréquence des exacerbations dans les pneumopathies interstitielles non spécifiques, au prix d’une tendance accrue aux infections virales. D’après un entretien avec Laurent PLANTIER.
Une étude, parue en octobre 2023 dans l’European Respiratory Journal, a démontré l’efficacité de l’association rituximab-mycophenolate comparativement au mycophenolate seul pour le traitement des pneumopathies interstitielles diffuses avec un motif scanographique de pneumopathie interstitielle non spécifique (PINS). Il s’agit d’un travail réalisé par un réseau collaboratif de pneumologues français, experts en maladies rares et orphelines. Les auteurs ont inclus des patients ayant une pneumopathie interstitielle diffuse avec aspect scanographique de PINS ou ayant une PINS prouvée histologiquement. Au total, 122 patients ont été inclus, incluant à part similaire des PINS associées aux maladies auto-immunes, des PINS idiopathiques et des PINS associées à un ou plusieurs auto-anticorps positifs mais sans critère de maladie auto-immune. Ces patients étaient assez sévères, avec une capacité vitale en moyenne à 70% et une DLCO à 40% de la valeur prédite. Ils ont été séparés en deux groupes et ont été traités pendant 6 mois soit par mycophenolate seul soit par l’association rituximab-mycophenolate. Le critère de jugement principal était l’évolution dans le temps de la capacité vitale forcée et les principaux critères secondaires étaient la survie sans progression, la survenue d’exacerbations de fibrose, ainsi que la qualité de vie et la DLCO.
Le rituximab renforcerait l’effet du mycophenolate
Le professeur Laurent PLANTIER, pneumologue dans le service de pneumologie du Centre Hospitalier Universitaire de Tours, et co-auteur de ce travail, rappelle que de grands progrès ont été réalisés dans le domaine des pneumopathies interstitielles diffuses, en particulier dans le domaine de la fibrose pulmonaire idiopathique avec notamment l’identification des effets délétères des traitements immunosuppresseurs et de l’intérêt des médicaments anti fibrosants dans cette maladie. Toutefois, les efforts n’ont pas été aussi soutenus concernant le groupe des pneumopathies interstitielles diffuses de type PINS qui, si elles sont individuellement moins fréquentes que la fibrose pulmonaire idiopathique, concernent collectivement plus de patients. Bien que ces maladies soient dans l’ensemble moins sévères que la fibrose pulmonaire idiopathique, elles peuvent adopter une évolution progressive et conduire à une insuffisance respiratoire très sévère. Les PINS sont le plus souvent traitées par corticoïdes en première ligne, fréquemment relayés ou associés à un immunosuppresseur. Des séries rétrospectives et un essai de petite taille réalisés dans le contexte de la PINS associée à la sclérodermie suggèrent un bénéfice de la bithérapie rituximab-mycophenolate.
Un résultat positif mais attention aux infections virales
Laurent PLANTIER explique que les résultats de cette étude sont revenus positifs puisque les patients ayant bénéficié de 6 mois de bithérapie ont vu leur capacité vitale forcée augmenter de 1,6 points de pourcentage de la valeur prédite alors que la capacité vitale forcée des patients ayant eu un monothérapie a diminué de 2,01 points. Les patients ayant reçu la bithérapie ont présenté une meilleure survie sans progression essentiellement car ils ont eu moins d’exacerbations (deux exacerbations versus 8 pour les patients en monothérapie), cette différence étant très pertinente cliniquement. En revanche, le test de marche, la DLCO et la qualité de vie n’ont pas montré de différence significative. Laurent PLANTIER précise que ces résultats ont été similaire quelle que soit l’étiologie. Le bénéfice de la bithérapie était donc similaire chez les patients ayant une PINS idiopathique en comparaison aux patients ayant des marqueurs d’auto-immunité. En termes de tolérance, Laurent PLANTIER souligne que les patients sous bithérapie ont présenté plus fréquemment des infections virales (3 infections virales contre 0 pour les patients en monothérapie). L’étude a été réalisée entre 2017 et 2019, c’est à-dire juste avant l’épidémie de COVID19. Toutefois, il n’y a pas eu de différence en termes de mortalité et aucun patient n’est décédé d’une infection. La principale cause de décès était l’exacerbation aigue.
En conclusion, cette étude positive montre que la combinaison rituximab-mycophenolate est une association valide pour traiter les PINS, quelle qu’en soit la cause, en relais d’une première ligne de traitement.