Pneumologie
La supériorité des corticoïdes en particules extra-fines encore difficile à prouver
Les corticoïdes inhalés sous forme de particules extrafines seraient associés à moins de pneumonies chez les patients BPCO, mais ces résultats ne sont pas forcément transposables à toutes les molécules et à tous les dosages. Un existe un manque de données encore trop conséquent. D’après un entretien avec Mathieu MOLIMARD.
Une étude, dont les résultats sont parus en octobre 2023, dans le BMJ Open Respiratory Research, a cherché à démontrer que les corticoïdes inhalés en particules extra-fines modifiaient le risque d’hospitalisation pour pneumonie chez les patients atteints de BPCO. Il s’agit d’une étude de cohorte observationnelle issue d’une base de données danoise dans laquelle ont été inclus des patients BPCO recevant des corticoïdes inhalés, entre 2010 et 2017. Le critère de jugement principal était l’hospitalisation pour pneumonie, en fonction de l’utilisation de corticoïdes inhalés de taille standard ou en particules extra-fines Au total, plus de 35 000 patients ont été inclus, dont 1471 traités par des corticoïdes inhalées sous forme de particules extra-fines. Les auteurs ont ajusté sur la puissance corticoïde, utilisé des scores de propension et fait une analyse de sensibilité entre spray et poudres.
Un rôle de la taille des particules sur l’efficacité et les effets secondaires des corticothérapies inhalées ?
Le professeur Mathieu MOLIMARD, pharmacologue et pneumologue, chef du service de Pharmacologie Médicale du Centre Hospitalier Universitaire de Bordeaux, rappelle que les corticoïdes inhalés augmentent le risque de pneumonie chez les patients atteints de BPCO et cela a été montré en premier pour la fluticasone à forte dose. Il explique que les particules extra-fines modifient la distribution du médicament, en provoquant une distribution plus périphérique, ce qui peut modifier l’efficacité et les effets indésirables, et donc le risque de pneumonie. Les résultats de ce travail ont montré que sur un an 9,8% des patients traités par particules de corticoïdes extrafines et 13,2% des patients traités par taille standard ont été hospitalisés pour pneumonie soit un après ajustement un hazard ratio de 0,75 (95% CI 0,63 to 0,89; p=0,002). Cependant, la fluticasone propionate, représentait 46% des traitements en taille standard et 0% des particules extra-fines. Mathieu MOLIMARD relève qu’il n'y a quasiment aucun patient qui consommait de la béclometasone en taille standard, la majorité étant en particules extra-fines. Il pose donc la question de savoir si ces effets ne seraient pas plutôt liés à la molécule et à son dosage, plutôt qu’à la taille des particules.
Pas assez de données pour pouvoir conclure
Mathieu MOLIMARD estime que l’analyse de la sensibilité aurait été plus intéressante si les auteurs avaient comparé indépendamment fluticasone et budésonide, ce qui aurait permis d’évaluer l’effet « molécule ». D’autre part, il précise que comme toute étude observationnelle, ce travail génère des hypothèses mais ne permet pas de conclure sur un bénéfice de la taille extrafine seule. Ainsi, pour Mathieu MOLIMARD, ce travail intéressant et de bonne facture, ne permet pas de conclure que le fait d’utiliser des particules extra-fines augmente ou diminue le risque de pneumonie chez les patients atteints de BPCO traités par corticoïdes inhalés.
En conclusion, le risque de pneumonie lié à l’utilisation des corticoïdes inhalés chez les patients atteints de BPCO n’est pas forcément lié à la taille des particules inhalées. Il est donc nécessaire d’utiliser la dose minimale efficace, à adapter à chaque patient et surtout de ne pas en donner de manière systématique à tous les sujets BPCO, si cela n’est pas indispensable…