BPCO : pas d’impact de l’insuffisance cardiaque sur les exacerbations, selon les critères de Rome

Les récents critères de Rome ont apporté des modifications dans la classification de la sévérité des exacerbations des patients atteints de BPCO. Ces nouveaux critères de sévérité ne sont pas influencés par l'association à une insuffisance cardiaque chronique. D’après un entretien avec Gaétan DESLEE.

Une étude, dont les résultats sont parus en septembre 2023, dans l’International Journal of Chronic Obstrcutive Pulmonary Disease, a cherché à déterminer l’influence de l’insuffisance cardiaque sur la sévérité des exacerbations des patients atteints de BPCO, en fonction des récents critères de Rome. Il s’agit d’une étude issue d’une cohorte suédoise pour laquelle auteurs ont formé trois groupes de patients : un groupe attient de BPCO sans insuffisance cardiaque (15 sujets), un groupe atteint de BPCO avec insuffisance cardiaque (28 sujets) et un groupe sans BPCO mais avec insuffisance cardiaque (41 sujets). Ils ont ensuite observé le nombre d’exacerbations et ont classé leur sévérité  en fonction des critères de Rome. Ils ont évalué l’effet de la dyspnée au repos et à l’effort dans les trois groupes de patients. Au total, 125 cas d’exacerbations ont été identifiés.

Une sévérité moindre liée à la nouvelle définition de l’exacerbation

Le professeur Gaétan DESLEE, chef du service de pneumologie du Centre Hospitalier Universitaire de Reims, explique que les  résultats de ce travail sont attendus car, selon les critères de Rome de 2023, les exacerbations sévères sont moins fréquentes que lorsqu’elles sont classées selon les critères de 2022, qui les classaient « a posteriori ». Les critères de Rome version 2023, issus d’avis d’experts,  sont plus drastiques puisque la sévérité des exacerbations de BPCO est évaluée sur la dyspnée, la fréquence respiratoire, la fréquence cardiaque, la CRP et la saturation, au moment où les symptômes de l’exacerbation apparaissent, ce qui est plus objectif. L’exacerbation est classée comme sévère si la dyspnée est majeure avec une fréquence cardiaque à 95 bat/min., une CRP supérieure à 10, une hypercapnie et une acidose. Ainsi, les exacerbations classées sévères étaient plus nombreuses en 2022, classifiées en fonction de leur prise en charge médicale,  qu’en 2023. Ainsi, alors que 33% des sujets BPCO sans insuffisance cardiaque ont eu une exacerbation sévère en 2022, seulement 3% en ont présenté une en 2023. De même, 45% de sujets atteints de BPCO et d’insuffisance cardiaque ont développé une exacerbation sévère en 2022 contre 5 % en 2023. La diminution entre 2022 et 2023 se fait donc dans les mêmes proportions, que l’insuffisance cardiaque soit associée à la BPCO ou non.

Des faiblesses qui incitent à la prudence

Gaétan DESLEE précise que cette étude est intéressante car elle montre que la proportion d’exacerbations sévères reste la même en cas d’insuffisance cardiaque ou non,  mais qu’elle a des limites, d’une part en raison du faible effectif de patients mais également du faible nombre d’exacerbations évaluées. De plus, il ‘y a aucune information sur l’insuffisance cardiaque et son traitement, ni sur sa date d’apparition. L’analyse de la dyspnée au repos et à l’effort, au moment du pic de l’exacerbation ne montre pas de différence entre les deux groupes de patients BPCO, elle est légèrement moindre chez les patients insuffisants cardiaques sans BPCO, mais san notion de la sévérité de l’insuffisance cardiaque au départ. Gilles DESLEE estime donc qu’il faut interpréter ces résultats avec prudence ,car il s’agit d’une étude seulement descriptive, sur un faible nombre de patients, sans évaluation thérapeutique.

En conclusion, il n’apparait pas de différence sur la sévérité des exacerbations de BPCO, qu’une insuffisance cardiaque associée soit présente ou non, lorsque l’on applique les critères de Rome 2023. Toutefois, il s’agit d’une étude pilote, avec ses faiblesses, qui  nécessitent de futurs travaux, car jusque là toutes les publications sur le sujet sont fondées  sur les critères de Rome 2022.