Pneumologie
Impact des inhalateurs sur l’empreinte carbone : une estimation intéressante
Choix de l'inhalateur, jusqu'à quel point cela modifie-t-il l'empreinte carbone des traitements inhalés ? Faut-il préférer les systèmes poudre ? Une estimation danoise, à remettre à l’échelle mondiale des émissions de CO2 , apporte quelques éléments de réponse, qui ouvriront peut-être la voie à de nouvelles réflexions sur le sujet. D’après un entretien avec Pierre-Olivier GIRODET.
Une étude, dont les résultats ont été publiés dans l’European Respiratory Journal, en septembre 2023, a fait le point sur l’impact de l’empreinte carbone des inhalateurs respiratoires. Ce travail, réalisé en 2019, a utilisé des données issues du registre danois. Les auteurs ont déterminés le nombre de boîtes d’inhalateurs vendues et ont estimé une émission en équivalent CO2. Ils ont ensuite estimé l’économie en équivalent CO2, que réaliserait la conversion des sprays au profit des systèmes de poudre. Ils ont conclu qu’une diminution de 10% des ventes de dispositifs en sprays permettrait une réduction de 15 500 tonnes d’équivalent carbone annelle.
Une économie de l’empreinte carbone au profit des systèmes poudre ?
Le Professeur Pierre-Olivier GIRODET, pharmacologue à l’Université de Bordeaux, responsable du Centre d'Investigation Clinique (CHU de Bordeaux, Inserm), explique que ce court article est constitué de données limitées mais qu’il a la bonne idée d’évoquer la question de l’utilisation des gaz propulseurs dans les inhalateurs, qui sont de puissants gaz à effet de serre. Il précise que, dans ce travail, un seul tableau permet d’avoir accès au résultat de la simulation simple réalisée par les auteurs, alors que les mécanismes de simulation devraient être plus complexes qu’une simple règle de trois. Pierre-Olivier GIRODET relève, de plus, que les auteurs se sont fondés sur l’hypothèse que les patients consommaient deux bouffées matin et soir et étaient parfaitement observants ce qui est une hypothèse hautement illusoire, d’autant que les inhalateurs en sprays sont aussi des médicaments de secours, donc sans utilisation quotidienne. Il souligne également que les dispositifs à système de poudre n’ont pas une émission nulle en carbone, même s’ils en émettent moins. Il faut également tenir compte des systèmes de production et des matières plastiques utilisées, dans tous les systèmes d’inhalation.
Une estimation à remettre à l’échelle des émissions mondiales de CO2
Pierre-Olivier GIRODET estime qu’à la lecture de ces résultats, même si les données sont limitées, ce travail met le doigt sur une question existante et une réflexion globale est nécessaire. Il rappelle que le groupe aérosolthérapie de la SPLF a réalisé un travail sur l’empreinte Carbone des traitements inhalés et a montré que les systèmes d’inhalation représentaient 0,03% des émissions mondiales annuelles de CO2, en partageant la responsabilité avec les gaz anesthésiques, ce qui est finalement très faible, lorsque l’on sait qu’un passager voyageant en avion émet une demi tonne de CO2... Il est donc nécessaire de mettre ces résultats à la bonne échelle et de les relativiser, sans pour autant oublier de s’en soucier. Pour Pierre-Olivier GIRODET, ces résultats ne permettent en aucun cas de conclure qu’il faut convertir tous les systèmes d’inhalation en spray en dispositifs à système de poudre. Cela irait loin dans l’exagération…
En conclusion, la question de l’empreinte carbone des dispositifs inhalés à gaz propulseurs doit nécessairement se poser sans pour autant exagérer les actions à mettre en place, comme le remplacement systématique par les systèmes poudre, d’autant qu’à ce jour des travaux de précision sont encore nécessaires pour mesurer cet impact.