Pneumologie

Pneumonie communautaire sévère : réduction de la mortalité avec l’hydrocortisone

L'hydrocortisone réduit la mortalité dans la pneumonie communautaire prise en charge en soins intensifs, à condition de l’administrer précocement et d’avoir éliminé préalablement une pneumonie grippale. Des résultats encourageants mais qui méritent d’être affinés avant de généraliser cette pratique. D’après un entretien avec Damien BASILLE.

  • 29 Jun 2023
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    Une étude, dont les résultats sont parus en mars 2023 dans le New England Journal of Medicine, a cherché à démontrer l’efficacité de la corticothérapie sur la mortalité, au cours de la prise  en charge des pneumopathies communautaires, nécessitant une hospitalisation en unité de soins intensifs ou en réanimation. Pour cela, les auteurs ont inclus 800 patients atteints de pneumonies sévères et hospitalisés en unité de soins continus, à germe banal ou non identifié. Ont été exclus les patients atteints de pneumonies grippales, tuberculeuse ou fongiques ou encore les patients en choc septique. Le patients inclus ont bénéficié soit d’oxygénothérapie nasale à haut débit, soit d’oxygénothérapie au masque à haute concentration, soit d’une intubation avec ventilation mécanique. Les sujets ont été traités par hydrocortisone, en phase d’attaque, à raison de 200mg par voie intraveineuse pendant 4 jours puis  les patients qui s’amélioraient ont bénéficié d’une phase de décroissance. Les autres patients ont vu la phase d’attaque se prolonger jusqu’à 7 jours, avec une décroissance jusqu’au quatorzième jour. Les critères d’évaluation étaient la mortalité, l’intubation, l’utilisation d’amines vasopressives et la durée d’hospitalisation en soins continus.

     

    Un travail de très bonne qualité

    Le docteur Damien BASILLE, pneumologue dans le service de pneumologie et de soins continus cardiothoraciques et voies respiratoires, au Centre Hospitalier Universitaire d’Amiens, félicite la belle réalisation de ce travail qui permet de répondre partiellement à une question posée depuis longtemps concernant la place de la corticothérapie dans la prise en charge des pneumopathies communautaires, notamment sur l’effet délétère de l’inflammation. Il rappelle que les essais précédents peinaient à répondre à la question de la mortalité, qui est le point essentiel de cette étude. La stabilité clinique, dont l’apyrexie, était jusque là le critère principal recherché. Au cours de ce travail, les principaux critères recherchés étaient la mortalité, la nécessité d’une intubation, la durée du séjour en réanimation et l’utilisation d’amines vasopressives. Les risques compétitifs sont également bien pris en compte. L’étude a été interrompue car son objectif a été atteint avant l’issue, même si, selon Damien BASILLE, il est difficile d’être formel car la population incluse est très ciblée et le choix spécifique de l’hydrocortisone et du protocole de décroissance n’est pas clairement expliqué. Toutefois, les résultats ont montré que la mortalité a significativement diminué, (6,2% versus 12%), et est même inférieure a ce qui était initialement attendu. De même, le recours à la ventilation mécanique et à l’utilisation d’amines vasopressives était significativement plus bas. Sur le plan de la tolérance, les risques infectieux et effets gastro-intestinaux n’ont pas été observés. Seule une augmentation de la consommation d’insuline a eu lieu. Pour Damien BASILLE, cet effet indésirable était attendu et tout à fait gérable.

     

    Ne pas généraliser hors du sous-groupe de patients répondeurs

    Damien BASILLE explique que, malgré les bons résultats de cette étude, il faut prendre en compte deux limites. La première étant la question du choix de l’hydrocortisone. Il rappelle que les études précédentes utilisaient de la méthylprednisolone et que leurs résultats étaient négatifs. L’hydrocortisone n’a pas les mêmes propriétés pharmacologiques. D’autre part, cette étude exclut les patients en choc  septique initial et a inclus un grand nombre de femmes, alors que l’on sait que l’hydrocortisone a un meilleur bénéfice chez les femmes que chez les hommes ainsi que chez les sujets n’ayant pas eu recours à la ventilation mécanique. Pour Damien BASILLE, ces résultats sont intéressants mais conditionnés par une administration précoce de l’hydrocortisone et l’élimination initiale des pneumonies grippales ou à l’origine d’un choc septique. Ces conditions ne permettent donc pas de généraliser ces conclusions.

     

    En conclusion, cette étude très bien menée répond partiellement à la question de la place de la corticothérapie dans le traitement des pneumopathies communautaires, nécessitant une hospitalisation en soins intensifs ou réanimation. Il est toutefois nécessaire d’affiner le sous-groupe de patients répondeurs et de ne pas généraliser ces résultats. De nouveaux travaux seront les bienvenus.

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