Pneumologie
Sybil : besoin de trouver sa place dans la prédiction du risque de cancer du poumon
Sybil, la nouvelle intelligence artificielle qui prédit le risque futur de cancer du poumon d'un individu à partir d'un seul scanner thoracique low dose a un avenir prometteur mais quelques réserves sont encore émises. Cette application doit trouver sa place dans le dépistage du cancer du poumon. D’ après un entretien avec Sébastien COURAUD.
Une étude, dont les résultats sont parus en février 2023 dans le Journal Of Clinical Oncology, a cherché à démontrer l’efficacité du logiciel d’intelligence artificielle Sybil, dans le dépistage du cancer broncho-pulmonaire par scanner low dose. Les auteurs sont partis de l’hypothèse qu’un modèle d’apprentissage évaluant l’ensemble des données volumétriques pourrait prédire le risque individuel sans nécessiter de données démographiques ni cliniques supplémentaires. Pour cela, les auteurs ont évalué Sybil sur trois volumineuses cohortes indépendantes , totalisant plus de 27 000 patients, fumeurs on non-fumeurs. Ce logiciel peut fonctionner en temps-réel, sur tout type d’appareil tomodensitométrique.
Un logiciel intéressant par son autonomie
Le professeur Sébastien COURAUD, chef du service de pneumologie aigue spécialisée et cancérologie thoracique, de l’hôpital Lyon-Sud, rappelle que de nombreux articles traitant de l’intelligence artificielle pour détecter des nodules pulmonaires ont déjà été publiés. La détection des nodules pulmonaires par scanner low dose est une application intéressante en radiologie. Il précise que ce travail a un intérêt particulier car les auteurs de Sybil ont travaillé sur un système qui permet de prédire l’apparition d’un cancer broncho-pulmonaire à 6 ans sur l’acquisition d’un seul scanner. Le fonctionnement de cette application a été testé sur plusieurs cohortes et fonctionne en autonomie : le logiciel va intégrer la totalité du volume à explorer et va catégoriser seul le risque de cancer à 6 ans. Il est apparu que le taux de faux positifs est inférieur à l’échelle utilisée aux USA dans leurs programmes de dépistage soit 8% versus 10%. De plus, Sébastien COURAUD précise que ce logiciel a fonctionné avec la même ampleur dans toutes les cohortes, indépendantes les unes des autres et avec des facteurs de risque différents, sans avoir besoin de données cliniques et utilisable sur les images issues de tous les types de machines. Toutefois, il souligne que l’on ne remplace pas les radiologues pour autant, car ils voient des images que la machine ne voit pas et vice versa. Sébastien COURAUD explique que l’intérêt actuel de ce logiciel relève de la notion d’aide à la lecture en proposant une deuxième lecture, qui, si elle est discordante avec la première, en nécessitera une troisième.
Attention à la surpuissance !
Sébastien COURAUD explique que l’intelligence artificielle est capable de voir une lésion avant que l’œil humain ne puisse la voir apparaitre. Toutefois, la question est de savoir s’il faut traiter quelque chose que l’on en voit pas. Une simple surveillance peut être mise en place. L’intérêt clinique est donc aléatoire. De même, les micronodules spécifiques, de très petite taille, ne seront pas traités mais surveillés. C’est pourquoi il faut prendre garde à la surpuissance et à l’absence de corrélation clinique. Il convient également de rester prudent par rapport aux risques de comorbidités liés aux explorations répétées. Pour Sébastien COURAUD, il faudra apprendre à utiliser l’intelligence artificielle à bon escient car on ne traitera jamais quelque chose que l’on ne voit pas. Ce type d’application doit encore trouver sa place dans le dépistage du cancer bronchopulmonaire.
En conclusion , le logiciel Sybil, utilisé dans le dépistage du cancer broncho-pulmonaire par scanner low dose est efficace mais est encore de l’ordre du rêve car trop de biais set d’interrogations sont encore présents, notamment le manque de corrélation clinique. Pour dans quelques années seulement ….