Etude française
La chirurgie de l'obésité traite le diabète avant le poids
La chirurgie de l’obésité induit une rémission du diabète. Le bypass comme la sleeve favorisent un bon contrôle de la glycémie. C’est ce qu’explique une étude de l’Inserm.
La chirurgie bariatrique est souvent décrite comme celle de l’obésité. Mais elle pourrait aussi bien être celle du diabète. En effet, dans les jours suivant l’intervention, les patients voient leur diabète se résoudre. Un miracle ? Pas tout à fait. C’est bien l’intervention qui modifie l’assimilation du glucose par l’organisme. Des chercheurs de l’Inserm et de l’hôpital Bichat (Assistance publique des hôpitaux de Paris) expliquent comment la chirurgie bariatrique agit sur le métabolisme dans Gastroenterology.
Une poche triple de volume
Les effets d’un bypass ou d’une gastrectomie en manchon s’étendent au-delà de la perte de poids. Afin de comprendre exactement comment ces interventions agissent sur le contrôle de la glycémie, l’équipe de Maude Le Gall a opéré des rats et suivi une quinzaine d’êtres humains traités pour obésité. Deux techniques dites « malabsorptives » ont été comparées : le bypass et la sleeve. Elles ont l’avantage de réduire la quantité d’aliments ingérés tout en modifiant la façon de les assimiler.
C’est cette deuxième caractéristique qui intéresse les chercheurs, qui ont marqué le glucose afin de suivre son évolution dans l’organisme. Et les résultats révèlent un métabolisme très différent selon l’intervention choisie.
Dans le cas du bypass, la « branche Y » - c’est-à-dire la poche haute de l’estomac reliée à l’intestin – triple de volume. « Pour cela, elle a besoin de consommer énormément de glucose, explique Maude Le Gall dans un communiqué vidéo. Ce glucose peut venir soit de l’alimentation, soit du sang. On pense que c’est par ce mécanisme qu’on peut avoir une amélioration de la glycémie. » Les cellules exposent aussi un transporteur du glucose qui ne devrait pas se trouver dans l’intestin.
Adapter l’opération au diabète
De son côté, la sleeve n’entraîne pas d’augmentation de l’assimilation du glucose. C’est plutôt le contraire. En revanche, les chercheurs ont observé une augmentation du nombre de cellules sécrétant le GLP-1 (glucagon-like peptide), une hormone qui stimule la production d’insuline. Cela permet une régulation plus rapide de la glycémie après l’ingestion d’aliments.
Deux modes d’actions qui sont donc très différents mais qui aboutissent au même résultat : un retour rapide à une glycémie normale et stable.
Ces résultats sont importants car ils pourraient guider le choix de l’intervention selon les caractéristiques du patient. Un patient obèse et diabétique qui ne produit pas assez d’insuline serait donc plus facilement orienté vers la sleeve. « Dans les recommandations internationales, il y a déjà une réflexion sur le type de chirurgie à réaliser en fonction de l’IMC et de la nature des comorbidités associées, confirme Maude Le Gall, contactée par Pourquoidocteur. Il semble déjà clair pour la communauté que le diabète est plus efficacement soigné après un bypass qu’après une sleeve. Une autre chirurgie, encore très peu pratiquée en France car trop malabsorptive, serait même encore plus efficace que le bypass gastrique de Roux-en-Y. Il s’agit de la diversion bilio-pancréatique. »
Trop de récidives
Ces résultats confirment aussi le rôle majeur de l’intestin dans le contrôle de la glycémie. A tel point que Maude Le Gall n’exclut pas la création d’un médicament inspiré de la chirurgie bariatrique. Cela pourrait par ailleurs expliquer le fort taux de récidives du diabète chez les opérés. Il surviendrait en même temps que la reprise de poids, assez fréquente sur le long terme.
« Le recul sur 15 ans laisse penser que la majorité des patients reprend du poids et le diabète récidive également, explique Maude Le Gall. Une étude récente sur la cohorte suédoise SOS montre qu’après 2 ans, plus de 70 % des diabètes sont soignés, mais seulement 30 % sont encore en rémission après 15 ans. »
Un résultat qui soulève, encore et toujours, l’épineux problème du suivi des patients. Il est recommandé à vie, mais de nombreux opérés sont perdus de vue après une perte de poids satisfaisante.