Congrès de dermatologie de Copenhague
Tatouage : l'appel des dermatologues pour renforcer le contrôle des encres
Des dermatologues appellent à un meilleur contrôle des encres de tatouages, susceptibles de provoquer des infections de la peau.
Plus populaire que jamais, le tatouage ne semble pas faire l’unanimité au Congrès européen de dermatologie et vénérologie qui se tient en ce moment à Copenhague. Non que les dermatologues aient à redire sur la pratique elle-même, d’ailleurs ancestrale (voir encadré), mais l’innocuité des encres semble les laisser sceptique.
« Il faut établir une liste des pigments et des ingrédients sûrs d’emploi », réclame Christa De Cuyper, dermatologue belge spécialiste des modifications corporelles. « Il faut une norme européenne pour protéger les consommateurs ! », ajoute-t-elle, glissant au passage que 20 % des tatoués finissent par regretter leur choix après coup.
Le tatouage est réalisé par injection d’une ou plusieurs encres sous la peau, entre l’épiderme et le derme. Or, l’épiderme est notre première barrière immunitaire, et la plus efficace. Toute pénétration de la peau présente un risque d’infection, par des bactéries ou des virus comme celui de l’hépatite B.
Depuis 2008, la législation européenne encadre la réalisation des tatouages, justement pour éviter les problèmes de ce genre. La peau doit être désinfectée avant et après l’opération, les aiguilles stérilisées, les encres ne contenir aucune substance toxique. Mais pour Christa De Cuyper, les contrôles sur les encres sont encore trop laxistes.
Des encres contaminées
« Le marché n’est pas bien contrôlé. Certains pigments utilisés dans les encres ne font pas partie des produits autorisés par le Comité scientifiques des produits de consommation [l’instance européenne de contrôle des produits de la vie courante]. Qui plus est, des produits de mauvaise qualité peuvent être achetés sur internet en toute illégalité », déplore-t-elle.
En 2013, des chercheurs danois ont étudié la composition de 58 encres de tatouage classiques, achetées sur internet à 13 fournisseurs américains ou européens. Il s’est avéré qu’un flacon sur dix contenait des bactéries pathogènes. D’où leur conclusion, sans appel : la législation européenne n’est pas respectée dans les faits.
Des complications fréquentes ?
Des cas d’allergie et d’infections de la peau, avec formation d’excroissance ou inflammations purulentes, ont été rapportés en lien avec la pratique du tatouage. Mais quant à leur fréquence des infections, les données sont rares, admettent les auteurs. Une étude allemande de 2007 réalisée sur 234 patients évoque le chiffre de 2 % de complications.
Une étude américaine de 2015 mentionne quant à elle 10 % de réactions indésirables. « Les encres de tatouage devraient se conformer aux mêmes règles que les produits cosmétiques », conclut Christa De Cuyper, réitérant son appel à plus de contrôle.
La pratique des modifications corporelles, du tatouage en particulier, est immémoriale. En 1991, des randonneurs ont découvert un homme congelé depuis 7000 ans dans les Alpes tyroliennes. Surnommé Ötzi, il portait sur la peau de courtes lignes tatouées… à la poussière de charbon. Les archéologues débattent encore pour savoir si elles avaient une fonction décorative ou thérapeutique. On a aussi retrouvé des momies tatouées en Egypte (2000 av. J.-C.) et en Chine (IIe millénaire av. J.-C.).