Une augmentation de 11 %
Les hospitalisations liées à l'alcool ont explosé en dix ans
Les conséquences de la consommation excessive d’alcool restent en France un problème majeur de santé publique. Avec un coût humain et économique considérable, d'après le BEH.
« L’alcool, une des toutes premières causes d’hospitalisation en France », c'est le titre d'un article du Bulletin épidémiologique hebdomadaire (BEH) publié ce mardi. Les auteurs y présentent les résultats d’une étude portant sur l’ensemble des séjours hospitaliers, publics et privés, en lien avec la consommation d’alcool recensés en 2012, qu’il s’agisse de séjours en médecine, chirurgie, obstétrique et odontologie (MCO), en psychiatrie ou en soins de suite et de réadaptation (SSR). Avec des résultats pour le moins inquiétants en termes de santé publique.
Cirrhoses, complications neurologiques...
Ces résultats confirment, en effet, que les conséquences de la consommation excessive d’alcool sont parmi les premiers motifs d’hospitalisation en France. En 2012, plus de 580 000 séjours ont été induits par l’alcool en MCO, soit 2,2 % de l’ensemble des séjours et séances. Un chiffre en augmentation de 11,3 % par rapport à 2006 et correspondant à 316 824 patients.
Plus en détail, ces derniers se répartissent en 197 024 séjours pour lesquels l’alcool a été le motif principal de l’hospitalisation (alcoolisation aiguë et dépendance) et 383 860 séjours pour des comorbidités liées à l’alcool.
Par ailleurs, les auteurs s'inquiètent du nombre de séjours pour intoxication alcoolique aiguë qui a augmenté de plus d’un tiers en six ans, en MCO, témoignant du développement en France du phénomène du « binge drinking ».
Et en psychiatrie, les chiffres ne sont pas plus rassurants, avec plus de 2 700 000 journées qui lui sont imputées, représentant 10,4 % du total des journées (+2,3 % par rapport à 2009).
Dans ce groupe, les patients avaient en moyenne 48,2 ans, âge très proche de celui des patients hospitalisés en MCO pour traitement de leur alcoolo-dépendance. Et plus des deux tiers (68,5 %) étaient des hommes.
Enfin, même constat inflationniste en SSR, avec plus de 2 000 000 de journées liées à l’alcoolisation excessive recensées, soit 5,6 % de l’activité totale (+6,7 % par rapport à 2009). Cela a concerné au total 49 925 patients, la majorité d’entre eux (30 720 patients) ayant été hospitalisée pour la rééducation d’une complication secondaire à l’alcool (accidents …) ou pour une autre pathologie (cirrhose, complication neurologique...).
Une facture de 2,64 milliards pour l'hôpital
Ces séjours nombreux font bien évidemment grimper la facture de l'alcool à l'hôpital. Ainsi, le coût des séjours hospitaliers liés à l’alcool a pu être estimé, pour 2012 : en MCO à 1,22 milliard d'euros pour l’alcool sur 55,4 milliards au total ; en psychiatrie à 0,98 milliard d'euros pour l’alcool sur 9,4 milliards au total ; et en SSR à 0,44 milliard pour l’alcool sur 7,9 milliards au total.
Soit un total de 2,64 milliards pour l’alcool, représentant environ 3,6 % de l’Objectif national des dépenses d’assurance maladie (Ondam) hospitalier total (74,34 milliards d’euros).
8 000 décès par cirrhose
Pour estimer le recours aux soins pour cirrhose dans les hôpitaux, les auteurs ont fait appel à 42 services d’hépato-gastro-entérologie des centres hospitaliers généraux français en 2012. Sur les 2 201 patients atteints de maladie hépatique, 944 étaient atteints de cirrhoses. En majorité des hommes avec un âge médian de 60 ans. Parmi ces malades, 453 (48 %) avaient été vus en consultation, 324 (34 %) en hospitalisation conventionnelle et 162 (17 %) en hôpital de jour.
La cirrhose alcoolique a été responsable de plus de 8 000 décès en 2013.
Aborder la question de l'alcool plus précocement
En conclusion, ces chercheurs tirent le constat que le nombre des séjours pour alcoolisation aiguë et pour complications confirme l’intérêt d’aborder la question de l’alcool le plus précocement possible et lors de chaque séjour, de façon à espérer limiter à terme ces complications et les réhospitalisations qu’elles entraînent. « Cela nécessite d’améliorer la formation des équipes des services d’urgence et des services non spécialisés en addictologie et de renforcer les moyens attribués aux équipes de liaison pour qu’elles soient adaptées aux besoins des établissements de santé », est-il écrit dans l'article.
Pour rappel, l'alcool est responsable de 49 000 morts par an en France. Son coût annuel a été estimé à 17,6 milliards d’euros.