Etude française
Votre réaction face au hasard révèle vos tendances psychotiques
Impossible de réagir face à l'incertitude. C'est peut-être le signe des premiers stades de la psychose, d'après une étude française.
Les premiers stades de la psychose perturbent la prise de décision. C’est ce que démontre une étude menée à l’hôpital Sainte-Anne (Paris) et publiée dans Molecular Psychiatry. Les chercheurs ont étudié la manière dont les personnes en bonne santé réagissent face à l’incertitude. Le stade qui précède l’épisode psychotique se traduit par une sorte de blocage.
Dans le cadre de l’étude, 31 participants en bonne santé ont été recrutées. Âgés de 25 à 37 ans, ils étaient droitiers, les gauchers étant plus à risque de psychose. Tous ont participé à un jeu de pari sur ordinateur. Dans un cas, ils avaient 80 % de chances de gagner une livre (1,4 euros), dans l’autre cas, 80 % de chances de gagner 10 pence (0,14 euros).
Mimer la psychose
Pour perturber les participants, l’équipe a bouleversé les règles après chaque bloc de 60 situations. Un symbole qui faisait gagner de l’argent se mettait à en faire perdre, et vice versa. L’objectif était de savoir si les premiers stades de la psychose altèrent ou non le comportement face à l’incertitude.
Afin de mimer un début d’épisode psychotique, les chercheurs ont administré à certains patients une faible dose de kétamine par intraveineuse, à d’autres un placebo. L’anesthésiant, administré à de très petites doses, provoque des symptômes similaires à ceux qu’on observe au début d’une crise psychotique. L’activité cérébrale a été mesurée en continu par IRM fonctionnelle, afin de déterminer les effets du médicament.
Moins de symboles gagnants
La kétamine n’affecte pas l’impulsivité des choix ou des gestes des participants. En revanche, elle perturbe l’optimisation des choix. Chez les participants sous anesthésiant, seul la première série de choix est réellement optimale. L’effet est encore plus marqué sur le dernier bloc.
D’après les auteurs, le médicament altère la capacité à distinguer les périodes stables dans les règles du jeu, donc à prédire son comportement. Les participants ne misent donc pas sur les symboles gagnants.
« Cette étude caractérise le rôle clé de l’adaptation à l’incertitude dans la prise de décision et sa perturbation dans les premiers temps de la psychose, résume Raphaël Gaillard, professeur de psychiatrie à l’Université Paris-Descartes. Elle devrait permettre de mieux comprendre l’émergence du délire et de guider l’innovation thérapeutique. »