Enquête de l'association Renaloo
Maladies chroniques et emploi : la France peut mieux faire
Une enquête menée par l'association Renaloo montre que l'insertion professionnelle des malades chroniques est très inférieure à celle de la population générale.
« Et si on aidait les malades chroniques à travailler ? ». L’accroche se veut volontairement provocatrice. Et pour cause, le taux d’emploi des patients dialysés est seulement d’un peu plus de 17 % et de 51 % pour les patients qui ont reçu une greffe après une période de dialyse. Dans la population générale âgées de 25 à 65 ans, ce taux monte à 80 %. Une différence qui démontre l’impact sur l’insertion professionnelle des personnes atteintes de maladies rénales.
Ces résultats sont le fruit de deux enquêtes, qualitatives et quantitatives, menées par Renaloo, l’association de patients vivant avec une maladie rénale.
« On a voulu s’intéresser aux conditions de travail, au maintien dans l’emploi et aux ressources des personnes dialysées qui ne travaillent plus », explique Yvanie Caillé, fondatrice et directrice générale de l’association. Les résultats sont sans appel : « au fil des mois et des années en dialyse, les chances de rester dans l’emploi diminuent ».
Rester dans l’emploi
En France, entre 2 et 3 millions de personnes sont concernées par une maladie rénale. Parmi eux, 76 000 sont traitées pour une insuffisance rénale terminale. « Lorsqu’il reste moins de 10 % de la fonction rénale qui est assurée on parle d’insuffisance rénale terminale », souligne Yvanie Caillé. Plus de la moitié des patients traités le sont par dialyse, les autres ont reçu une greffe de rein.
La transplantation reste le meilleur traitement, puisqu’elle améliore sensiblement l’espérance de vie, mais surtout la qualité de vie par rapport à la dialyse. « La greffe permet plus simplement de rester dans l’emploi. Plus on passe d’année en dialyse, plus on a des difficultés à revenir vers l’emploi », souligne la présidente de Renaloo. « Il faut donc développer la greffe le plus tôt possible pour les personnes qui sont en âge de travailler », conclut-elle.
En dehors du maintien dans l'emploi, Renaloo a constaté que les patients dialysés ou greffés perçoivent des revenus inférieurs à 1 100 euros par mois. Pour rappel, le salaire médian en France est de 1 600 euros, tandis que le seuil de pauvreté est fixé à 987 euros. La maladie rénale et la difficulté d'insertion professionnelle sont donc des facteurs majeurs d'appauvrissement.
Une adaptation difficile
Plus que la maladie elle-même, c’est l’inadaptation du monde du travail et du système de santé qui rend difficile le maintien à l’emploi des malades chroniques.
Delphine, 38 ans, est dialysée depuis l’âge de 17 ans. Cette secrétaire RH dans la fonction publique explique qu’aujourd’hui « avec la dialyse, je travaille seulement à 80 %. Je suis obligée parfois de travailler à mon domicile pour pouvoir effectuer le suivi de mes dossiers et pallier mes absences. Mes responsables et mes collègues sont compréhensifs mais mes absences posent tout de même de gros soucis d’organisation et de suivi».
Au-delà des conséquences financières, la perte d’un emploi a un impact sur la santé même des patient. Bien plus qu’un travail, « l’emploi engendre un lien social », comme le souligne l’association.
Trois propositions
Au-delà du constat de l’impact de la perte d’emploi sur la qualité de vie, cette double enquête est donc un appel en faveur de l'insertion professionnelle des malades chroniques. Pour répondre à ce constat Renaloo propose donc d'améliorer l'accès à la greffe - via une augmentation du don de rein de donneurs vivants- mais aussi de faire du maintien dans l'emploi une priorité. "On pourrait adapter les horaires de dialyse, élargir l'auto-dialyse à domicile ou même faire des dialyses la nuit", propose Yvanie Caillé. Enfin, pour Renaloo, il faudrait veiller à une meilleure coordination entre les professionnels de santé et les entreprises.
En 2013, environ 14 000 patients ont attendu une greffe de rein, et seulement 3 000 d’entre eux ont pu être transplantés.