Immunogène, inoffensif et bien toléré
Chikungunya : des résultats encourageants avec un vaccin
L'Institut Pasteur vient de publier des résultats prometteurs d'un essai sur un vaccin contre le virus du chikungunya. Ce candidat s'est montré immunogène, inoffensif et bien toléré.
Depuis fin 2013, plus d'un million de cas de chikungunya ont été recensés rien que dans les Amériques et aux Caraïbes. Cette maladie virale transmise par les moustiques est devenue un important problème de santé publique et économique. Pire, le nombre croissant des voyages et de mouvements de population, ainsi que le réchauffement climatique, ont entraîné une augmentation de l’incidence de la maladie et son apparition dans les zones tempérées, étendant ainsi la menace pour la santé mondiale. Face à ces risques, des chercheurs franco-autrichiens ont publié ce mardi des données encourageantes sur un vaccin contre le chikungunya.
Un vaccin basé sur le virus vaccinal de la rougeole
Publiée dans la revue The Lancet Infectious Diseases, cette étude clinique de phase I du vaccin contre le chikungunya, basé sur le vaccin de la rougeole recombinant (MV-CHIK), a été réalisée entre novembre 2013 et juin 2014, sur un ensemble de 42 volontaires sains des deux sexes âgés de 18 à 45 ans qui ont été répartis en 4 groupes.
Ainsi, des doses faibles, moyennes ou fortes du vaccin ont été administrées et un groupe contrôle a reçu le Priorix (vaccin standard contre la rougeole). L'objectif de cette étude était de déterminer l'immunogénicité (développement d' anticorps), l'innocuité (sans danger grave) et la tolérance du vaccin.
Pour cela, les volontaires ont ensuite reçu un rappel administré 1 mois ou 3 mois après la première vaccination.
Un vaccin immunogène, inoffensif et bien toléré
Les résultats rapportés par les chercheurs de l'Institut Pasteur montrent que le vaccin expérimental a induit des anticorps neutralisants contre le virus du chikungunya dans tous les groupes dès la première immunisation. Les taux de séroconversion (1) des participants étant de 44 % dans le groupe ayant reçu la dose faible, 92 % dans le groupe ayant reçu la dose moyenne, et 90 % dans le groupe ayant reçu la dose élevée.
Par ailleurs, l'immunogénicité du vaccin expérimental n'a pas été affectée par l'immunité préexistante contre la rougeole.
De plus, la deuxième vaccination de rappel a entraîné la séroconversion de 100 % des participants dans tous les groupes ayant reçu le vaccin expérimental.
Enfin, ces scientifiques rapportent que le profil général d'innocuité est bon et que, « bien que le taux d'effets indésirables augmente avec la dose et le volume de vaccin, aucun effet indésirable grave lié au vaccin n'a été observé. »
L'avantage d'un procédé de fabrication validé
Comme commentaires à ces travaux, le Dr Frédéric Tangy, qui a développé cette technologie vaccinale, souligne que « le vaccin contre la rougeole a déjà prouvé son efficacité et son innocuité sur plus d'un milliard d’individus vaccinés au cours des 40 dernières années. Cette plateforme offre donc un excellent profil d'innocuité et les avantages évidents d'un procédé de fabrication validé et éprouvé. »
Une étude de phase II bientôt programmée
Le scientifique reste toutefois prudent en admettant qu'un travail supplémentaire « est nécessaire pour confirmer à plus grand échelle l'innocuité, la tolérance et la capacité du vaccin à protéger contre le virus du chikungunya.Nos premières données laissent penser que ce nouveau vaccin est un excellent candidat pour aider à résoudre cette urgence médicale. » « Ces résultats prometteurs nous permettent de progresser dans notre programme et d’envisager de tester rapidement ce vaccin contre le chikungunya dans des études cliniques de phase II », conclut le Dr Erich Tauber, PDG de Themis Bioscience (2), société qui développe le vaccin.
(1) Taux de séroconversion : pourcentage de participants/patients qui produisent des anticorps.
(2) Themis est une société de biotechnologie dédiée au développement de vaccins prophylactiques innovants contre les infections tropicales émergentes