Oncologie

Tumeurs solides dMMR précoces : l’immunothérapie révolutionne le traitement

Un traitement par immunothérapie permettrait d’éviter la chirurgie dans une large proportion de tumeurs solides et digestives précoces (estomac, rectum, œsophage) avec déficience du système de réparation des mésappariements de l'ADN (dMMR), sans compromettre la survie sans récidive. C’est l’avènement des traitements sans chirurgie première dans cette population particulière.

  • Panuwat Dangsungnoen/istock
  • 29 Avr 2025
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    La chirurgie est historiquement la pierre angulaire du traitement curatif des tumeurs digestives précoces (estomac, rectum, œsophage), conduisant néanmoins à des mutilations. Toutefois, des traitements non chirurgicaux, comme la radiothérapie combinée à la chimiothérapie, ont déjà permis des prises en charge conservatrices dans plusieurs cancers. Les tumeurs avec déficiences du système de réparation des mésappariements de l'ADN (dMMR), qui représentent 2 à 3% des tumeurs digestives, sont particulièrement sensibles au blocage du récepteur PD-1 ou PD-L1.

    Une équipe de chercheurs du Memorial Sloan Kettering Cancer Center ont présenté des résultats révolutionnaires avec un anti-PD1 dans cette population lors de la réunion annuelle de l'American Association for Cancer Research et dans un article publié dans The New England Journal of Medicine. Sur la base de résultats impressionnants en contexte métastatique, cette étude de phase 2 a évalué l'efficacité du dostarlimab en traitement néoadjuvant chez 117 patients atteints de tumeurs solides dMMR localisées. Après 6 mois de traitement, 84 patients (81%) obtiennent une réponse clinique complète, permettant une stratégie conservatrice sans chirurgie. Chez 49 des patients atteints d'un cancer rectal, les tumeurs ont disparu et, après cinq ans, n'ont pas réapparu.

    Des résultats qui changent complètement la stratégie thérapeutique

    Parmi les résultats secondaires, la survie sans récidive à 2 ans est de 92 % (IC à 95%, 86-99). Dans le sous-groupe de cancers rectaux (cohorte 1), tous les 49 patients ayant terminé le traitement ont choisi une gestion non chirurgicale, avec 76 % maintenant une réponse complète à 12 mois. Dans les autres tumeurs solides (cohorte 2), comprenant d'autres cancers, notamment de l'estomac, de l'œsophage, du foie, de l'endomètre, des voies urinaires et de la prostate, 65 % ont obtenu une réponse complète.

    Les événements indésirables sont rares et principalement de grade 1 ou 2 (95 %), sans perte d'opportunité pour une chirurgie curative en cas de réponse incomplète. L’analyse du suivi biologique par ADN tumoral circulant a montré une corrélation forte avec l’état tumoral, apportant un nouvel outil potentiel de surveillance.

    Une étude prospective sur divers types de tumeurs dMMR accessibles à une chirurgie curative

    Ces résultats proviennent d'une étude prospective multicentrique, incluant divers types de tumeurs dMMR accessibles à une chirurgie curative initialement planifiée. Malgré la taille modeste de certains sous-groupes et une durée de suivi médiane de 20 mois, les données démontrent une efficacité tumorale indépendante du site tumoral initial.

    Ces grosses tumeurs dMMR ont ce que l’on appelle des mutations de réparation des mésappariements dans leurs gènes, qui les empêchent de réparer les dommages causés à l'ADN. Ces tumeurs sont hérissées de protéines inhabituelles qui signalent au système immunitaire de les détruire. Mais les tumeurs érigent normalement une sorte de « bouclier » qui bloque les attaques du système immunitaire. L'immunothérapie, en perçant ce bouclier, permet au système immunitaire de détruire les tumeurs.

    Selon les auteurs et d’autres experts interviewés par le New York Times, ces résultats soutiennent un changement de paradigme vers une stratégie non chirurgicale avec immunothérapie première pour les tumeurs solides dMMR précoces. Les perspectives de recherche visent à affiner les critères de sélection des patients et à standardiser le suivi par ADN tumoral circulant. De futures études randomisées ou de plus grande ampleur seront nécessaires, notamment pour confirmer ces résultats à long terme et dans les localisations non colorectales.

     

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    JDF