Rhumatologie
Lombalgie chronique opioïdes-dépendante : bénéfices des psychothérapies MBT et TCC
Les lombalgies chroniques dépendantes des opioïdes restent difficiles à traiter. Deux approches psychothérapeutiques, la thérapie basée sur la pleine conscience (MBT) et la thérapie cognitivo-comportementale (TCC), offrent des bénéfices comparables pour soulager la douleur et réduire la posologie opioïde sur le long terme.

- Chinnapong/istock
Bien que cela ne soit contre-indiqué, la lombalgie chronique est l’une des causes les plus fréquentes de recours prolongé aux opioïdes, entraînant à la fois un risque de dépendance et des coûts considérables de santé, et pas seulement aux États-Unis. Malgré des traitements validés et une réadaptation à l’effort, de nombreux patients conservent une douleur modérée à sévère et une qualité de vie (QDV) réduite. Les traitements psychothérapeutiques, tels que la thérapie cognitivo-comportementale (TCC), ont montré des bénéfices sur le court terme pour améliorer la fonction et l’humeur, mais peu d’études se sont penchées sur leur efficacité à long terme chez des patients sous opioïdes. Dans ce contexte, une thérapie basée sur la pleine conscience (MBT), fondée sur la pratique de la pleine conscience (mindfulness), propose une stratégie d’acceptation et de régulation mentale différente de la TCC.
Une large étude randomisée et contrôlée (n=770) a comparé sur 12 mois la MBT et la TCC chez des adultes (≥21 ans) souffrant d’une lombalgie chronique modérée à sévère (score moyen 6,1/10 sur l’échelle de douleur) et sous traitement opioïde prolongé (≥15 mg/jour en équivalent morphine depuis au moins 3 mois). D’après les résultats publiés dans JAMA Network Open, après 8 séances en groupe (MBT ou TCC) et un suivi à 6 puis 12 mois, la douleur (échelle de 0 à 10) et le niveau d’incapacité (Oswestry Disability Index, ODI de 0 à 100) se sont améliorés dans les deux groupes, sans différence statistiquement significative entre les deux psychothérapies. Les doses moyennes d’opioïdes ont également diminué, sans événement indésirable grave imputable aux interventions.
Amélioration durable de la douleur et de la qualité de vie
Au-delà de ces critères primaires, l’étude a examiné la qualité de vie mentale et physique (SF-12) ainsi que l’évolution de la posologie opioïde. Chaque groupe a observé une amélioration durable des scores de douleur, de fonction et de QDV, ainsi qu’une réduction des doses d’opioïdes à 6 et 12 mois. Les auteurs notent que, bien que la TCC soit classiquement considérée comme la référence « gold standard » pour la douleur chronique, la MBT lui a été non inférieure, suggérant une efficacité équivalente.
Sur le plan de la tolérance, aucune complication majeure n’a été relevée ; la participation aux séances a été globalement satisfaisante, avec un taux d’adhérence correct malgré les contraintes liées à la douleur chronique et la diversité des modes de dispensation (en présentiel ou par téléconsultation).
Un essai clinique multicentrique en soins primaires et spécialisés
Les données proviennent d’un essai clinique multicentrique réalisé dans des structures de soins primaires et spécialisés, ainsi que dans des centres communautaires. Les patients, recrutés selon des critères volontairement larges (âge, niveau de douleur, posologie opioïde), ont été répartis de manière aléatoire dans l’un ou l’autre programme (MBT ou TCC), puis suivis selon le principe de l’intention de traiter. Bien que l’échantillon reflète majoritairement une population blanche et non hispanique (81,8 % de sujets blancs), la taille de l’échantillon et la durée d’observation permettent de considérer ces résultats comme robustes. Ils soulignent l’intérêt d’intégrer des approches psychologiques validées comme la MBT et la TCC dans la prise en charge standard de la lombalgie chronique, en particulier chez les patients sous opioïdes à posologie élevée.
À l’avenir, le développement de la psychothérapie en téléconsultation et l’amélioration de la couverture financière par les assurances pourraient faciliter l’accès à ces traitements validés. Il reste à explorer la meilleure façon de personnaliser ces interventions, de maintenir leurs effets au-delà d’un an et de déterminer quels patients y répondent le mieux. Dans l’immédiat, selon les auteurs, l’étude apporte des données solides justifiant l’inclusion systématique d’une psychothérapie de type MBT ou TCC, selon la préférence du patient et les ressources disponibles, afin de réduire à la fois la douleur et la dépendance opioïde à long terme.