Hématologie
Maladies rares : le repositionnement des médicaments basé sur l’IA apporte des solutions
Le blocage du TNF par l’adalimumab, suggérée par une analyse protéomique boostée à l’intelligence artificielle, offre une nouvelle voie thérapeutique prometteuse dans la maladie de Castleman multicentrique idiopathique réfractaire.

- Cameravit/istock
La maladie de Castleman multicentrique idiopathique (iMCD) est une affection rare mais potentiellement mortelle, marquée par une hyperactivation cytokinique d’origine inconnue. Jusqu’à présent, le traitement standard reposait sur l’inhibition de l’interleukine-6 par le siltuximab, efficace seulement chez 40 à 50 % des patients.
La forme sévère de l’iMCD, dite TAFRO (thrombocytopénie, anasarque, fièvre, fibrose réticulinique, insuffisance rénale et organomégalie), a un pronostic sombre, avec un taux de mortalité atteignant jusqu’à 35 % à cinq ans. Face à l’absence d’alternative thérapeutique efficace pour les patients réfractaires, la recherche active de nouvelles voies de traitement est impérative et a récemment été accélérée par le recours le repositionnement de médicaments existants boosté à l’IA.
Le TNF : une nouvelle cible thérapeutique
Afin d’identifier d’autres mécanismes cibles potentiels, une équipe internationale a conduit une analyse approfondie combinant protéomique, transcriptomique, études in vitro et approche computationnelle (IA). Les résultats ont révélé une suractivation marquée de la voie du TNF chez les patients atteints d’iMCD–TAFRO par rapport aux témoins sains. En particulier, les lymphocytes T CD4+ naïfs avaient une production de TNF plus de deux fois supérieure chez ces patients (43 % vs. 17 %).
Grâce à une approche innovante d'intelligence artificielle comparant systématiquement près de 4000 médicaments et 18 500 maladies, l’adalimumab, anticorps monoclonal inhibant spécifiquement le TNF, a émergé comme l’option thérapeutique la plus prometteuse après les inhibiteurs d’interleukine-6. Cette prédiction s’est confirmée cliniquement avec l’administration d’adalimumab chez un patient réfractaire à tous les traitements antérieurs. L’adalimumab a permis une rémission prolongée de 24 mois, la plus longue observée chez ce patient depuis le diagnostic initial.
Répercussions pour la pratique médicale
La découverte du rôle central du TNF dans l’iMCD–TAFRO ouvre des perspectives thérapeutiques immédiates pour les patients ne répondant pas aux inhibiteurs de l’interleukine-6. La réutilisation de l’adalimumab, déjà largement employé dans les maladies inflammatoires chroniques, constitue ainsi une avancée majeure susceptible de changer rapidement la prise en charge clinique de ces cas complexes.
Alors que le repositionnement de molécules déjà existantes a été majoritairement un échec au cours de la Covid-19 ette approche innovante combinant analyses « omiques », modélisations in vitro et intelligence artificielle pourrait accélérer considérablement la mise en place de nouveaux traitements dans d'autres maladies rares. Pour confirmer ces résultats préliminaires très encourageants, des essais cliniques de plus grande envergure sont maintenant nécessaires afin de valider l’efficacité et la sécurité à long terme de cette nouvelle stratégie thérapeutique ciblée sur le TNF.