Gynéco-obstétrique

Contraception hormonale : risque thromboembolique veineux à individualiser

La contraception hormonale reste un facteur de risque avéré de thrombose veineuse, avec des variations importantes selon la dose d’œstrogènes et le type de progestatif. Selon une étude nationale sur plus d’un million de femmes suivies 10 ans, les pilules faiblement dosées en estrogènes, les pilules progestatives seules et les dispositifs intra-utérins sans œstrogènes semblent avoir le risque le plus faible.

  • Anastasia Petrushina/istock
  • 12 Fév 2025
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    La contraception hormonale est depuis longtemps associée à une élévation du risque de maladie thromboembolique veineuse (MTEV), notamment sous forme de phlébite profonde et d’embolie pulmonaire. Les mécanismes incriminent principalement la composante œstrogénique, dont la dose élevée favorise l’activation de la coagulation. Les formulations plus récentes, intégrant des faibles doses d’œstrogènes, des progestatifs de troisième génération ou encore des œstrogènes dits « bioidentiques », soulèvent la question d’un risque potentiellement différent et parfois sous-estimé.
    Dans cette étude menée à l’échelle nationale danoise, plus de 1,39 million de femmes âgées de 15 à 49 ans ont été suivies sur une décennie, totalisant plus de 8,4 millions de personnes-années. Au cours de cette période, 2691 MTEV ont été répertoriées.

    Les résultats, publiés dans le JAMA, montrent que l’incidence standardisée de la MTEV par 10 000 personnes-années est de 2,0 (IC à 95 % : 1,9-2,1) chez les non-utilisatrices de contraception. En revanche, elle atteint 10,0 (IC à 95 % : 9,2-10,9) pour les pilules combinées et culmine à 11,9 (IC à 95 % : 4,4-25,6) pour les contraceptifs injectables. Les pilules progestatives seules et les dispositifs intra-utérins (DIU) affichent quant à eux un risque plus faible (3,6 et 2,1, respectivement).

    Risque élevé avec les combinées recourant à des progestatifs de troisième génération

    L’étude détaille également l’élévation du risque selon différents sous-groupes de contraceptifs oraux combinés. Ainsi, l’excès de MTEV varie de 3,0 (IC à 95 % : −1,8 à 7,7) pour les pilules à 20 µg d’œstrogènes associées au lévonorgestrel, jusqu’à 14,2 (IC à 95 % : 9,2 à 19,3) pour les formulations recourant à des progestatifs de troisième génération. Les préparations contenant des œstrogènes bioidentiques sont également associés à une augmentation du risque par rapport à l’absence d’utilisation contraceptive. Les anneaux vaginaux (8,0 cas pour 10 000 personnes-années) et les patchs (8,1 cas) se situent à des niveaux d’incidence proches des pilules combinées, bien que ces estimations soient parfois moins précises du fait d’un effectif limité.

    Malgré des ajustements robustes (âge, comorbidités cardiovasculaires, pathologies inflammatoires...), un risque de biais résiduel demeure possible. La tolérance globale vis-à-vis des contraceptifs dans le contexte MTEV inclut des facteurs comme l’indice de masse corporelle (IMC) et le tabagisme, disponibles pour un sous-groupe d’environ 347 000 femmes. Dans ces analyses restreintes, les conclusions restent similaires : l’augmentation du risque est principalement concentrée sur les contraceptifs combinés, et beaucoup moins marquée pour les options progestatives ou les DIU.

    Une étude de cohorte nationale au Danemark

    Ces résultats proviennent d’une étude de cohorte nationale, utilisant les registres de santé danois. Le suivi exhaustif de la population féminine âgée de 15 à 49 ans, sans antécédent de thrombose ou de pathologie sévère (cancer, maladies hépatiques ou rénales, etc.), garantit une vaste représentativité de la population générale. Le recueil de données sur les prescriptions de contraceptifs s’est appuyé sur des achats effectifs (redeemed prescriptions), ce qui limite les biais de déclaration.

    En revanche, la méthodologie observationnelle ne peut totalement exclure des facteurs confondants, même après ajustements (tabac, IMC, antécédents familiaux, etc.). De plus, l’homogénéité relative de la population danoise peut restreindre l’extrapolation à d’autres contextes géographiques ou génétiques.

    Le risque thromboembolique est à considérer avant chaque prescription

    Selon les auteurs, ces résultats rappellent l’importance de considérer le risque thrombotique lors du choix d’une méthode contraceptive. Les pilules à faible dose d’œstrogènes associées à des progestatifs « classiques » ou l’utilisation d’un DIU hormonal se profilent comme des options relativement moins risquées en termes de MTEV. Les médecins doivent également intégrer d’autres critères, comme la présence de surpoids, de facteurs de risque cardiovasculaire ou le tabagisme, afin de personnaliser la prise en charge contraceptive.

    Sur le plan des perspectives de recherche, il serait pertinent d’étudier plus avant les mécanismes sous-jacents au risque accru avec certaines molécules et de valider ces données dans des cohortes plus diversifiées, incluant différents niveaux d’exposition hormonale. L’analyse en sous-groupes de facteurs génétiques (ex. : thrombophilies) ou de comorbidités (ex. : diabète, maladies inflammatoires) pourrait affiner davantage la sélection du contraceptif optimal pour chaque patiente.

     

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